Thorbjorn Jagland, le sécrétaire général du Conseil de l'Europe. © Reuters

La Belgique prend la présidence du Conseil de l’Europe, sur fond d’érosion des droits

La Belgique prendra jeudi, pour six mois, la présidence du Conseil de l’Europe, alors que l’organisation est confrontée à une grave crise entre deux de ses membres, la Russie et l’Ukraine, et à une érosion des droits fondamentaux.

La présidence de la Belgique sera plus spécifiquement consacrée à trois thématiques: les droits fondamentaux, l’Etat de droit et la démocratie. Mais le conflit entre la Russie et l’Ukraine, qui avait déjà été au centre de la réunion du comité des ministres en mai à Vienne, sera bien présent en filigrane ces six prochains mois.

Des réunions bilatérales « politiques et diplomatiques » se tiendront discrètement pour tenter de rapprocher les protagonistes. Le Conseil de l’Europe, peu connu et souvent éclipsé par l’Union européenne, réunit les 28 membres de l’UE mais également 19 autres pays, parmi lesquels la Turquie, la Russie, l’Ukraine ou l’Azerbaïdjan.

Son « bras armé », la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), est chargé de faire respecter la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. La présidence belge permettra d’ailleurs de réfléchir à la mise en oeuvre des arrêts de la Cour par les Etats et à la meilleure façon d’aider la Cour à réduire encore son arriéré judiciaire. Elle a déjà réussi à passer de 160.000 affaires pendantes à 90.000 dossiers en attente en quelques années, mais l’effort doit se poursuivre.

Bruxelles accueillera en mars une conférence de haut niveau sur la responsabilité partagée de la CEDH et des Etats membres dans la mise en oeuvre des arrêts. La présidence belge devra aussi composer avec la contestation, par certains membres – parfois fondateurs – du Conseil de l’Europe, de l’autorité de la CEDH. Le leader des Conservateurs britanniques David Cameron a ainsi critiqué la Cour lors d’un congrès de son parti après que la CEDH eut condamné le Royaume-Uni pour son refus d’accorder le droit de vote aux détenus.

Les dirigeants du Conseil de l’Europe suivent avec attention l’évolution du dossier, même si officiellement, « il s’agit d’un discours électoral et non d’un programme du gouvernement », commentent le secrétaire général du Conseil de l’Europe, Thorbjorn Jagland, et son entourage. Mais si la Cour était contestée par des membres historiques du Conseil de l’Europe, qui connaissent finalement peu de violations des droits fondamentaux, d’autres pays moins en pointe sur ce plan risqueraient d’embrayer et de rejeter l’autorité de la Cour, analyse Daniel Holtgen, le porte-parole du secrétaire général.

Les attentes de l’organisation envers la Belgique sont élevées, a pu constater l’Agence Belga lors de rencontres avec les différents représentants du Conseil de l’Europe. La présidence tourne en effet tous les six mois selon l’ordre alphabétique et la Belgique reprendra le flambeau à l’Azerbaïdjan, peu réputé pour son engagement en faveur des libertés fondamentales. Plusieurs journalistes et militants des droits de l’homme azéris ont d’ailleurs été arrêtés à leur retour au pays après une visite à Strasbourg, où se trouve le siège de l’organisation.

La présidence sera lancée officiellement mercredi avec un gala à Bruxelles auquel prendront part Thorbjorn Jagland et la Haute représentante de l’Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, Federica Mogherini. Des expositions sont prévues tant en Belgique qu’à Strasbourg. La Belgique sera d’ailleurs invitée d’honneur au célèbre marché de Noël de la cité alsacienne.

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