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Kabila peut encore jouer la montre

L’opposition et les étudiants ont-ils crié trop tôt victoire après le retrait de la loi qui aurait prolongé de facto le second mandat du président de la RDC Congo ? Les élections prévues fin 2016 risquent toujours d’être retardées.

Le retrait, par le Parlement, d’une disposition de la loi électorale qui liait la tenue de l’élection présidentielle à la fin des opérations de recensement – ce qui aurait retardé le scrutin congolais de trois ou quatre ans – a fait retomber la tension dans la capitale et l’est du pays.

Pour autant, si la stratégie de Kabila en vue de rester au pouvoir au-delà du terme de son mandat vient de connaître un revers, la tenue des scrutins d’ici à la fin 2016 est loin d’être acquise. La loi n’a pas retenu la clause réclamée par les sénateurs, qui entendaient coucher noir sur blanc l’obligation d’organiser l’élection présidentielle dans les délais prévus par la Constitution. De même, le nouveau texte supprime la référence à 2015 pour la tenue des scrutins locaux, provinciaux et sénatoriaux, qui doivent précéder la présidentielle. Par ailleurs, le recensement reste un préalable exigé pour l’organisation des prochaines législatives, censées avoir lieu fin 2016. Actualiser les données démographiques risque de prendre plusieurs années.

Cela fait beaucoup d’imprécisions et d’ambiguïtés. D’autant que d’autres exigences légales, visant à limiter les candidatures à la magistrature suprême, sont maintenues : la caution non remboursable pour tout candidat reste fixée à plus de 100 000 dollars, un montant deux fois plus élevé que celui prévu lors la dernière présidentielle. Objectif avancé par le gouvernement : décourager les candidatures fantaisistes. Concrètement, seules les grosses fortunes ou les protégés du régime pourront entrer en lice. En outre, un diplôme sanctionnant cinq années d’études universitaires est exigé pour postuler à la présidence (en 2006 et 2011, un diplôme de graduat « Bac +3 » suffisait). A défaut, le candidat devra justifier d’une expérience professionnelle d’au moins cinq ans dans le domaine politique et administratif. Autre incertitude : le financement de l’organisation des élections, qui doit encore être trouvé.

Comment vont réagir les forces d’opposition, très affaiblies par leurs divisions et les manoeuvres du pouvoir ? Le 7 décembre, Kabila a fait entrer au gouvernement des figures du MLC, de l’UDPS et de l’UFC de Kengo wa Dondo, le président du Sénat. Cette « ouverture » a déstabilisé l’opposition, en particulier le MLC, lâché par plusieurs de ses hauts cadres.

Le plus grand danger pour le président ne vient donc pas de l’opposition, mais du risque d’éclatement de sa majorité. « Au sein des formations proches de la majorité présidentielle, des personnalités de premier plan se sont prononcées contre la réforme de la loi électorale, relève le Grip : notamment Pierre Lumbi, Olivier Kamitatu, Jean-Claude Muyambo, ou encore Léon Kengo wa Dondo… Moïse Katumbi, gouverneur très populaire du Katanga et chef de file du parti présidentiel dans sa province, s’est lui-même notablement éloigné de Kabila, en appelant en termes à peine voilés la population à s’opposer au dessein d’un  »3e penalty ». »

Le dossier dans Le Vif/L’Express de cette semaine

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