le SDP de Zoran Milanovic, en plein vote, le 11 septembre 2016 © Reuters

La Croatie dans l’impasse après un scrutin sans vainqueur net

Le Vif

Les législatives croates de dimanche n’ont pas accouché de vainqueur net, laissant le pays dans l’incertitude après des mois de paralysie, de polémiques et de tension avec la Serbie sous le précédent pouvoir conservateur, taxé de dérive nationaliste.

Selon des sondages à la sortie des bureaux de vote, l’opposition sociale-démocrate du SDP, annoncée favorite, remporterait 57 ou 58 sièges (sur 151), contre 57 aux conservateurs du HDZ qui menaient la précédente coalition et semblent mieux placés pour trouver des alliés et garder le pouvoir.

Quel que soit le vainqueur final, le prochain gouvernement s’annonce aussi fragile que le précédent, et aura du mal à avoir une légitimité suffisante pour sortir de la crise politique et économique ce pays membre de l’Union européenne depuis 2013.

Le précédent cabinet aura tenu à peine six mois, usé par des dissensions internes et achevé par un scandale politico-financier.

Ce passage éclair après quatre ans de règne social-démocrate a écorné l’image de la Croatie: nomination d’un ministre de la Culture accusé de révisionnisme sur le régime oustachi pronazi, mises en cause de la presse, influence accrue de l’église sur les questions de société, attaques contre les minorités, notamment serbes…

Vingt-cinq ans après les guerres des Balkans, les relations entre Zagreb et Belgrade n’ont jamais été plus mauvaises.

Des responsables serbes se sont inquiétés d’un « nazisme renaissant », selon eux, de l’autre côté de la frontière.

Les Croates évoquent pour leur part le passé ultranationaliste des responsables serbes, y compris celui du Premier ministre Aleksandar Vucic.

Dans ce contexte, le SDP de Zoran Milanovic, 49 ans, et le HDZ nouvelle formule d’Andrej Plenkovic, 46 ans, semblaient donner des gages d’apaisement.

Le premier a promis un « gouvernement de progrès et de tolérance », tandis que le second veut faire de son parti une formation de centre droit, éloignée des postures nationalistes de son prédécesseur, l’ex-chef espion Tomislav Karamarko.

Le poids de l’Eglise et de Most

Mais moins d’un an après les législatives précédentes, les 3,8 millions d’électeurs croates semblent lassés, avec une participation en forte baisse (près de 10% de moins, trois heures avant la clôture des bureaux à 17H00 GMT).

Qu’il s’agisse de Milanovic ou de Plenkovic, le prochain chef du gouvernement sera à la merci des bisbilles entre partis et confronté à la crise économique et à un chômage de 13%, qui touche près d’un jeune de moins de 25 ans sur trois.

Etudiant en technologie de 19 ans, Ivan Cizmek, dit ce qu’il attend du futur gouvernement: « Faire ce qu’il faut pour un emploi plus fort ».

Les tractations pour bâtir une coalition majoritaire pourraient durer des jours, voire des semaines, comme la dernière fois.

Mais le HDZ semble mieux placé pour recueillir l’assentiment de la troisième force politique en Croatie, Most, proche d’une Eglise influente dans un pays où 90% des habitants se disent catholiques. « Nous espérions plus », a reconnu un responsable du SDP, Sinisa Hajdas Doncic.

Le chef conservateur, Andrej Plenkovic, semble aussi pouvoir compter sur les minorités et leurs huit députés, dont trois pour les Serbes. S’il devient Premier ministre, il devra toutefois se garder de la frange la plus conservatrice du parti, mécontente de le voir imposer sa ligne centriste.

Durant la campagne, le social-démocrate Zoran Milanovic, 49 ans, a fait un appel du pied à l’électorat le plus à droite, s’en prenant durant la campagne aux Serbes, qualifiés de « bande de misérables » dans des propos tenus devant des anciens combattants.

Il pâtit toutefois de la faiblesse des réformes engagées quand il dirigeait le pays. La Croatie n’est sortie qu’en 2015 d’une récession qui a duré six ans.

Les résultats officiels sont attendus dans la nuit.

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