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Jerzy Popieluszko, l' »aumônier de Solidarnosc », béatifié

Ce dimanche, l’Eglise catholique a béatifié le prêtre polonais assassiné en 1984 par le régime communiste de Varsovie, et consacré martyr par le pape Benoït XVI en décembre dernier.

Rien ne prédestinait le frêle Jerzy Popieluszko, né en 1947 dans une famille de paysans d’une région reculée du nord-est de la Pologne, à devenir un héros national. Et pourtant. Le jeune prêtre de 37 ans, soutien inconditionnel du syndicat libre Solidarnosc (Solidarité), est assassiné un soir d’octobre 1984, après avoir été piégé par des agents de la sécurité intérieure travestis en policiers. Son corps méconnaissable ne sera retrouvé que quelques jours plus tard, flottant dans la Vistule. Avec sa mort brutale, l’ecclésiastique engagé achève de mêler son destin à celui de la Pologne anti-communiste de l’organisation de Lech Walesa. Et rentre dans l’histoire.

Ordonné prêtre en 1972, Popieluszko prend fait et cause, dès 1980, pour les mouvements de grève qui vont donner naissance à Solidarnosc. Il devient l’aumônier du syndicat, et un allié de poids face à l’intransigeance du régime du général Wojciech Jaruzelski, inféodé à Moscou. Chaque dernier dimanche du mois, les « messes pour la patrie » attirent plusieurs milliers de personnes dans la paroisse de Saint Stanislas, à Varsovie, d’habitude plus calme.

Le martyr de tout un peuple Lors de ses homélies enflammées, l’homme de foi appelle à la libération des prisonniers politiques – dont Lech Walesa, emprisonné depuis l’instauration de la loi martiale en décembre 1981 – et au respect du droit d’association. Un activisme suivi de près par la police politique dont certains représentants en civils n’hésitent pas à jouer les provocateurs, en appelant en pleine messe les fidèles à prendre les armes, dans le but de faire tomber, et museler, le jeune prêtre. Mais Popieluszko n’est pas homme à manger de ce pain (béni) là. « L’idée qui a besoin d’armes pour durer meurt d’elle-même », aimait-il rappeler.

Lassé des envolées humanistes et pro-syndicalistes du prêtre, le régime décide de s’en débarrasser. Et crée un martyr, que l’Eglise célèbre ce dimanche à Varsovie. La Pologne n’a pourtant pas attendu que le procès en béatification, ouvert en 2001 par le pape Jean Paul II, s’achève pour commémorer la mort du prêtre. Deux films au moins ont déjà été réalisés sur sa vie : Le Complot, en 1988 avec l’acteur français Christophe Lambert dans le rôle titre, et Popieluszko, sorti en 2009 en Pologne.

A Varsovie, un réseau de plusieurs dizaines de fidèles veille en permanence sur la tombe de l’abbé, déjà visitée par plus de 17 millions de personnes. Jean Paul II lui-même était venu s’y recueillir en 1987. Mgr Bernard Podvin, porte-parole de la Conférence des évêques de France, y voit le signe qu’ « on ne maîtrise pas le rayonnement (des) martyrs (de l’Eglise) ».

Jérémie Lanche

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