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La « rhétorique anti-Roms » de la France inquiète l’Europe

La Commission européenne a une nouvelle fois menacé mercredi la France de sanctions en rappelant que les Roms, citoyens européens, ont le droit de circuler librement dans tous les Etats-membres de l’UE.

« La libre circulation comme la liberté de résider dans un autre pays sont des droits fondamentaux (…) Si ces principes inscrits dans les Traités ne sont pas respectés, la Commission utilisera tous les moyens à sa disposition » pour sanctionner ces violations, a averti le porte-parole de la Commission Olivier Bailly. « Les Roms, comme tous les citoyens de l’UE, bénéficient de la liberté de circuler librement dans tous les Etats membres de l’UE et de résider dans un autre pays que leur pays d’origine », a-t-il rappelé.

La Commission a déploré une confusion « volontaire ou involontaire » dans les règles et principes européens faite par les responsables politiques en France. « Il y a de l’élection en l’air en France », a résumé Viviane Reding, la vice-présidente de la Commission chargée de la Justice. Mme Reding avait déjà été contrainte, sous la présidence de Nicolas Sarkozy il y a trois ans, d’user de la menace contre la France pour stopper les expulsions de Roms.

« Le fait que la Bulgarie et la Roumanie ne soient pas membres de Schengen n’empêche nullement leurs citoyens de circuler dans l’UE au titre des libertés fondamentales », a également souligné Olivier Bailly.

Aucune date n’a été fixée pour les adhésions car elles devront être approuvées à l’unanimité des 26 Etats membres de l’espace Schengen. Or, plusieurs pays, dont la France, bloquent.

En revanche, les travailleurs roumains et bulgares pourront venir travailler librement en France et dans tous les autres pays de l’UE à compter du 1er janvier 2014, avec la fin des dernières restrictions imposées en France et dans sept autres pays, dont l’Allemagne et la Belgique.

L’Europe compte entre 10 et 12 millions de Roms et la plupart sont des citoyens de l’UE. « La France, comme tous les autres Etats de l’UE, s’est engagée sur une stratégie nationale d’intégration des Roms », a rappelé Viviane Reding. « L’argent européen est disponible, mais les projets d’insertion font défaut en France », a-t-elle déploré.

« Banalisation des discriminations » La Commission n’est pas la seule institution européenne à s’émouvoir de la situation en France. Le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe Nils Muiznieks s’est dit « très inquiet » mercredi de la « rhétorique anti-roms » à l’approche de élections municipales et européennes de 2014.

« Ce débat perpétue une tendance inquiétante vers une rhétorique anti-roms discriminatoire et incendiaire, et risque de prendre un virage dangereux avec les prochaines élections municipales et européennes », a-t-il estimé dans un communiqué publié au siège du Conseil de l’Europe à Strasbourg.

Ce débat « stigmatise des citoyens européens juste à cause de leur origine et alimente de plus en plus d’attitudes anti-Roms au sein de la population », souligne le Commissaire aux droits de l’homme de l’organisation paneuropéenne, qui réunit 47 pays et dont les principaux objectifs sont la défense des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit.

Le fait « que des officiels élus ou des politiques répètent de telles déclarations a aussi un effet délétère de banalisation des discriminations », prévient M. Muiznieks.

« Il est grand temps » selon lui que les politiques s’engagent davantage à « promouvoir le respect de la dignité humaine et les droits de l’homme, y compris ceux des groupes les plus vulnérables », conclut-il.

Critiqué dans son camp pour ses propos sur les Roms qui ne « sont qu’une minorité à vouloir s’intégrer », le ministre français de l’Intérieur Manuel Valls s’est tourné vers la Roumanie et la Bulgarie, leur demandant de faire davantage pour l’intégration de cette minorité.

« Les Roms ont vocation à retourner dans leur pays et à s’intégrer là-bas », a-t-il répété mercredi sur RMC/BFM TV après des propos similaires la veille, jugés « excessifs » par son collègue Arnaud Montebourg, qui lui a demandé de les corriger.

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