David Cameron © AFP

Le dernier appel de Cameron avant le référendum écossais

Le Vif

Le Premier ministre britannique David Cameron a prévenu lundi que la victoire du oui au référendum sur l’indépendance de l’Ecosse organisé jeudi constituerait un « douloureux divorce » aux lourdes conséquence

« Je vous en prie, ne brisez pas cette famille », a également lancé aux électeurs M. Cameron, qui se livrait dans le port pétrolier écossais d’Aberdeen à un ultime plaidoyer pour éviter l’éclatement du Royaume-Uni, les sondages prédisant un résultat serré. « Il n’y aura pas de retour en arrière possible, de seconde chance », a dit le dirigeant conservateur, dans un discours particulièrement volontaire et passionné.

« Si l’Écosse vote oui (à l’indépendance), le Royaume-Uni éclatera, et nos chemins se sépareront, pour toujours », a-t-il ajouté. « Maintenant, je sais que de nombreuses personnes en Ecosse ont prévu de voter oui », a-t-il dit. « Je sais aussi que le camp du oui a dépeint une Ecosse qui serait meilleure à tous les niveaux (si elle était indépendante). Mais quand une chose a l’air trop belle pour être vraie, c’est souvent parce que c’est le cas », a mis en garde M. Cameron.

« Si le non l’emporte jeudi, ceci déclenchera un programme de transfert de pouvoirs vaste et sans précédent » en matière de politique fiscale et de santé publique, a une nouvelle fois promis M. Cameron. « Nous sommes mieux ensemble », a-t-il conclu, reprenant le slogan de campagne des partisans du non : « Votez pour que nous restions ensemble (…) votez pour sauver notre Royaume-Uni ».

La semaine dernière, lors d’une visite à Edimbourg, il avait confié, des sanglots dans la voix, qu’il aurait le « coeur brisé » si « la famille des nations » britanniques venait à se déliter.

En attendant son intervention, quelques partisans du oui distribuaient des tracts sous une pluie fine sur une place centrale de la capitale pétrolière. « Ce n’est pas qu’ils sont plus confiants, ils sont juste plus arrogants », affirmait Ron Fowlie, 73 ans, parlant des partisans du non, absents du terrain. « Ils n’arrivent pas à imaginer que le oui puisse l’emporter ».

A Londres, en revanche, les partisans du maintien de l’Ecosse au sein du Royaume-Uni ont appelé à un rassemblement à Trafalgar Square. Baptisé « Restons ensemble », il vise « à montrer à l’Ecosse que nous nous préoccupons » d’elle et de son maintien dans l’union, disent les organisateurs.

Le camp du non peut aussi compter sur le soutien du footballeur David Beckham qui a défendu le Royaume-Uni, une union de régions qui « est enviée par le monde entier ». « Ce qui nous unit est beaucoup plus important que ce qui nous divise. Restons ensemble », a écrit l’ancien capitaine de l’équipe nationale dans une lettre ouverte rendue publique par la campagne « Better Together ».

Avant lui, la reine Elizabeth II, officiellement neutre dans le débat, avait laissé transparaître son inquiétude à l’issue d’un service religieux près de son château écossais de Balmoral. A la faveur d’un bref et peu ordinaire bain de foule, elle a glissé que les électeurs écossais devaient « soigneusement réfléchir à l’avenir ».

A l’approche du scrutin, les deux camps sont dans un mouchoir de poche, même si le non, en tête dans trois des quatre sondages réalisés ce week-end, semble mener d’une courte tête. « C’est fifty-fifty », soulignait Ron Fowlie, déplorant que « la moitié de la population (écossaise) sera déçue » par le résultat final.

Le Premier ministre écossais et leader des indépendantistes, Alex Salmond, s’est lui attaché lundi à convaincre des responsables économiques à Edimbourg que l’indépendance aura du bon, face à l’alarmisme affiché par les milieux financiers. Il a accusé le gouvernement d’avoir orchestré ces réactions négatives et a répété que son objectif était à la fois de créer une Ecosse « plus prospère » et « plus juste ». M. Salmond a reçu le soutien du prix Nobel d’économie, Joseph Stiglitz, qui a jugé qu’il y avait « peu de fondement à l’alarmisme » exprimé.

Pour Rob Wood, un économiste de la banque allemande Berenberg, une Ecosse indépendante accélèrerait une sortie de ce qui resterait du Royaume-Uni de l’Union européenne. « Néanmoins, un vote en faveur du non laisserait bon nombre de questions inquiétantes en suspens. Par exemple, une victoire serrée du non signifierait le maintien d’une incertitude sur l’éventualité d’un second référendum dans les prochaines années », a-t-il fait valoir lundi. Alex Salmond a semblé écarter cette éventualité.

Enfin, sur une note plus insolite, une pâtisserie d’Edimbourg vendant des cupcakes ornés du drapeau britannique (pour le non), écossais (pour le oui) ou d’un point d’interrogation (pour les indécis), a révélé que les gourmets penchaient plus volontiers pour le statu quo avec un score respectifs de 47,7% contre 43,5%.

Une Ecosse indépendante devrait adhérer à nouveau à l’Otan

Par ailleurs, si l’Écosse devenait indépendante, elle devrait passer par un processus d’adhésion à l’Otan avant de pouvoir en devenir membre, a déclaré lundi le secrétaire général de l’Otan Anders Fogh Rasmussen.

Les dirigeants de l’Union européenne avaient déjà prévenu qu’en cas d’indépendance, l’Écosse devrait à nouveau se porter candidate et que son retour dans le giron de l’UE serait soumis à l’approbation unanime des Etats qui la composent.

M. Rasmussen a assuré qu’il « n’allait pas interférer dans la campagne pour le référendum en Écosse ». « Si un nouvel Etat indépendant veut devenir membre de l’Otan, il doit se porter candidat », a-t-il aussitôt ajouté. « Une telle candidature sera traitée exactement comme toutes les autres candidatures et, in fine, il faudra le consensus, l’unanimité au sein de l’Alliance pour l’accepter ». Mais « nous n’en avons pas discuté », a-t-il dit.

M. Rasmussen n’a pas précisé combien de temps cela pourrait prendre, soulignant que cela dépendait du pays et de sa « capacité à remplir les critères nécessaires ». L’une des conditions posées concerne l’interopérabilité, c’est-à-dire la capacité de l’armée d’un pays à agir de concert avec les autres forces armées de l’Alliance, grâce au partage de procédures d’action et de communication standardisées.

M. Rasmussen a aussi assuré que le rôle du Royaume-Uni au sein de l’Otan ne serait pas affecté par une éventuelle indépendance de l’Écosse. « Je ne vois pas en quoi le résultat du référendum écossais aurait un impact sur la contribution de la Grande-Bretagne à l’Otan », a-t-il déclaré, alors que les indépendantistes écossais ont prévu de récupérer bases, frégates et matériel, comptant former une armée de 15.000 hommes, mais sans les quatre sous-marins nucléaires britanniques actuellement basés à Faslane (ouest de l’Écosse).

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