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Les quartiers rebelles d’Alep totalement assiégés par l’armée syrienne

L’armée syrienne assiège désormais « complètement » les quartiers rebelles de la ville d’Alep (nord) après avoir pris dimanche le contrôle de la dernière route permettant de les ravitailler, faisant craindre un désastre humanitaire

La reprise de cette route, dite du Castello, était l’une des priorités du régime de Bachar al-Assad. Elle lui permet d’isoler les insurgés qui contrôlent la moitié de la deuxième ville du pays depuis 2012.

Quelque 300.000 personnes, selon l’ONU, vivent dans des conditions de plus en plus précaires dans les quartiers rebelles de l’est, totalement coupés des quartiers de l’ouest aux mains du pouvoir.

Après des semaines de combats, « les combattants du régime ont désormais « totalement coupé » la route du Castello, au nord-ouest d’Alep, et de ce fait, « les quartiers de l’est sont complètement assiégés », a indiqué Rami Abdel Rahmane, directeur de l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).

La route du Castello restait le dernier axe que pouvaient emprunter hommes et marchandises pour entrer ou sortir des quartiers rebelles, notamment vers la Turquie.

Le 7 juillet, les forces prorégime avaient réussi à prendre position à moins de 500 mètres de la route, étant ainsi capables de tirer sur toute personne ou tout véhicule l’empruntant.

Un combattant rebelle a confirmé dimanche à l’AFP qu' »Alep était dorénavant à 100% assiégée ». « L’armée a atteint la route et a même arrêté un groupe de civils qui s’y trouvaient », a-t-il indiqué.

Un correspondant de l’AFP présent dans les quartiers rebelles a pour sa part indiqué qu’au moins six frappes aériennes avaient visé l’est d’Alep après cette dernière avancée des combattants du régime.

Selon l’OSDH, au moins 16 combattants rebelles ont été tués dimanche lors de l’avancée des troupes loyalistes au président Assad. Par ailleurs, six civils dont un enfants ont été tués dans des raids aériens sur des quartiers rebelles, tandis que six autres, dont deux enfants, sont morts dans des bombardements rebelles sur des zones contrôlées par le régime, a ajouté l’Observatoire.

Affamés

Selon les Nations unies, près de 600.000 personnes vivent dans des zones assiégées en Syrie, dans la plupart des cas par le régime, sans accès à la nourriture ni à une aide médicale.

Si les quartiers est d’Alep ne sont pas encore définis comme « assiégés » par l’ONU, cette dernière s’est déclarée « très inquiète de l’escalade de la violence » qui « met en danger des centaines de milliers de personnes » dans cette ville. Elle a appelé cette semaine « toutes les parties à autoriser la livraison de l’aide humanitaire » et à « l’évacuation des civils qui le désirent ».

Dans un communiqué, le Bureau de coordination des Affaires humanitaires de l’ONU (Ocha) a fait état d’une situation « particulièrement inquiétante en raison de la forte concentration d’habitants dans cette zone ».

Les habitants des quartiers rebelles ressentaient les effets du siège -pénuries, flambée des prix, fermeture des boulangeries faute de farine et de mazout- avant même la prise de contrôle de la route du Castello dimanche.

« En l’absence d’accès au monde extérieur, l’apparition de cas de famine n’est qu’une question de temps », a mis en garde dimanche « the Syria campaign », un groupe militant pour une Syrie démocratique.

Aux pénuries s’ajoutent les bombardements qui se sont intensifiés ces dernières semaines. Samedi, au moins 28 civils dont des enfants ont été tués dans des raids aériens sur les quartiers rebelles, selon l’Observatoire. Les rebelles ont riposté par des tirs de roquettes sur les secteurs ouest de la ville, tuant quatre personnes, toujours selon l’OSDH.

Alors que le régime resserre son étau sur Alep, l’envoyé spécial de l’ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, a récemment annoncé vouloir reprendre les négociations de paix en août. Deux sessions de pourparlers inter-syriens se sont tenues à Genève sous l’égide des Nations unies depuis le début de l’année, sans avancée majeure.

Dimanche, le Haut comité des négociations (HCN), qui rassemble les principaux représentants de l’opposition et de la rébellion syriennes, a assuré que l’avancée du régime à Alep menace de retarder toute reprise des pourparlers de paix.

Pour Basma Kadamani, membre du HCN, la « punition collective » imposée aux civils à Alep « place un grand point d’interrogation sur Genève », où plusieurs cycles de négociations ont eu lieu.

La guerre en Syrie a débuté en mars 2011 après la répression sanglante par le régime de Bachar al-Assad de manifestations réclamant démocratie et liberté d’expression. Elle s’est ensuite transformée en un conflit complexe impliquant acteurs syriens, régionaux et internationaux ainsi que des groupes jihadistes et a fait plus de 280.000 morts.

Réunis vendredi à Moscou, les chefs de la diplomatie russe et américaine, Sergueï Lavrov et John Kerry, se sont mis d’accord pour une coopération accrue en Syrie, notamment pour combattre les jihadistes.

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