Des jeunes membres du Front national placardent des affiches de Marine Le Pen à Lyon. © REUTERS

Les jeunes sont-ils vraiment moins radicaux ? (Infographies)

Stagiaire Le Vif

Selon le cliché, plus on est jeune, moins on a de chance d’être attiré par les partis populistes. Idée préconçue ou fait avéré ?

Peut-on établir un lien entre l’âge et la propension à voter pour un parti radical ? L’idée présente dans beaucoup d’esprits serait que plus on est âgé, plus on serait attirés par les partis radicaux et anti-Europe. Réalité ou simple cliché ? Le quotidien allemand Die Welt a eu l’idée d’analyser les résultats des dernières élections ainsi que les sondages des suffrages à venir pour se faire une opinion. Les chiffres risquent d’en surprendre plus d’un.

Le Brexit, une affaire d’âge

Le référendum du Royaume-Uni, sur le Brexit a sûrement sa part de responsabilité dans la diffusion de l’idée que les plus âgés sont les plus radicaux. Il faut dire que les résultats du Brexit sont éloquents. La question du « remain or leave » semble plus être une affaire d’âge qu’autre chose. Selon les chiffres publiés par YouGov, 71 %! des 18-24 ans ont misé sur le « In ». Et lorsque l’on observe les données de plus près, une fracture nette divise les Britanniques à partir de cinquante ans.

Les jeunes « bleus Marine »

En France, Marine Le Pen caracole en tête des sondages et fait office de grande favorite chez les jeunes. Peu importe la perte de son immunité parlementaire et les affaires d’emplois fictifs qui ébranlent sa campagne. La candidate du Front national continue sur sa lancée de 2012, où elle était parvenue à attirer 18% des voix de cette partie de l’électorat. Et si on ajoute les intentions de vote des 18-24 ans en faveur de l’extrême gauche de Jean-Luc Mélenchon (21%), et du nouveau parti « En Marche ! » (24%) à celles de Marine Le Pen (32%), vous comprenez qu’il ne reste que des graines pour les socialistes et les Républicains.

Fraucke Petry, une alternative à Angela Merkel ?

Difficile de prévoir ce que les élections fédérales de septembre nous réservent. Angela Merkel n’a jamais semblé aussi proche de la sortie. Mais dans les sondages, la chancelière est au coude à coude avec Martin Schulz, l’ex-président du Parlement européen, reconverti en candidat à la chancellerie avec les socialistes du SPD. Et si ces deux figures semblent bien parties pour se livrer un grand duel, une troisième personnalité pourrait jouer les trouble-fête. Fraucke Petry, la présidente de l’Alternative für Deutschland (AfD) rêve de mener son groupe au plus haut poste à responsabilité de l’Etat. D’autant plus que son parti eurosceptique a déjà démontré qu’il pouvait sortir son épingle du jeu. En 2016, le mouvement proche du PEGIDA a réussi un véritable coup de force lors des régionales en faisant son entrée dans 9 des 16 Länder. Dans une campagne centrée sur la question de l’immigration, un an tout juste après le célèbre « Wir schaffen das » lancé par Angela Merkel en faveur de l’accueil de réfugiés, ce suffrage s’est transformé en vote sanction à l’encontre du CDU. Dans le Saxe-Anhalt (Est), où l’AfD a fait son meilleur résultat (24%), 26% 18-24 ans ont voté en faveur du parti nationaliste, soit dix points de plus que la CDU. Les experts expliquent ces chiffres par la mauvaise situation économique de cette région et par l’adhésion des jeunes pour des partis moins classiques. Une mauvaise nouvelle que Mme Merkel peut tout de même relativiser puisqu’au fil des sondages, cette tendance tend à s’estomper. De manière générale, le « principe de base » fonctionne donc toujours en Allemagne : ce sont les plus âgés qui soutiennent le plus l’AfD.

Le suspense hollandais

Les élections législatives qui auront lieu le 15 mars sont plus indécises que jamais. Annoncé favori dans les sondages depuis plusieurs mois, le partij voor de vrijheid (PVV) de Geert Wilders vient d’être remonté et dépassé de quelques points par les libéraux du Volkspartij voor Vrijheid (VVD) dans une dernière enquête d’opinion. Pourtant, deux sondages, de fin 2016 et début 2017 voyaient le populiste l’emporter très largement chez les jeunes avec 27% d’intentions de vote. Un chiffre bien plus important que le 16% d’intentions que compte M. Wilders chez tous les électeurs.

À lire : Pays-Bas: le parti de Mark Rutte en tête dans un dernier sondage

Beppe Grillo fait rire les jeunes

Lancé en 2009 par l’humoriste italien Beppe Grillo pour en finir avec la classe politique traditionnelle, Le Mouvement 5 étoiles est aujourd’hui la deuxième force politique du pays et la première à Rome. Le parti est parvenu à s’imposer chez les jeunes en s’attribuant leurs codes et en faisant d’importantes campagnes sur Facebook et Twitter. En plus d’être anti-establishment, le M5S, qui promeut la démocratie directe, est anti-européen. Le parti affiche son hostilité à l’immigration, bien que la base du parti n’a pas suivi Grillo et a appelé à rejeter la réforme de la loi qui criminalisait l’immigration.

La « démocrature » polonaise

Les élections parlementaires et présidentielles de 2015 ont vu la droite ultranationaliste prendre le pouvoir. Peut-être même un peu trop puisque le parti Droit et justice (PiS) n’hésite pas à mettre à exécution des pratiques que l’on pensait devenues inconcevables en Europe. Censurer la presse, escamoter des faits historiques, affaiblir les contre-pouvoirs : pour Jaroslaw Kaczynski, le chef de file de ce parti, tout est permis quand il est question d’asseoir son autorité. Et le président élu, Andrzej Duda, n’est rien de plus que sa marionnette.

Pour les présidentielles de 2015, 60% des 18-24 ans ont choisi d’élire le protégé de M. Kaczynski, soit presque le double des 37% de votes reçus par le candidat PiS sur l’ensemble de la population. Peu de temps après, pour les élections parlementaires, le PiS s’est une nouvelle fois imposé chez les jeunes, bien que ce sont surtout les votants les plus âgés qui ont permis au parti de devenir la première force représentative en Pologne. Et si la popularité du parti chez les jeunes semble moins importante que pour les présidentielles, c’est que le parti proche de l’extrême droite Kukiz’15, fondé à l’occasion de ces élections est passé par là.

Podemos et Ciudadanos : les ovnis espagnols

L’année 2016 est à marquer dans l’histoire de la politique espagnole. Le pays profondément ancré dans la crise économique depuis 2008, et où le taux de chômage chez les jeunes ne semble pas de résorber a vu deux nouveaux partis politiques faire leur entrée fracassante au parlement. Le groupe de citoyens réformistes Ciudadanos et le mouvement populiste Podemos ont réussi à séduire les jeunes et mettre fin au bipartisme espagnol vieux de plusieurs décennies. Et si les deux partis se définissent comme « anti-establishment », aucun n’est anti-Europe. Comme le M5S en Italie, leur stratégie électorale basée sur les réseaux sociaux leur a permis de trouver écho chez les 18-24 ans.

Grégory Sacré

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