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Influence des entreprises dans les écoles : l’Allemagne s’inquiète

Le Vif

Apprendre le réchauffement climatique avec Volkswagen, comprendre les circuits financiers avec la Deutsche Bank… Des voix s’élèvent en Allemagne pour dénoncer l’influence croissante des entreprises dans les écoles.

L’association Lobbycontrol, qui milite pour une démocratie plus transparente, s’inquiétait récemment dans une étude des « dangers de l’influence des lobbys » sur les écoles allemandes, dès la maternelle. Exercée sous la forme de cours gratuits libres d’accès aux professeurs et aux élèves, ou par des actions de sponsoring, cette ingérence dans l’enseignement constituerait du « bourrage de crâne », selon ce rapport.

En 2006, une étude PISA, référence internationale pour évaluer les systèmes éducatifs, avait pointé un phénomène particulièrement fort en Allemagne. 25% des élèves de plus de 15 ans étaient scolarisés dans des écoles dont le directeur jugeait « considérable » l’influence des entreprises sur les programmes de cours, soit le double du taux moyen dans l’OCDE.

Parmi les nombreux exemples cités par Lobbycontrol: une brochure du groupe automobile Volkswagen sur la protection du climat. L’élève y est invité à entourer les bons réflexes écologiques d’un conducteur de voiture, photo d’un modèle de la marque à l’appui.

Selon une étude récente de l’université d’Augsburg (Bavière), 16 des 20 entreprises les plus puissantes d’Allemagne produisent du matériel d’enseignement. Les lobbys les plus actifs viennent « de la finance, de l’énergie et de l’agroalimentaire », explique Felix Kamella, auteur du rapport de Lobbycontrol, qui cite notamment la compagnie d’assurances Allianz, le cabinet de conseil McKinsey ou le conglomérat énergétique RWE.

« Leurs intérêts sont multiples », explique l’universitaire Reinhold Hedtke, auteur de « L’économie à l’école » et professeur à l’université de Bielefeld (nord-ouest): « leur but, c’est d’améliorer l’image de leur entreprise et de leur branche. C’est particulièrement vrai pour les compagnies d’assurances et les banques, qui ont mauvaise réputation dans la société ». Les entreprises veulent apparaître « comme des acteurs responsables, soucieux de la formation de la jeunesse »,ajoute-t-il.

« Pallier les difficultés financières d’une école »

L’influence de la sphère privée sur l’école aurait « tendance à s’accentuer avec la crise économique et financière » mais elle n’a pas que des conséquences négatives, estime Martina Schmerr du GEW, principal syndicat de l’éducation en Allemagne. En distribuant des cours gratuits et facilement téléchargeables sur Internet, l’entreprise vient aussi « pallier les difficultés financières d’une école ».

« C’est la responsabilité des professeurs de veiller à ce que leurs cours soient le plus exhaustifs possible », affirme Reinhold Hedtke. Selon lui, les entreprises « défendent leurs intérêts avant tout » et ne sont pas tenues « d’être pluralistes ».

« Personne, ni les politiques, ni les syndicats, ni les associations, ne peut investir dans les écoles autant que les entreprises », explique le professeur, « s’il y a un scandale, c’est leur position dominante ».

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