Kurz, Tusk, Merkel © AFP

Les divergences européennes sur la question de l’immigration se creusent

Le Vif

Les ministres italien, autrichien et allemand de l’Intérieur, des faucons sur la brûlante question migratoire, vont constituer « un axe des volontaires » pour s’attaquer à l’immigration clandestine, ajoutant à la cacophonie européenne sur le sujet.

Pour la chancelière allemande Angela Merkel, déjà chahutée dans son pays pour sa politique d’asile jugée trop généreuse, cette annonce constitue un coup dur en plein bras de fer avec son ministre de l’Intérieur, le Bavarois très conservateur Horst Seehofer.

Selon certains médias, leur conflit autour d’un durcissement de la politique migratoire allemande est tel qu’il menace le fragile équilibre de sa coalition réunissant son parti, la CDU, la droite bavaroise et les sociaux-démocrates.

Mme Merkel avait déjà opposé dimanche une fin de non-recevoir à l’une des mesures imaginées par M. Seehofer pour limiter les entrées de demandeurs d’asile. Le ministre veut refouler aux frontières allemandes les migrants déjà enregistrés dans un autre pays européen. Mais la chancelière exclut un tel cavalier seul de l’Allemagne, de crainte que chaque pays ne fasse de même, condamnant ainsi la liberté de circulation en Europe.

M. Seehofer se veut toutefois rassurant, expliquant qu’il aurait une discussion avec Mme Merkel cette semaine pour tenter de dégager une solution. Selon le journal Handelsblatt, elle devrait avoir lieu dès mercredi soir.

‘Axe des volontaires’

Le ministre allemand a trouvé un allié de poids en la personne du chancelier conservateur autrichien Sebastian Kurz qui, à ses côtés mercredi à Berlin, a annoncé « un axe des volontaires dans la lutte contre l’immigration illégale » avec Rome et Berlin.

Cet axe, un terme connoté qui rappelle l’alliance germano-italo-japonaise de la Deuxième guerre mondiale, réunira spécifiquement les ministres italien et autrichien de l’Intérieur Matteo Salvini et Herbert Kickl, tous deux d’extrême droite, et leur homologue conservateur allemand.

« Je suis heureux de la bonne coopération que nous voulons bâtir entre Rome, Vienne et Berlin », a déclaré M. Kurz. « Je pense qu’il est important de ne pas attendre la catastrophe, comme en 2015, mais d’agir contre à temps ».

Il faisait référence à l’arrivée de centaines de milliers de demandeurs d’asile en Europe et à la décision de la chancelière d’ouvrir l’Allemagne à ces migrants.

Dans la soirée, Angela Merkel a prévenu que la question migratoire constituait un « test décisif » pour l’avenir de l’Europe.

« C’est justement dans ces moments-là que l’Europe, confrontée à cette question qui la fragilise, doit avoir une réponse non pas unilatérale mais coordonnée, convenue par des accords établis avec d’autres (pays) pour que nous parvenions à une véritable action européenne commune », a-t-elle estimé, une position en totale contre-pied avec celle portée par son propre ministre de l’Intérieur.

Protection des frontières

Sebastian Kurz, le chef de gouvernement autrichien de 31 ans, dont le pays prend la présidence tournante de l’Union européenne le 1er juillet, a fait de la lutte contre l’immigration illégale son cheval de bataille, une thématique qui l’a conduit au pouvoir fin 2017, à la tête d’une coalition avec l’extrême droite.

Il a aussi rappelé que « notre principal objectif, c’est d’avancer sur la protection des frontières extérieures » de l’Union européenne.

M. Kurz planche également avec d’autres pays sur la création de centres d’accueil de migrants hors de l’UE et a revendiqué le soutien des Pays-Bas et du Danemark. De quoi miner le projet d’Angela Merkel de créer un système d’asile communautaire, un sujet qui doit être débattu au sommet de l’UE de la fin juin.

Ajoutant à la confusion, l’Italie et la Grèce, en première ligne de l’afflux, réclament une répartition des migrants dans l’UE. Mme Merkel y est favorable mais la farouche opposition des pays de l’Est de l’Europe semble a priori avoir eu raison du projet.

A ces divers désaccords européens s’ajoute la dispute qui a éclaté entre l’Italie, désormais gouvernée par les populistes et l’extrême droite, et la France.

Le ministre de l’Intérieur Matteo Salvini a ainsi exigé des « excuses officielles » de la France après des propos d’Emmanuel Macron dénonçant le « cynisme » et « l’irresponsabilité » des Italiens qui ont refusé de laisser accoster un navire avec à son bord des centaines de migrants secourus en mer.

Pourtant ce n’est pas Paris qui a décidé d’accueillir ces naufragés, mais l’Espagne où la gauche vient d’arriver au pouvoir.

« L’immigration met en péril la survie même de l’Union européenne », a à cet égard averti le président du Parlement européen, l’Italien Antonio Tajani, dans un message posté sur son compte twitter

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