Pedro Sanchez © Reuters

Le « beau » Sanchez, chef très contesté des socialistes espagnols

Le Vif

A la tête des socialistes espagnols depuis deux ans, Pedro Sanchez – surnommé « le beau mec » – est désormais en guerre avec les barons du PSOE, son parti en pleine déconfiture depuis que Podemos a surgi sur sa gauche en 2014.

Cet ancien professeur d’économie jouera sans doute son avenir samedi, lors d’un comité fédéral (le parlement du parti) où il soumettra au vote ses projets, alors que le parti semble au bord de l’implosion.

Quand il a pris en juillet 2014 les rênes du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), Pedro Sanchez était inconnu du grand public. Il avait alors remporté, avec 48,5% des voix, les premières primaires jamais organisées au sein de sa formation centenaire.

Impeccablement cintré dans ses costumes sombres, avantagé par son mètre 90, le fringant quadragénaire – marié et père de deux filles – se présentait alors en rénovateur du PSOE.

A présent que l’appareil du parti veut le contraindre à la démission, il contre-attaque en revendiquant à nouveau le soutien de la base: « Que les militants parlent », a-t-il souhaité cette semaine, en appelant à de nouvelles primaires.

De défaite en défaite

Né le 29 février 1972 à Madrid, Pedro Sanchez a grandi dans une famille aisée, auprès d’un père entrepreneur et d’une mère fonctionnaire et avocate, avant d’étudier l’économie dans la capitale espagnole puis de décrocher un master d’économie politique de l’Université libre de Bruxelles.

La politique l’a « toujours passionné », selon des camarades d’études.

Conseiller municipal d’opposition à Madrid de 2004 à 2009, il siège pour la première fois au Congrès des députés de 2009 à 2011. Jusqu’à ce que le chef du gouvernement socialiste José Luis Zapatero – dépassé par la grave crise économique – se retire et que le PSOE perde les législatives au profit des conservateurs du Parti populaire (PP) de Mariano Rajoy.

De retour au Congrès à partir de 2013, M. Sanchez va y devenir l’année suivante un « chef de l’opposition » résolument offensif envers la droite.

Depuis décembre, il a maintenu cette position en disant « non, non, non » à la formation d’un nouveau gouvernement de M. Rajoy, dont le parti a remporté – sans majorité – les législatives de décembre puis celles de juin.

Invariablement, il lui reproche ses « politiques néolibérales » qui « aggravent les inégalités » et la multiplication des affaires de corruption impliquant les conservateurs.

Mais, après neuf mois de paralysie politique du pays, les barons socialistes disent stop.

Accusé de ‘détruire le parti’

Dans un parti fracturé et désorienté de longue date, ils lui font porter la responsabilité de la déconfiture du PSOE, qui va de défaite en défaite depuis six élections.

Jeudi un éditorial du quotidien El Pais – longtemps proche du Parti socialiste – a semblé donner le coup de grâce à M. Sanchez en le traitant de « dirigeant insensé et sans scrupules qui n’hésite pas à détruire le parti ». La Société des journalistes du quotidien s’en est même plaint.

Mais « si réellement Pedro Sánchez est un dirigeant aussi néfaste, désastreux et lamentable que le dépeignent aujourd’hui ceux qui l’ont soutenu, pourquoi ne veulent-ils pas l’affronter lors de primaires », a interrogé Ignacio Escolar, directeur du journal de gauche en ligne eldiario.es, dans un article contestant son « assassinat » politique.

Le deuxième parti d’Espagne est talonné par le parti antiaustérité Podemos né en janvier 2014.

Publiquement, M. Sanchez ne cesse de plaider pour la formation d’un gouvernement « alternatif », en se tournant vers les nouveaux partis, Ciudadanos (centre-droit) et Podemos (gauche). Cependant, il semble redouter, en réalité, un gouvernement d’alliance avec Podemos et son chef Pablo Iglesias avec lequel « le courant n’est jamais passé », selon un proche de M. Sanchez.

En mars, il s’était risqué à solliciter la confiance des députés pour tenter de former un gouvernement avec le seul soutien des centristes. Podemos avait alors uni ses voix à celles du PP pour voter « contre ».

Critiqué pour son manque de dialogue en interne, M. Sanchez s’est refusé à suivre les conseils de l’ancien chef de gouvernement socialiste (1982-1996), Felipe Gonzalez, qui l’appelait à laisser la droite gouverner.

Ses ennemis dans le parti entendent bien le pousser vers la sortie.

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