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L’Italie toujours dans l’impasse politique

Le Vif

Bersani a échoué à former un gouvernement, Berlusconi marchanderait la présidence et Grillo veut renverser la table… Non, la tâche du président Napolitano n’est pas aisée.

Suspense persistant en Italie, qui attend toujours un gouvernement… Le président Giorgio Napolitano a pris une pause de réflexion vendredi après avoir consulté les principaux partis pour chercher à concilier les exigences de la gauche, de la droite berlusconienne et des contestataires de l’ex-humoriste Beppe Grillo.

Les experts politiques jugent probable une annonce du président ce samedi, pendant la fermeture des marchés financiers et avant les jours fériés des dimanche et lundi de Pâques.

Consultations éclair

C’est le Parti démocrate (PD, gauche) de Pier Luigi Bersani qui a fermé le banc des rencontres éclair avec le président. Son bras droit Enrico Letta a répété le « non » du centre gauche à un gouvernement dit « de large entente » fondé sur une alliance droite-gauche en raison des « fortes divergences entre les forces traditionnelles ».

Mais Enrico Letta a assuré que son parti « ne priverait pas le président de son soutien pour les décisions qu’il prendrait » sans exclure donc une solution médiane. L’option à écarter en revanche serait, selon lui, un retour immédiat aux urnes « car voter avec la même loi électorale (à l’origine de l’impasse actuelle, ndlr) serait une profonde erreur ».
Les législatives de la fin février ont abouti à une situation inextricable puisque la gauche de Pier Luigi Bersani dispose de la majorité absolue à la Chambre des députés mais pas au Sénat, où gauche, droite de Silvio Berlusconi et M5S ont un poids similaire (entre un quart et un tiers de l’électorat).

Grillo et sa « révolution française sans la guillotine »

Aussi bien le PDL de Silvio Berlusconi que le Mouvement 5 Etoiles (M5S) de Beppe Grillo ont campé sur leurs positions au cours de leurs rencontres avec le président Napolitano. Le M5S, qui a canalisé le vote de protestation avec un programme anti-partis traditionnels et anti-austérité, a de nouveau réclamé un gouvernement sous ses propres couleurs et rejeté toute alliance à droite ou à gauche. Le M5S « n’accordera pas la confiance à un gouvernement d’hommes politiques ni pseudo-techniques », a déclaré le chef de file des sénateurs du M5S, Vito Crimi.

Il a fermé définitivement la porte à toute entente avec la gauche qui le courtisait depuis la fin février. Le M5S, pourtant émanation d’un électorat proche de la gauche, n’a cessé d’opposer des refus humiliants au parti de Bersani. Et Grillo a enfoncé le clou vendredi, en mettant dans le même sac Bersani et Berlusconi: « A qui va-t-on voter la confiance? à ces gens qui ont désintégré le pays pendant vingt ans? ».
« Nous sommes nouveaux, les mots qui comptent pour nous sont le sens de la communauté, que personne ne doit être laissé à la traîne, revenu minimum de citoyenneté, aide aux PME… Nous sommes comme la révolution française sans la guillotine », a-t-il dit.

Berlusconi marchande… pour la présidence

De son côté, le Cavaliere a reproposé un « gouvernement de coalition » alliant la droite et la gauche, même dirigé par son adversaire Bersani. Une option pourrait passer par un appui indirect de Berlusconi à la gauche (par exemple via une abstention) au cours du premier vote de confiance nécessaire pour lancer la législature.
Selon la presse, désireux de se doter d’une immunité maximale face à ses ennuis judiciaires, le magnat aurait exigé en échange de choisir un candidat de droite pour succéder au président Napolitano d’ici à la fin de son mandat le 15 mai. Des allégations que le Cavaliere a démenties catégoriquement vendredi. Donné vainqueur dans un sondage de vendredi en cas de nouveau scrutin (avec 32,5% pour la droite contre 29,6% pour la gauche), Silvio Berlusconi serait sur une position du « tout ou rien », la présidence pour son camp ou un retour aux urnes en juin ou juillet, une hypothèse improbable puisque le Parlement doit au préalable élire le nouveau président.

Vers un « gouvernement du président »?

En conséquence, les journaux faisaient des conjectures sur les chances d’un « gouvernement du président » dirigé par une personnalité neutre, qui se limiterait à quelques mesures (loi électorale, budget, réduction des coûts de la politique) avant de nouvelles élections dans 9 ou 12 mois. Et le chef de file des sénateurs M5S Vito Crimi a semblé laisser une porte entrouverte: « cette hypothèse n’est pas sur la table » mais « au moment où sera publié un nom… », a-t-il répondu à une question sur un « gouvernement institutionnel du président ». Selon plusieurs journaux, la ministre de l’Intérieur, Anna Maria Cancellieri, un grand commis d’Etat apprécié à droite comme à gauche, pourrait prendre la tête d’un tel exécutif. D’autres voix évoquent l’ex-commissaire européenne Emma Bonino.

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