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Le Premier ministre islandais dans la tourmente des Panama Papers

Le Vif

Le jeune Premier ministre islandais Sigmundur David Gunnlaugsson se retrouve dans la tourmente des « Panama papers », enquête journalistique qui révèle ses avoirs dans un paradis fiscal, et qui pourrait provoquer sa chute.

Selon des documents publiés par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), M. Gunnlaugsson, 41 ans, a possédé avec sa femme une société dans les îles Vierges britanniques, jusqu’à lui céder ses parts fin 2009 pour un dollar symbolique.

Quand il a été élu député pour la première fois en avril 2009, il a omis cette participation dans sa déclaration de patrimoine.

L’affaire est extrêmement sensible dans un pays marqué par les excès des années 2000, où un secteur financier euphorique et ses dirigeants et cadres usaient et abusaient des sociétés écrans.

La défense du chef de gouvernement est simple: lui n’a jamais caché d’argent à l’étranger, et sa femme est en règle avec le fisc islandais. « Elle n’a jamais utilisé de paradis fiscal, et on ne peut pas dire non plus que sa société est une société offshore dans le sens où elle paierait des impôts à l’étranger plutôt qu’en Islande », a-t-il écrit sur son site internet.

Il s’est montré très mal à l’aise lors d’un entretien avec la télévision suédoise SVT, préférant quitter la pièce quand les questions sont devenues pressantes. « On rend suspect quelque chose qui ne l’est pas », s’est-il agacé.

Fils de député et à l’origine journaliste, M. Gunnlaugsson était censé incarner une rupture avec la classe politique, y compris celle de son parti, qui avait fermé les yeux sur la frénésie d’expansion des banques islandaises. Celle-ci s’est terminée par une crise financière historique, une récession, et un sauvetage du Fonds monétaire international.

L’épouse du Premier ministre, Anna Sigurlaug Palsdottir, 41 ans également, est la fille d’un homme d’affaires qui a fait fortune en étant concessionnaire des voitures Toyota dans le pays.

Le 15 mars, c’est elle-même qui avait rendu publique sur Facebook l’existence de la société que le couple a créée en 2007, appelée Wintris, pour gérer la fortune dont elle a hérité. Elle y expliquait qu’avec l’aide du cabinet de conseil KPMG, elle avait fait en sorte de payer tous ses impôts en Islande.

Manifestations

Depuis, l’opposition réfléchit au dépôt d’une motion de défiance, qui selon toute vraisemblance devrait être soumise au vote dans la semaine.

L’opposition de gauche devrait certainement la voter, tandis que le parti du chef de gouvernement, le Parti du progrès, devrait s’y opposer. Dans ce cas, le sort du gouvernement serait donc décidé par la deuxième formation de la coalition gouvernementale, le Parti de l’indépendance (droite).

Que M. Gunnlaugsson se soit rendu coupable d’évasion fiscale reste à prouver. Mais politiquement, sa position est devenue intenable.

« Le Premier ministre doit immédiatement démissionner » car il « a fait preuve de sa méfiance envers la monnaie et l’économie islandaises en plaçant son argent dans un paradis fiscal », a lancé dimanche soir l’ancienne chef de gouvernement, la sociale-démocrate Johanna Sigurdardottir.

Plus gênant peut-être: Wintris a détenu des créances auprès des banques islandaises en faillite. Or M. Gunnlaugsson a percé en politique après avoir mené un mouvement de fronde, couronné de succès, contre les conditions drastiques auxquelles l’Islande était censée rembourser d’autres pays lésés par la faillite de ces banques.

« C’est triste que ce qui veulent et affirment montrer l’exemple disent que le fondement c’est de croire en l’Islande, et ensuite décider qu’il vaut mieux placer leur argent ailleurs », a commenté l’historien et intellectuel Gudni Johannesson auprès de la télévision publique RUV.

La commission constitutionnelle du Parlement devrait se réunir lundi dans la journée, d’après la RUV.

Des manifestations sont prévues dans la semaine, la première lundi en fin de journée.

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