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Le monde sans nucléaire de Barack Obama

Le président américain s’apprête à détailler la nouvelle stratégie nucléaire des Etats-Unis. De bien belles paroles, mais aussi des exceptions, et des contreparties.

Le président américain Barack Obama va restreindre les conditions dans lesquelles les Etats-Unis seraient amenés à utiliser l’arme nucléaire, a indiqué lundi un haut responsable américain sous le couvert de l’anonymat.

Une annonce qui intervient alors que l’administration s’apprête à détailler la nouvelle stratégie nucléaire des Etats-Unis. Une stratégie qui a pour but « d’empêcher le terrorisme nucléaire, la prolifération, et de réduire le rôle des armes nucléaires dans notre stratégie de sécurité nationale », a indiqué ce haut responsable.

Le président va notamment s’engager à ce que les Etats-Unis n’utilisent jamais l’arme nucléaire contre un adversaire qui ne la détient pas et qui respecte les règles du Traité de non-prolifération nucléaire, a affirmé le New York Times sur son site internet, après avoir interviewé le président sur cette stratégie. Barack Obama précise toutefois que « les Etats hors-norme comme l’Iran et la Corée du Nord » seront des exceptions à cette nouvelle règle, selon l’une des rares citations directes fournies dans l’immédiat par le quotidien.

Un exemple, vraiment?

A une semaine du sommet international prévu à Washington sur le désarmement atomique, les Etats-Unis cherchent apparemment à donner l’exemple aux autres Etats détenteurs de l’arme nucléaire ou supposés l’être.

Début mars, l’administration américaine avait annoncé que la nouvelle stratégie nucléaire américaine comporterait une « réduction spectaculaire » du nombre d’armes atomiques des Etats-Unis. L’annonce de mardi précédera de deux jours la signature à Prague d’un nouvel accord de désarmement START par M. Obama et son homologue russe, Dmitri Medvedev. Américains et Russes se sont mis d’accord le mois dernier pour ramener leur arsenal nucléaire à seulement 1550 têtes chacun, contre quelque 10.000 de part et d’autre.

Longues tergiversations

Elle survient également une semaine avant le sommet de Washington auquel M. Obama a convié une quarantaine de dirigeants du monde, dont le Premier ministre belge Yves Leterme, à discuter de sécurité et de non-prolifération, les 12 et 13 avril à Washington.

Barack Obama avait prôné il y a exactement un an, le 5 avril 2009, l’avènement d’un monde sans armes atomiques, lors d’un discours prononcé à Prague. Il a cependant admis qu’il ne verrait probablement pas cet objectif atteint de son vivant. Depuis cette date, partisans et adversaires de la dénucléarisation se sont affrontés au sein de l’administration et l’annonce de la nouvelle stratégie a été retardée de plusieurs mois.

Début mars, un haut responsable américain parlant sous le couvert de l’anonymat avait indiqué que la nouvelle stratégie viserait « une réduction spectaculaire des stocks (d’armes nucléaires), tout en conservant une dissuasion solide et fiable ». Elle donnera aussi « un rôle accru aux armes conventionnelles dans la dissuasion » et renoncera aux armes atomiques « anti-bunkers » voulues par la précédente administration de George W. Bush, avait précisé ce responsable.

Selon le New York Times, qui avait révélé les grandes lignes de ce
document, il s’agirait de réduire le nombre de têtes nucléaires des Etats-Unis de « plusieurs milliers ». Mais l’administration a d’ores et déjà écarté la possibilité d’annoncer que les Etats-Unis ne recourraient jamais en premier à l’arme nucléaire en cas de conflit, selon le New York Times. Les partisans de la dénucléarisation appellent M. Obama à proclamer que « l’unique objet » de l’arme nucléaire est de dissuader une puissance nucléaire de menacer les Etats-Unis. Selon eux, la supériorité de l’armée américaine en matière d’armements classiques rend la bombe atomique inutile dans tout autre contexte.

Implications à Kleine Brogel

D’une telle doctrine découlerait un retrait des quelque 200 ogives nucléaires tactiques que Washington possède en Europe, retrait que cinq pays membres de l’OTAN (Allemagne, Belgique, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas) ont appelé de leur voeux en février. Les armes stockées à Kleine Brogel sont bien entendu visées. La question sera à l’ordre du jour d’une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’OTAN, les 22 et 23 avril à Tallinn – mais après la publication de la nouvelle stratégie et après le sommet de Washington.

Une telle doctrine s’oppose à celle de « la dissuasion étendue » qui appelle les Etats-Unis à maintenir ou déployer leur « parapluie nucléaire » en Europe, en Asie et même au Moyen-Orient, incitant les pays protégés à ne pas chercher à se doter de leurs propres armes

LeVif.be, avec Belga

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