Luckas Vander Taelen

« Les allochtones islamiques sont pour la gauche le nouveau prolétariat »

Luckas Vander Taelen Journaliste, historien et ancien politique (Groen)

Le 13 novembre à Paris est un coup de massue pour les certitudes idéologiques selon Luckas Vander Taelen. « Peut-être est-ce là une occasion unique pour la gauche d’entamer un salutaire retour aux sources. »

Pour beaucoup d’entre nous, l’impression désagréable de guerre imminente après les attentats de Paris et l' »occupation » de Bruxelles » est une première. Le succès de la réunification européenne a fait que les conflits ne sont plus systématiquement résolus de manière violente. C’est pour cela que des générations d’Européens de l’ouest ont grandi sans connaître de guerre. Et c’est peut-être, là, la première mission de l’enseignement après le choc du 13 novembre : montrer à quel point il est important de chérir les progrès qu’a connus notre société. En n’omettant pas de préciser que la paix n’est pas un cadeau des dieux pour l’éternité, mais bien une situation temporaire qui ne perdure que si l’on est conscient de ce qui nous menace et prêt, si besoin, à défendre avec violence notre démocratie.

Les événements de Paris nous ont brutalement réveillés de notre vision naïve du monde dictée par une pensée bien-pensante de gauche.

L’idée que tous les conflits peuvent se résoudre de façon harmonieuse est une illusion dangereuse. Le but est noble, mais celui qui souhaite se protéger de toute malice ferait mieux de ne pas projeter une image trop optimiste du monde qui fausse une analyse réaliste de la société.

Nous avons été gâtées par les années de paix, même la guerre froide est dans le meilleur des cas qu’un lointain souvenir. Nous avons oublié qu’il y aura toujours des conflits violents et que tout ne peut pas être résolu par une franche discussion. Notre aveuglement est tel que nous ne reconnaissons plus le Mal, même s’il rôde à Paris, Beyrouth ou Bamako en semant les cadavres de nos amis dans son sillage.

Nous ne savons plus comment réagir face à la violence. Nous ne voulons pas de guerre, préférant encore nous rendre. La débâcle est totale. Certains se demandant même si l’on ne devrait pas négocier avec l’Etat Islamique. A quel sujet ? À propos de notre totale soumission à une idéologie folle et sanguinaire ? Le sujet a déjà été abordé par le hélas visionnaire roman que Michel Houellebecq a sorti au moment des attaques sur la rédaction de Charlie Hebdo.

Le 13 novembre a été un rude coup porté à nos nombreuses certitudes idéologiques. Le silence écrasant de la gauche est aujourd’hui le signe de la déliquescence d’une pensée correcte autosuggérée, qui n’a pas voulu voir les signes annonçant l’avènement des fondamentalistes par peur d’être accusés d’islamophobie. On s’est aussi vautrée dans le sentiment coupable que les interventions occidentales, le colonialisme et l’impérialisme étaient à l’origine des misères du monde.

Les réponses confiantes et apaisantes aux questions complexes étaient aussi vides que prévisibles. Les allochtones islamiques sont pour la gauche le nouveau prolétariat. L’effet lancinant et néfaste du fanatisme religieux a été nié, ou dans le meilleur des cas, minimisés. Pour chaque combattant revenu de Syrie, on arguait l’excuse de la misère sociale, la même qui servit d’alibi pour la violence des bandes urbaines.

L’oppression des femmes islamique a été justifiée par le principe de relativisme culturel qui réservait les valeurs des Lumières aux populations autochtones et le refusait aux allochtones.

Les derniers événements dramatiques vont peut-être offrir une occasion unique à la gauche d’entamer un salutaire retour aux sources et se défaire pour de bon des paradigmes marxistes qui ont montré leurs lacunes.

Cette inébranlable conviction envers le politiquement correct a poussé la gauche à s’éloigner des citoyens lambda qui ne les écoute plus depuis longtemps. Cela va demander une bonne dose de courage politique, mais rester engoncer dans de vieux et usés mantras gauchistes va réduire la déjà flageolante crédibilité de la gauche à peau de chagrin…

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