© Mélanie Geelkens

J’étais au Mipim de Cannes, et tout est vrai

Mélanie Geelkens
Mélanie Geelkens Journaliste, responsable éditoriale du Vif.be

La mi-mars cannoise n’est pas la saison du tapis rouge, mais des cordons rouges. Pendus autour de 24 200 cous, signes distinctifs permettant de repérer au premier coup d’oeil celui qui a déboursé 1 890 euros pour assister au Mipim, le festival international des professionnels de l’immobilier.

Le ruban écarlate surmonte généralement un costume-cravate. Une véritable invasion, dans tous les hôtels, cafés et restaurants un peu huppés (au McDo, on en a moins repéré), comme si les habitants avaient été remplacés par des vestons bien taillés. Et quelques robes, qui ont dû trancher, par ces vingt degrés printaniers : collants ou pas collants ? Le compromis  » bas couleur chair  » l’emporte souvent, tant pis s’il n’est visuellement pas toujours du meilleur effet. Sur une Croisette où cohabitent maillots de bain et bottes en cuir, on n’en est plus à un contraste près.

It’s a man’s world, l’immobilier. Sur les stands, c’est à celui qui aura la plus grosse : maquette, tour, superficie. Les Londoniens sont sans conteste les mieux gaulés, avec leur reproduction géante de la ville. Dubaï fait dans les serveurs en livrée pour écouler des amuse-bouches, tandis qu’un animateur prend le micro pour un laïus sur les projets à développer, même lorsque l’assistance face à lui est franchement dépeuplée. Istanbul aussi a mis le paquet et va jusqu’à faire naviguer des bateaux sur son Bosphore miniature. Moscou a rhabillé ses hôtesses (il y a quelques années, leur style dénudé avait créé un minitollé) mais expose sa puissance sur 25 écrans télé. La Belgique, contrairement à ces métropoles, ne s’est pas offert le luxe ultime d’une tente en bord de plage, avec terrasse et les pieds dans le sable. Mais bien un immense espace intérieur, pile au-dessus des célèbres marches. Les petits Belges ont le plus grand emplacement, na !

On n’attrape pas les investisseurs avec du vinaigre. Avec de la bière et du vin, en revanche… Au Mipim, les verres se vident aussi vite que les cartes de visite s’échangent. Au bout d’une journée, il y a moyen d’en ressortir avec un paquet tellement épais qu’il est possible d’oublier les visages rencontrés. Les contrats y sont rarement signés, les participants sont d’abord là pour réseauter. Parfois, les premiers contacts se poursuivent à bord d’un yacht ou sur la terrasse d’un appartement privé, présage d’une amitié commerciale bien entamée, qu’il faudra consolider une fois la parenthèse cannoise refermée.

Puis viennent les soirées. Les Anglais écument les pintes au bien nommé café Manchester. Les m’as-tu-vu se serrent devant le Roma. Les plus fêtards cherchent désespérément un bar qui ferme plus tard que 2h30. Cannes la nuit a des allures de Carré liégeois. Le vomi dans les rues en moins, les tarifs exorbitants en plus. La légende veut que les établissements ressortent une carte  » spécial Mipim « . Celui qui a dépensé 1 890 euros pour l’entrée peut bien s’offrir une bière à 6 euros. Surtout qu’il paie généralement avec la carte de crédit de sa société. Vive les notes de frais !

N.B. : Ne pas confondre les cordons rouges à 1890 euros avec le cordon rouge du journaliste accrédité – pour lui, c’est gratuit – ni avec celui de l’élu ou du partenaire, qui bénéficie d’un prix d’ami à 560 euros.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire