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« L’homme qui répare les femmes » restera interdit en RDC

Le gouvernement congolais a annoncé jeudi l’interdiction définitive du film consacré au combat du gynécologue congolais Denis Mukwege en faveur de milliers de femmes violées dans l’est, accusant son réalisateur d’avoir proféré des « menaces » contre un ministre du pays.

Kinshasa a annoncé le 2 septembre l’interdiction de diffuser « L’homme qui répare les femmes » en République démocratique du Congo (RDC), en arguant que ce documentaire, récompensé par plusieurs prix internationaux, témoigne d’une « volonté manifeste de nuire » à l’armée congolaise et de « salir » son image.

Le porte-parole du gouvernement congolais et ministre des Médias et de la Communication, Lambert Mende Omalanga, avait alors accusé le cinéaste belge Thierry Michel de faire mentir dans son commentaire les témoignages en langues swahili et mashi de personnes apparaissant à l’écran – ce que le réalisateur a par la suite démenti.

« Suite à des demandes d’un réexamen » de l’interdiction, décriée en RDC et à l’étranger, « nous avions mis sur pied une commission chargée de corriger la traduction malencontreuse pour une plus fidèle, en vue d’une éventuelle autorisation de diffusion », a expliqué jeudi en conférence de presse M. Mende, qui avait signé l’autorisation de tournage de l’équipe.

Il a cependant affirmé que le réalisateur n’avait « pas trouvé mieux » que de lui « adresser des menaces d’une violence incroyable », prédisant que, comme le dictateur Mobutu Sese Seko (1965-1997), il ne serait pas enterré dans son pays s’il refusait de « diffuser son documentaire en l’état ». « Qu’un étranger vienne menacer un ministre au lieu d’introduire un recours normalement contre une décision, on ne doit pas trouver cela normal. C’est pourquoi la décision a été gelée. Pour moi, elle ne sera plus revue: ce film reste interdit », a martelé M. Mende.

« L’Homme qui répare les femmes » a été réalisé par Thierry Michel et la journaliste belge Colette Braeckman. Sur son blog, cette dernière explique qu’elle a voulu trouver une « solution à l’amiable » avec Kinshasa, où elle s’est même rendue, afin que « nul ne perde la face et surtout que la population congolaise puisse prendre connaissance d’un film qui lui était destiné en premier lieu ». Elle souligne qu’un « échec était parfaitement envisageable » parce que la RDC avait peut-être d’autres motifs pour justifier l’interdiction, mais accuse M. Michel d’avoir « torpillé une négociation qu’il savait imminente et délicate, en faisant connaître les conclusions de ses propres traducteurs et en interpellant maladroitement le ministre de l’Information ».

Thierry Michel a pour sa part affirmé à l’agence Belga qu’il était « bien triste de cette situation » de conflit avec la co-auteure du film.

Le documentaire montre l’oeuvre du Dr. Mukwege dans son hôpital de Panzi, à Bukavu, capitale du Sud-Kivu. Dans cette institution qu’il a créée en 1999, il aide à se reconstruire physiquement et psychologiquement les femmes victimes de viols accompagnés de violences sauvages commis à grande échelle dans l’est de la RDC depuis une quinzaine d’années.

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