Vladimir Poutine et Angela Merkel lors du 70ème anniversaire du débarquement en Normandie © Belga

Longévité politique : peut-on comparer Poutine et Merkel ?

Stagiaire Le Vif

Angela Merkel et Vladimir Poutine sont en passe de décrocher, ou l’ont déjà fait, un quatrième mandat à la tête du pays. Notre pays a son équivalent : à l’époque, Wilfried Martens a dirigé près de neuf gouvernements belges en douze ans. Pourtant, malgré des durées de mandats quasiment similaires pour ces chefs d’état, nous voyons souvent la Russie comme une autocratie déguisée et la Belgique et l’Allemagne comme des démocraties avouées. Pourquoi ce deux poids deux mesures ?

C’est plus ou moins un fait : parlez de la Russie en public et les deux premières choses qui viendront aux esprits seront certainement la vodka et Vladimir Poutine. C’est dire si l’ex-membre du KGB (l’ancêtre de l’actuel FSB – la sécurité intérieure) semble représenter à lui seul l’ancien pays des tsars. C’est le seul président que les jeunes russes aient jamais connu, malgré la brève période de 2008-2012 où c’est son poulain Dmitri Medvedev qui reprit le flambeau. C’est qu’en Russie, les mandats présidentiels sont limités à deux consécutifs. Poutine est revenu en 2012 avec des mandats présidentiels allongés à 6 ans et une popularité toujours aussi grande, si pas plus.

Le 18 mars prochain, la Russie donnera très certainement à Vladimir Poutine son quatrième mandat présidentiel. Il sera donc à la tête de son pays jusqu’en 2024. Tout comme le président russe, la chancelière Angela Merkel entame également son quatrième mandat, elle qui est à la tête de l’Allemagne depuis 2005, et de son parti depuis 2000. Treize ans pour l’Allemagne, bientôt 20 ans pour le CDU, le parti chrétien-démocrate.

Le cas Martens

Avant les changements intempestifs de gouvernement des récentes années, notre pays fut également dirigé pendant de longues périodes par la même personne. Entre 1979 et 1992, avec une brève alternance de neuf mois en 1981, c’est Wilfried Martens qui a tenu le poste de Premier ministre. Douze ans donc. Après lui, Jean-Luc Dehaene et Guy Verhofstadt sont restés respectivement sept et neuf ans à la tête du pays. La Belgique était-elle autocratique ?

Yannick Vanderborght, professeur de sciences politiques à l’université Saint-Louis de Bruxelles, y voit plus volontiers une conséquence électorale: « On peut s’étonner d’un non-renouvellement du Premier ministre, mais les élections servent à cela. Tant que les élus estiment le Premier ministre apte, ils lui accorderont leur confiance. » Il souligne pourtant une exception de la politique belge, en parlant de Wilfried Martens : «  C’était une situation déjà exceptionnelle à l’époque, ce serait quasi impossible de revivre cela à l’heure actuelle « . Pour preuve, les 541 jours de blocage politique belge en 2011. Un triste record du monde.

L’histoire politique comme prisme

Si l’on tient seulement compte des mandats tenus, Poutine est resté 14 ans au pouvoir, Merkel 13 ans et Martens 12 ans. Mais, comme nous le disions en introduction, nous voyons pourtant volontiers la Russie comme un pays autoritaire, mais notre pays et son voisin d’outre-Rhin comme des démocraties. Qu’est-ce qui explique cette vision des choses ? « Il faut être prudent lorsque l’on fait cette comparaison : après la chute du mur de Berlin, la Russie n’a jamais vraiment été une démocratie. Alors qu’en Belgique et en Allemagne, il y a une logique de coalition depuis longtemps. » Il avoue que c’est une thématique peu abordée dans le plat pays : « On se pose beaucoup plus la question du cumul des mandats que du nombre de mandats dans le temps. C’est une question très intéressante« .

Thomas Modave

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