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La Libye en état de guerre

Le colonel Kadhafi a assuré lundi soir qu’il se trouvait encore en Libye, démentant ainsi les rumeurs selon lesquelles il se serait réfugié au Venezuela. Quoi qu’il en soit, la répression des manifestants qui demandent son départ est extrêmement violente, l’armée de l’air étant même intervenue pour bombarder des quartiers de Tripoli.

Le numéro un libyen Mouammar Kadhafi a démenti les informations selon lesquelles, il aurait quitté la Libye pour le Venezuela lors d’une brève apparition en « direct » lundi soir sur la télévision d’Etat libyenne, depuis sa résidence de Bab Al Azizia à Tripoli. « Je vais voir les jeunes sur la place verte. C’est juste pour prouver que je suis à Tripoli et non au Venezuela et démentir les télévisions, ces chiens », s’est-il contenté d’affirmer en réponse aux informations diffusées lundi par plusieurs télévisions et médias internationaux.

Kadhafi se montre

Les images diffusées par la télévision montraient le colonel Kadhafi, en manteau, s’apprêtant à monter dans une voiture, alors qu’il tenait un parapluie pour se protéger de la pluie, devant sa maison dans la résidence-caserne de Bab Al-Aziziya.

Sur un bandeau rouge, la télévision nationale a inscrit ensuite: « dans une rencontre en direct avec la chaîne satellitaire Al-Jamahiriya, le frère leader de la révolution a démenti les rumeurs des chaînes tendancieuses ».

Le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, avait déclaré dans l’après-midi en marge d’une réunion à Bruxelles que le colonel Kadhafi pourrait avoir fui son pays et être en route vers le Venezuela.

La révolte fait rage

Mais le moins que l’on puisse dire, c’est que sa présence n’est plus désirée par une partie de la population libyenne. La révolte contre son régime continue de se manifester dans les rues de Tripoli, et la répression est sans précédent.

La répression aussi

Ainsi, les forces armées libyennes ont-elles bombardé des dépôts d’armes situés loin des zones urbaines, a déclaré lundi soir Seif al-Islam, un des fils de Mouammar Kadhafi, selon la télévision libyenne. « Les forces armées ont bombardé des dépôts d’armes situés dans des zones loin des concentrations urbaines », a écrit sur un bandeau la télévision libyenne, précisant qu’elle citait une déclaration de Seif Al-Islam à l’agence officielle Jana. Seif Al-Islam a ainsi démenti « des informations selon lesquelles les forces armées ont bombardé les villes de Tripoli et de Benghazi », précise la télévision libyenne. La chaîne de télévision Al-Jazira avait notamment fait état de bombardements aériens à Tripoli.

Par ailleurs, des affrontements meurtriers ont eu lieu lundi dans les quartiers de Fachloum et de Tajoura à Tripoli, ont déclaré à l’AFP des habitants de ces quartiers joints au téléphone, l’un d’eux qualifiant les évènements de « massacre ». « Ce que s’est passé aujourd’hui à Tajoura est un massacre », a affirmé à l’AFP un habitant. « Des hommes armés tirent de manière aveugle. Il y a même des femmes qui sont mortes », a-t-il ajouté, sous couvert de l’anonymat. Il a affirmé que les mosquées du quartiers diffusaient des appels au secours par le biais de haut-parleurs.

Un autre témoin à Fachloum a indiqué que des hélicoptères avaient survolé le quartier pour faire descendre des mercenaires africains armés, qui ont tiré sur toutes les personnes se trouvant dans la rue. Il a fait état d’un grand nombre de morts. Fachloum et Tajoura sont situés dans la banlieue de Tripoli.

Le bilan de la répression en Libye se compte désormais en centaines de morts: Human Rights Watch avance le chiffre de 233 morts, tandis que la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH) a fait état de 300 à 400 morts.

Appel au meurtre de Kadhafi

Le très influent théologien qatari d’origine égyptienne cheikh Youssef Al-Qardaoui a émis lundi une « fatwa » appelant sur la chaîne Al-Jazira l’armée libyenne à assassiner Mouammar Kadhafi pour « en débarrasser la Libye ». « Que quiconque de l’armée libyenne qui peut tirer une balle sur Mouammar Kadhafi pour en débarrasser la Libye le fasse », a-t-il déclaré. Il a également appelé les ambassadeurs libyens à se dissocier du régime.

Il semble avoir été entendu. L’ambassadeur adjoint de la Libye à l’ONU, Ibrahim Dabbashi, a déclaré que le président libyen Mouammar Kadhafi est coupable de « génocide » contre son propre peuple et doit « partir le plus vite possible ». « Je pense que nous assistons à la fin du colonel Kadhafi, ce n’est qu’une question de jours. Soit il démissionne, soit le peuple libyen se débarrasse de lui », a jugé Ibrahim Dabbashi sur la BBC.

Qualifiant de « génocide » la répression du mouvement de protestation qui secoue la Libye, M. Dabbashi a estimé que le « meilleur des scénarios serait qu’il (Kadhafi) soit jugé et qu’il s’explique sur tous les crimes » commis depuis qu’il est à la tête du pays. Mouammar Kadhafi « doit partir le plus vite possible », a encore dit M. Dabbashi, cette fois sur CNN. « J’appelle les pays du monde entier à ne pas autoriser Kadhafi à se réfugier chez eux et je les appelle aussi à surveiller attentivement tout transfert d’argent venant de Libye », a encore dit M. Dabbashi.

Au sein de l’équipe libyenne à l’ONU, M. Dabbashi a assuré ne pas être isolé. Il a indiqué au New York Times que l’équipe diplomatique libyenne à l’ONU avait écrit une lettre appelant Mouammar Kadhafi à la démission, sans toutefois expliquer combien de personnes avaient signé le document.

L’ambassadeur libyen en Inde a déclaré mardi à l’AFP avoir lui aussi démissionné la veille à cause de la violence « massive » et « inacceptable » déployée contre des civils dans son pays, citant notamment le bombardement de manifestants par l’armée de l’air. « Ma démission est à cause de la violence massive contre des civils dans mon pays », a déclaré le diplomate, Ali Al-Issawi, dans un entretien téléphonique avec l’AFP. « Hier (lundi) ils ont commencé à utiliser des avions pour bombarder des civils qui manifestaient pacifiquement. C’est inacceptable », a-t-il ajouté.

M. Al-Issawi a appelé la communauté internationale et le conseil de sécurité de l’ONU, qui doit se réunir mardi pour discuter de la crise en Libye, à imposer une zone interdite de survol en Libye. « La communauté internationale doit intervenir pour protéger les Libyens », a déclaré l’ambassadeur qui avait pris ses fonctions à New Delhi en octobre 2010. Le diplomate a considéré que le régime de Kadhafi avait perdu sa légitimité et qu’il finirait par tomber. « C’est une question de temps.

LeVif.be, avec Belga

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