Luigi Di Maio © REUTERS

Luigi di Maio, le visage modéré qui fait triompher les populistes

Le Vif

Avec son allure soignée et son visage rassurant, Luigi Di Maio, dauphin désigné à seulement 31 ans par le volcanique Beppe Grillo, a fait des populistes du Mouvement Cinq Etoiles (M5S) le premier parti d’Italie.

Vice-président de la Chambre des députés depuis 2013, il apparaît désormais incontournable dans les discussions en vue du prochain gouvernement, avec plus de 30% des voix aux législatives de dimanche, selon des résultats encore partiels lundi matin.

Au sein du M5S, où l’outrance a longtemps été plutôt la règle, ce jeune Napolitain a su s’imposer avec son physique de gendre idéal et son costume-cravate toujours impeccable. Il tranche singulièrement avec Beppe Grillo, le comique fondateur et patron du M5S dont le verbe fleuri et les diatribes tonitruantes ont lancé le M5S. Mais à presque 70 ans, ce dernier s’est récemment mis en retrait d’un M5S devenu « mature », en lançant un nouveau blog et en retournant sur les planches où il avait mûri l’idée d’un mouvement basé sur la démocratie participative directe.

Lors du meeting de clôture de la campagne vendredi, le vieux militant à la crinière blanche a su s’en ternir à un court discours enflammé, laissant la vedette à son fringant dauphin. « Il est très populaire parmi les militants et sa force consiste justement dans le fait d’être complètement différent de Beppe Grillo, aussi bien dans sa communication que dans son apparence », explique à l’AFP Alberto Castelvecchi, professeur de communication à l’université Luiss de Rome.

« Rassurant pour les mamans »

Militant derrière Beppe Grillo depuis 2007, adhérent au mouvement dès sa création en 2009, Luigi Di Maio en a rapidement gravi tous les échelons.

Après un échec aux municipales de 2010 à Pomigliano d’Arco, près de Naples, il est devenu député et vice-président de l’assemblée — à seulement 26 ans, record d’Italie — trois ans plus tard. En septembre, il a été désigné candidat au poste de Premier ministre après un vote en ligne des militants du M5S où il a obtenu 82% des voix, un score insolent que ses détracteurs attribuent à l’absence de réelle concurrence. « Di Maio a été créé pour être modéré, rassurant pour les mamans », écrit le journaliste Jacopo Iacoboni dans un livre sur le jeune leader qu’il définit comme « une créature totale de la Casaleggio Associati », la société de conseil informatique qui gère le site internet et l’activité du M5S.

Fils d’un ex-dirigeant du Mouvement social italien, parti néofasciste aujourd’hui dissous, Luigi Di Maio réfute le terme de populiste, qu’il juge péjoratif, et assure ne pas vouloir d’une Italie extrémiste ou anti-européenne. Doté d’un calme à toute épreuve selon ses collaborateurs, le jeune candidat a aussi apporté la caution de sérieux qui a longtemps fait défaut au mouvement. Une image qu’il s’est employé à consolider au cours de la campagne électorale où il a effectué des déplacements à l’étranger et présenté l’équipe d’experts, souvent issus de la société civile, qui composeront son gouvernement en cas de victoire. Au risque de froisser l’aile orthodoxe du mouvement, il a également assagi son discours sur la sortie de l’euro, qui n’est plus d’actualité, ou sur les alliances avec d’autres partis, qui ne sont plus totalement exclues alors même que le M5S s’est construit sur le rejet de la vieille classe politique.

Marionnette

Parallèlement, « sur les sujets d’éthique et de l’immigration, la pensée du candidat Premier ministre ressemble à celle d’un surfeur qui suit la vague », écrivait récemment l’hebdomadaire catholique Famiglia Cristiana.

D’autres ont relevé son CV plutôt mince: il n’a pas mené à leur terme les études de droit entamées, et ses expériences professionnelles se limitent à avoir été brièvement administrateur d’un site web, assistant réalisateur et stadier. Ce qui fait dire à ses détracteurs qu’il n’est que la marionnette de Beppe Grillo et n’est pas intellectuellement armé pour diriger la troisième économie de la zone euro. Ce à quoi l’intéressé répond: « Le chancelier autrichien a mon âge, le président français 40 ans. L’heure est aux jeunes ».

C’est l’opinion qui règne dans son fief de Pomigliano d’Arco, où il a été élu triomphalement dimanche. « Nous on est propres, comme lui. C’est pour ça que nous votons Luigi: tel qu’il est aujourd’hui, il le restera demain. Il ne fera pas comme les autres », a lancé une électrice à l’AFP.

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