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Kalachi, le mystère du village endormi est enfin résolu

Marie Gathon
Marie Gathon Journaliste Levif.be

Les habitants d’un petit village reculé du Kazakhstan souffrent de soudaines pertes de connaissance, pouvant durer de deux à six jours depuis plusieurs années. Des experts viennent de découvrir les causes de cet étrange phénomène qui était resté inexpliqué jusqu’alors.

À Kalachi, dans ce petit village du nord du Kazakhstan situé à 450 kilomètres de la capitale Astana, une centaine d’habitants sur les quelque 600 qui le peuplent souffrent d’un mal mystérieux depuis 2010. Par vague, ils sont victimes de brutales et soudaines pertes de connaissance qui durent de deux à six jours. Un phénomène en hausse depuis mars 2013, d’après le Siberian Times, qui suit l’affaire depuis plusieurs mois. La bourgade de Kalachi a même été surnommée « Sleepy Hollow ».

Un habitant raconte au journal britannique The Guardian: « Le 28 août, je filais sur ma moto pour aller faire des courses dans le village voisin. Le moment d’après, je me réveillais à l’hôpital. On était le 2 septembre. Je ne me souvenais de rien. » D’autres cas similaires sont répertoriés. Ainsi, un agriculteur s’endort en trayant ses vaches, il ne se réveille que deux jours et deux nuits plus tard. Une femme venue passer le week-end chez un parent s’effondre alors qu’elle planche sur un dossier et reprend conscience trente heures plus tard, à l’hôpital. L’épidémie de sommeil touche toutes les tranches de la population, des jeunes enfants aux personnes âgées. En plus de sombrer dans un sommeil profond, les victimes expérimentent des nausées, des pertes de mémoire et des hallucinations.

À l’hôpital, les médecins interloqués avaient soupçonné les effets sédatifs d’une vodka frelatée, vu l’état d’hébétude de certains patients. Ils ont cependant rapidement abandonné l’hypothèse vu que des enfants sont également touchés par le phénomène.

Des batteries de tests bactériologiques et viraux, des études du sol, de l’eau, de l’air, de sang et de tissus, tout comme des ponctions lombaires n’étaient jusqu’ici pas parvenus à éclaircir le mystère de ces phases de narcolepsie.

Les experts ont fini par faire peser leurs soupçons sur la ville fantôme de Krasnogorsk, à proximité du village. Comme l’explique Le Monde, au temps de l’Union soviétique, la zone était fermée et secrète, placée directement sous l’autorité de Moscou. Ses 6500 résidents y extrayaient du minerai d’uranium. En 1991, la mine a cessé d’être exploitée du jour au lendemain et la ville laissée à l’abandon. Aujourd’hui, seulement 200 habitants y vivent encore, mais aucun ne souffre pourtant de ces endormissements soudains.

Cette piste envisagée avec sérieux pourrait lever un voile sur le mystère. Pourtant, une énigme persiste, dans le Siberian Times, l’anesthésiste Kabdrashit Almagambetov, qui a soigné une des victimes de Kalachi, explique : « Quand on utilise des gaz proches du radon sur des patients, ils se réveillent au maximum une heure après l’opération. Là, on est face à des gens qui dorment entre deux et six jours. » En janvier, un ancien travailleur de la mine d’uranium avait confié à la reporter Anna Liesowska, du Siberian Times, qu’il ne croyait pas non plus à l’hypothèse du radon. « Quand nous descendions dans la mine, explique Vitaly, 60 ans, la concentration en radon était très élevée et personne ne s’endormait…« 

C’est pourtant bien du côté de cette mine que l’explication a été trouvée par les experts. Si ce n’est pas le radon qui est responsable des endormissements, c’est en fait le monoxyde de carbone, rapporte le Figaro. « Après de nombreux tests médicaux, nos chercheurs et leurs collègues de Prague et Moscou ont confirmé la responsabilité du monoxyde de carbone dans l’épidémie d’endormissement qui frappe le village de Kalachi », a annoncé lors d’un point presse à Astana le vice premier ministre Berdibek Saparbayev.

« L’élévation de la concentration de monoxyde de carbone jusqu’à dix fois au-dessus de la moyenne, combinée à d’autres émanations d’hydrocarbure, s’accompagnerait d’une baisse des niveaux d’oxygène expliquant les brusques pertes de conscience et leurs effets secondaires », explique Le Figaro.

L’évacuation du village a immédiatement commencé après cette révélation. Selon le Siberian Times, 68 des 223 familles ont déjà été relogées, et les habitants restants devraient être pris en charge d’ici l’année prochaine.

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