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Le revenu universel testé de manière scientifique aux États-Unis

Marie Gathon
Marie Gathon Journaliste Levif.be

De plus en plus de pays et d’entreprises se lancent dans la recherche sur la faisabilité du revenu universel. Mais aucune ne s’est encore penchée sur la question de manière rigoureusement scientifique.

L’idée d’un revenu de base octroyé sans contrepartie par l’État pour tenter de pallier au manque travail et à la pauvreté est une vieille idée qui a déjà été expérimentée, notamment dans les années 1970, aux États-Unis et au Canada. Il revient régulièrement sur le devant de la scène politique un peu partout dans le monde, mais même ses partisans ont du mal à s’accorder sur ses modalités.

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Pour tenter de répondre à ces questions, de plus en plus d’expérimentations sont lancées à travers le monde.

La Finlande pionnière

Depuis le 1er janvier 2017, la Finlande est le premier pays européen à tester le revenu universel au niveau national. Le gouvernement a lancé un programme grâce auquel 2000 chômeurs âgés de 25 à 58 ans perçoivent 560 euros par mois, sans contrepartie.

Le système finlandais est une version quelque peu modifiée du concept de revenu universel. Certaines conditions sont en effet requises pour pouvoir en profiter. La Finlande a décrété qu’elle ne l’offrait qu’aux personnes en recherche d’emploi et bénéficiant déjà d’une allocation chômage. Cependant, s’ils viennent à trouver du travail pendant la période test de deux ans, ils continueront à toucher le revenu supplémentaire de 560 euros chaque mois. La responsable du programme ne fournira pas de données officielles avant fin 2018.

L’Allemagne expérimente le revenu universel grâce au crowdunding

Fin 2014, c’est un citoyen allemand qui a décidé de lancer un appel au don sur une plateforme de crowdfunding afin de financer son expérimentation. Le succès est tel qu’il engage rapidement du personnel pour gérer son association à but non lucratif. À chaque fois que les fonds nécessaires sont récoltés, il tire au sort une personne volontaire supplémentaire pour recevoir un revenu de 1000 euros par mois pendant un an. Aujourd’hui, 74 personnes ont pu en bénéficier, tous âges confondus. Si rien ne les y oblige, de nombreux participants ont néanmoins désiré partager leur expérience : beaucoup témoignent avoir pu mener la vie qu’ils souhaitaient depuis longtemps « sans se tracasser du lendemain ».

Cette expérimentation n’est pas une expérience scientifique au sens strict du terme, mais elle apporte néanmoins quelques éléments de réponse sur les conséquences d’un revenu universel octroyé sans condition.

Au Canada, un revenu de base pour les personnes vivant sous le seuil de pauvreté

Au printemps de cette année, la province canadienne de l’Ontario a annoncé le lancement d’un projet pilote de revenu universel afin d’évaluer les conséquences pour les allocataires et les finances publiques. Le projet pilote va assurer « un revenu de base » sur trois ans à 4.000 personnes sous le seuil de pauvreté. Ce revenu universel pourra aller jusqu’à 16.989 dollars canadiens (11.600 euros) par an pour une personne seule et 24.027 dollars (16.400 euros) pour un couple. Le mécanisme est adaptable en fonction des revenus des salariés à temps partiel. Leur revenu universel sera réduit de 50 cents pour chaque dollar gagné. Les 4.000 participants, âgés de 18 à 65 ans, ont été choisis au hasard dans trois villes. Un premier bilan de ce projet pilote sera tiré dans un an.

Aux États, unis, une première expérience scientifiquement quantifiable

Si elles ont le mérite d’exister, ces expérimentations sur le revenu universel ont le défaut de ne pas être scientifiquement quantifiables. Entendez par là que d’un point de vue scientifique, s’il n’existe pas de groupe témoin pour étudier les effets du revenu universel sur un groupe « cobaye », il est impossible d’en mesurer les effets de manière scientifique. C’est pour pallier à ce manque que la start-up Y Combiantor va lancer une nouvelle expérience.

Elle a annoncé la semaine dernière sur son site internet qu’elle allait recruter 3000 participants par tirage au sort dans deux États américains. Parmi ceux-ci, 1000 se verront offrir un revenu de 1000 dollars par mois pendant cinq ans, les autres 2000 recevront 50 dollars et serviront de groupe témoins. C’est ce que l’on appelle dans le langage scientifique un essai randomisé. « C’est considéré comme une des meilleures façons d’évaluer l’impact d’une proposition de politique sociale », écrit la directrice de recherche Elizabeth Rhodes dans sa présentation du projet. « En comparant un groupe de gens qui reçoivent un revenu de base avec un autre groupe identique de gens qui ne le reçoivent pas, nous pouvons isoler et quantifier les effets d’un revenu de base. »

L’université de Stanford est associée au projet. Les chercheurs travaillent avec des agences gouvernementales pour avoir accès à des données administratives sur des volontaires, et des questionnaires détaillés vont être soumis aux participants, au début et à la fin du projet. Ils analyseront notamment les finances des participants, leurs emplois du temps, leur santé mentale et physique.

Ensuite, une expérience qualitative sera menée sur un nombre plus restreint de participants pour essayer de comprendre comment le revenu universel influence individuellement la vie des gens et éventuellement aider à créer des alternatives qui pourraient être plus efficaces. Rendez-vous dans cinq pour les résultats.

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