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Le 8 avril 1904, les débuts de la « cordialité » franco-britannique

L’année 2004 est placée sous le signe des commémorations. Des deux côtés de la Manche, on se souvient. Et on exalte. Un siècle plus tôt, France et Grande-Bretagne signaient l’Entente cordiale. Cent ans de franche camaraderie, ça se fête ! Sauf que l’histoire est moins lisse. Plus sombre aussi.

Les accords que signent les deux Etats le 8 avril 1904 ne sont guère « cordiaux ». Et au cours du xxe siècle, les relations entre les deux pays seront franchement tièdes.

On s’en souvient mal mais durant longtemps, la France et l’Angleterre sont probablement les meilleures ennemies du continent. Alors que s’achève le Moyen Age, durant cent ans, elles se battent pour quelques trônes et l’une ou l’autre terre. Plus tard, c’est surtout au-delà des mers que les emportent leurs rivalités. En 1898, les deux nations impérialistes sont même à deux doigts de se déclarer la guerre. En cause ? Le statut de Fachoda, une ville soudanaise sur laquelle elles revendiquent toutes deux une influence. La tension est vive : pour les Français, l’Angleterre n’a jamais aussi bien porté son surnom de  » perfide Albion « .

C’est dans ce contexte que s’inscrit l’Entente cordiale. Par sentiment de sympathie ? Nullement ! C’est plutôt par calcul que les deux pays se mettent autour de la table. Assistant à la montée en puissance de l’Allemagne, ils redoutent tous deux d’avoir à affronter… trop d’ennemis à la fois. Le rapprochement est aussi guidé par la volonté d’Edouard VII. Le roi de Grande-Bretagne et d’Irlande est un ardent francophile. En 1903, il effectue un séjour officiel à Paris. Ou plutôt une campagne de séduction, durant laquelle il tente de convaincre les Français de la bonne foi britannique. L’objectif est largement atteint – même si les nombreux  » vive Jeanne d’Arc « , clamés sur son passage, rappellent les luttes d’autrefois.

Reste que la  » cordiale entente  » est loin d’être une alliance. Ce n’est qu’un accord visant à asseoir la sécurité de chacun par le règlement de différends coloniaux. Paris reçoit ainsi un protectorat sur le Maroc, tandis que Londres obtient les coudées franches en Egypte. Quelques années plus tard, la Grande Guerre transforme l’entente en alliance. De là à parler d’amitié… Certes, les deux nations se battent côte à côte. Mais pas vraiment ensemble. En 1918, le maréchal britannique Haig critique franchement les Français :  » Dire qu’il faut combattre à côté de tels alliés.  »

En 1939, face au bruit des bottes allemandes, les Etats se rapprochent à nouveau. Mais le coeur n’y est toujours pas. Dans les décennies qui suivent, à deux reprises, c’est la France du général de Gaulle qui empêche les Britanniques de rejoindre les Communautés européennes. Si Londres finit par rejoindre l’Europe, elle préfère faire les yeux doux à Washington. En 2003, Paris refuse de mener la guerre en Irak. Du pain bénit pour les tabloïds britanniques pour qui les Français ne sont que des lâches. Qui ont peur de se battre. Un an plus tard, on commémore un siècle d’entente cordiale. Joyeux anniversaire !

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