Le parlement grec dans le centre d'Athènes. © Belga - ANDREAS SOLARO

Grèce : « Une Europe centrée sur les procédures »

Economiste, Elena Panaritis a travaillé pour la Banque mondiale et a siégé au Parlement sur les bancs du Pasok de 2009 à 2012. Elle avait été choisie par l’ex-ministre des Finances Yanis Varoufakis, comme représentante de la Grèce au FMI.

L’économiste et ancienne députée socialiste Elena Panaritis avait été choisie par l’ex-ministre des Finances Yanis Varoufakis, comme représentante de la Grèce au FMI. Elle a finalement renoncé à ce poste vu la réaction de membres du parti au pouvoir Syriza : ils ont vu d’un mauvais oeil sa participation, aux côtés du précédent gouvernement, aux négociations sur l’application du premier plan d’aide au pays, en 2011.

Le Vif/L’Express : Que pensez-vous de l’accord intervenu ?

Elena Panaritis : On est loin de la solution win win. J’espère qu’on va pouvoir se mettre au travail, mais je crains que la réalisation de l’accord ne se passe pas sans frictions, y compris dans les autres parlements. Il y a des choses nouvelles qui n’ont pas été discutées auparavant, et plein de diables se sont glissés dans les détails.

Quelles sont les mesures difficiles à accepter ?

Par exemple le fonds où seront transférés les actifs à privatiser. Les privatisations ne sont pas insupportables, mais on ne peut pas vendre pour vendre, sinon ce ne sera jamais au prix voulu ni avec l’investisseur adéquat. Privatiser n’est intéressant que si on veut donner à une économie en dépression un boost de technologie pour la moderniser. Si on privatise trop rapidement, on vend aux pires investisseurs. Il y a cinq ans qu’on privatise et cinq ans qu’on ne trouve pas les bons. Pourquoi ? Parce qu’on n’a pas les bons titres de propriété, les bons cadastres, bref les réglementations nécessaires qui donnent le bon climat d’investissement.

La faute est à qui ?

Peu importe. La faute, c’est qu’on persiste dans l’erreur depuis le début. Alors que toute l’Europe peine depuis 2008 avec une croissance nulle, on voit des personnes qui ne peuvent pas augmenter la croissance chez eux venir nous faire la leçon.

Que pensez-vous de l’attitude de l’Allemagne ?

Les Allemands sont fidèles à eux-mêmes : disciplinés. Ils ne sont pas centrés sur les solutions, mais sur les procédures. On aurait dû nous dire : « Grèce, vous avez une crise, on va trouver une solution pour la surmonter, car elle risque d’avoir un effet domino sur d’autres pays ». Et ensuite mettre des règles. Mais l’Europe manque singulièrement de proactivité, elle attend que les solutions viennent d’ailleurs comme on l’a vu dans les conflits du Kosovo ou de l’Ukraine.

L’Eurozone est-elle une machine à fabriquer de l’austérité ?

Non, c’est une communauté autour d’une monnaie commune, mais qui n’a jamais été au-delà. Or on est confronté non seulement à un problème économique, mais aussi politique, vu que personne ne veut prendre le leadership pour imposer une solution. Autrement dit, le problème économique est devenu encore plus grand, car la solution dépend de gens qui n’existent pas. Et comme si cela ne suffisait pas, on y ajoute des émotions négatives. Du style : « Les Allemands n’aiment pas donner leur argent pour les Grecs ». La Communauté européenne a tout de même été construite pour éviter ce genre de confrontation, non ?

Etes-vous d’accord avec le président du PS belge qui fustige « l’attitude inflexible » du gouvernement belge, qui aurait manqué à son devoir de solidarité avec les Grecs ?

Il a raison. Quand je parle d’émotions, on devient plus primitif, on n’évolue pas, on régresse. J’ai compris que la Belgique n’a pas été très tendre avec nous. On n’est pas solidaire en donnant un poisson ni même en apprenant à pêcher, mais en faisant changer le système pour le rendre encore plus productif.

Y a-t-il une conscience européenne ?

Oui, mais on n’a pas fait grand-chose jusqu’à présent pour la renforcer.

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