Zola dénonce avec force la condamnation d'un innocent. © BELGAIMAGE

Le 13 janvier 1898, Zola se lança dans l’affaire Dreyfus avec « J’accuse…! »

« Me permettez-vous […] d’avoir le souci de votre juste gloire et de vous dire que votre étoile, si heureuse jusqu’ici, est menacée de la plus honteuse, de la plus ineffaçable des taches ?  » C’est ainsi que s’ouvre l’une des lettres les plus célèbres de l’histoire.

Son expéditeur est un écrivain de grand talent, Emile Zola. Son destinataire est le président de la République française, Félix Faure. Son propos est incendiaire : en commettant ce texte, Zola prend le risque des assises et de la prison. L’auteur en est conscient ; comme il l’écrit, c’est volontairement qu’il s’expose. Sa motivation est bien plus forte : l’homme entend  » hâter l’explosion de la vérité et de la justice « .

Au coeur de la lettre, il y a  » l’affaire « . En 1894, Alfred Dreyfus, capitaine de l’armée française, est accusé d’avoir transmis à l’ennemi allemand des documents secrets. Le gradé perd son procès : condamné au bagne, il est transféré sur l’île du Diable, en Guyane. Un enfer, terriblement humide et atrocement brûlant. Dreyfus y débarque en avril 1895. Toute la France est alors contre lui.

Toute ? Non. La famille du soldat, convaincue de son innocence, organise la résistance. Avec l’aide d’un journaliste, elle ouvre une contre-enquête, dénonce les incohérences d’un dossier à charge, et tente de rallier du monde à sa cause. Si le ministre de la Guerre se montre inflexible, d’autres se laissent convaincre. C’est le cas de Zola. L’auteur de Germinal est alors au sommet de sa gloire et au soir de sa vie. Au départ, il ne connaît rien à l’affaire. Et ne voit pas très bien ce qu’il a à y faire. Mais les soupçons d’injustice sont criants et le révoltent. Zola en est bientôt persuadé : si Dreyfus a été emprisonné, ce n’est pas parce qu’il est coupable. Seulement parce qu’il est juif.

Le déclic ? Il a lieu le 10 janvier 1898. Ce jour-là, Walsin Esterhazy, l’un des principaux traîtres de l’affaire Dreyfus, est acquitté par un tribunal militaire. Zola, qui a déjà consacré trois articles au dossier, décide d’aller un pas plus loin. Le 13 janvier, en publiant son  » J’accuse  » dans L’Aurore – après s’être vu refuser les colonnes du Figaro -, il envoie du lourd ! Nommément, il accuse pas moins de dix acteurs, parmi lesquels se trouvent le ministre de la Guerre et le chef de l’état-major. Les ventes du journal cartonnent. Le jour même, le Tout-Paris ne parle que de ça.

L’affaire Dreyfus est devenue  » l’Affaire « . Objet de toutes les discussions, dans les chaumières comme au Parlement. Pour les dreyfusards, l’intervention de Zola est une aubaine, en même temps qu’un signe d’encouragement. Chez les anti-dreyfusards, encore majoritaires, la sortie de l’écrivain provoque de la fureur. Mais aussi, chez certains, un trouble croissant. Il faudra toutefois encore du temps. Ce n’est qu’en 1906 que Dreyfus sera réhabilité. Zola, pour sa part, aura acquis ses galons de grand justicier. Mais il sera condamné par la justice de son pays. Et pour échapper à la prison, il devra s’exiler une petite année en Angleterre.

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