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Le président rwandais Kagame en visite à Paris

Le président rwandais effectue sa première visite officielle en France depuis le génocide de 1994. Destinée à rebâtir une relation encore marquée par le contentieux autour du rôle de la France dans les massacres, cette rencontre n’a pas manqué de susciter des remous.

En visite officielle en France, le président rwandais Paul Kagame a été pris à partie sur la situation des droits de l’Homme dans son pays. Lors d’une conférence sur le rôle de l’Afrique dans la gouvernance mondiale à l’Institut français des relations internationales (Ifri), Kagame a été interpellé par des membres des ONG Human Rights Watch (HRW) et Reporters sans frontières (RSF). Ces derniers ont cité des cas d’opposants incarcérés ou de journaux fermés temporairement mais aussi de journalistes tués ou ayant dû fuir le pays.

Ce à quoi le président rwandais a rétorqué : « Il n’y a que Human Rights Watch qui ne voit jamais de progrès au Rwanda. Nous allons continuer à faire de notre mieux pour notre peuple ».

Ainsi, le directeur de l’Ifri, Thierry de Montbrial, a dû intervenir pour ramener les débats sur le thème de la conférence.

Kagame est critiqué par des ONG pour des « violations répétées » des droits de l’Homme. Vendredi, la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) a en effet déclaré : « Au Rwanda, la situation des droits de l’Homme demeure extrêmement préoccupante et les violations ont culminé lors de la dernière campagne électorale ».

Destinée à parachever la réconciliation avec la France depuis le génocide de 1994, la visite officielle du président rwandais a suscité des remous dans la classe politique et chez les militaires français. Ceux-ci sont toujours accusés par Kigali d’être impliqués dans des massacres de Tutsis il y a 17 ans.

Paul Kagame a déclaré dimanche à Paris qu’il travaillait avec son homologue français Nicolas Sarkozy pour « voir comment échapper à l’Histoire, pour avancer », au premier jour d’une visite officielle destinée à parachever la réconciliation avec la France.

« Je suis heureux d’être venu ici, en France, à la suite de la visite du président français au Rwanda » en février 2010, a déclaré Paul Kagame, lors d’un discours à la diaspora rwandaise réunie près de Paris sous la surveillance d’un imposant dispositif de sécurité. « Nous travaillons ensemble pour voir comment échapper à l’Histoire, pour avancer », a-t-il affirmé en kinyarwanda, s’attirant les applaudissements du public.

« Il (Nicolas Sarkozy) l’a dit, il y a des gens qui étaient contre cette évolution. Moi, je ne connais pas cette politique, cette politique du mal. Nous avons dépassé ce genre de politique, qui est méprisable. Les gens qui la pratiquent sont méprisables. Et ce qui est méprisable nous fait perdre du temps », a-t-il poursuivi. Le président rwandais effectue sa première visite officielle en France depuis le génocide de 1994, destinée à rebâtir une relation encore marquée par le contentieux autour du rôle de la France avant et pendant les massacres.

Juppé absent


Cette visite officielle a suscité des remous dans la classe politique et chez les militaires français, toujours accusés par Kigali d’être impliqués dans des massacres de Tutsi il y a 17 ans. Plusieurs anciens responsables militaires ont jugé « insultant » que Nicolas Sarkozy, qui avait reconnu en 2010 à Kigali une « forme d’aveuglement » de la France pour n’avoir pas « vu la dimension génocidaire » du régime rwandais hutu d’alors, accueille Paul Kagame tant que Kigali maintient ses « graves accusations » à l’encontre de l’armée.

Autre signe d’un malaise persistant, le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé (poste qu’il occupait en 1994) sera absent pendant toute la visite officielle.

Rompre l’isolement dans la région des Grands Lacs

« On sait bien que cette visite ne fait pas plaisir à un certain nombre de personnes, mais le président a décidé de tourner la page des relations douloureuses de la France avec le Rwanda », avait-on souligné samedi dans l’entourage de Nicolas Sarkozy. Pour l’universitaire André Guichaoua, « cette visite intervient à un moment où les deux parties sont en position de faiblesse »: Paris, qui « cherche à rompre son isolement dans la région des Grands Lacs », où le petit Rwanda reste un acteur clé, et Kigali, qui se cherche de nouveaux soutiens internationaux alors que ses traditionnels alliés américains se font plus distants.

Le régime de Kagame est aussi très critiqué pour des « violations répétées » des droits de l’Homme par des ONG, qui ont demandé à la présidence française de ne ne pas sacrifier cette question sur l’autel de la réconciliation.

L’opposition rwandaise a aussi prévu de se faire entendre, en organisant des rassemblements à Paris, notamment mardi matin au moment d’une rencontre entre le dirigeant rwandais et le patronat français.

Le Vif.be, avec L’Express.fret Belga

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