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Grèce: Antonis Samaras, l’ancien paria devenu homme providentiel

À 61 ans, Antonis Samaras est le prochain Premier ministre grec

D’ici à mercredi, Antonis Samaras doit former un gouvernement de coalition. Les tractations avec le dirigeant socialiste, Evangélos Vénizélos, et le chef de la gauche modérée, Fotis Kouvelis, continuaient ce mardi.

Qui est le nouveau Premier ministre grec?

Antonis Samaras est issu d’une grande famille grecque: ses ancêtres étaient de riches marchands d’Alexandrie et son arrière grand-mère, Pénélope Delta, une écrivaine célèbre. Dans les années 1970, étudiant en économie au Amherst College, aux États-Unis, il partage la même chambre que l’ancien Premier ministre socialiste, Georges Papandréou. À 26 ans seulement, il rejoint le camp conservateur et devient l’un des plus jeunes députés de la Vouli (Parlement grec). Il monte progressivement les échelons au sein de la Nouvelle Démocratie (droite) et devient ministre des Affaires étrangères en 1989. À l’époque, il est perçu comme l’étoile montante de la droite.

La traversée du désert

En 1992, coup de théâtre: sa position sur la question de la Macédoine provoque son départ anticipé du gouvernement de Constantin Mitsotakis. Selon Antonis Samaras et de nombreux nationalistes grecs, le nom « Macédoine » ne doit pas être attribué au pays issu de l’ex-Yougoslavie, mais à la région du Nord de la Grèce où est né Alexandre le Grand. Suite à cette discorde, la majorité conservatrice au pouvoir s’effondre. L’ambitieux ne se laisse pas pour autant abattre et fonde, la même année, son propre parti :  » Printemps politique « . Aux élections législatives suivantes, il doit admettre son échec cuisant. Antonis Samaras revoit sa stratégie : en 2000, il appelle à voter pour la Nouvelle Démocratie et ne présente pas de candidats.

La renaissance

Grâce à cette décision habile, Antonis Samaras réintègre, quatre ans plus tard, la Nouvelle Démocratie.
Député européen, il est désigné ministre de la Culture, en janvier 2009, et rejoint l’équipe gouvernementale de Constantin Karamanlis. Après la victoire de la gauche aux élections législatives de 2009, Samaras s’engage dans la bataille pour prendre la direction du parti et doit affronter Dora Bakoyannis, ex-ministre des Affaires étrangères et fille de Constantin Mitsotakis, son ancien rival.

La transformation du parti

Antonis Samaras s’empare finalement de la Nouvelle Démocratie en se présentant comme le candidat de la rénovation, non affilié à une des dynasties politiques telles que les Mitsotakis ou les Karamanlis. Sous son leadership, le mouvement s’éloigne du centre et se droitise. En février dernier, lors du vote du second plan de rigueur, il accepte que deux anciens ministres de l’extrême droite (LAOS) exclus, Makis Voridis et Adonis Georgiadis, rejoignent les rangs du parti. Sur l’immigration, en particulier, Samaras n’hésite pas à afficher une ligne dure. « La Grèce a accepté l’invasion des immigrants illégaux. On va stopper cela », avait-il lancé lors de sa campagne. Il envisage d’abolir la loi votée par les socialistes qui permet aux immigrés de seconde génération d’obtenir la nationalité grecque et prône une lutte acharnée contre le crime.
Ses positions droitières ne font pas l’unanimité au sein même du parti. Il compte parmi ses adversaires Dora Bakoyannis et ses alliés.

Le « sauveur »

Antonis Samaras a été, durant des mois, l’une des bêtes noires de l’Europe. En juin 2011, quand il avait refusé de former un gouvernement d’union nationale avec son ancien camarade, Georges Papandréou, les bailleurs de fonds l’avaient vivement critiqué. Il refusait alors de s’impliquer dans la mise en place d’un mémorandum ( mesures d’austérité) dicté par la Troïka (UE-BCE-FMI).

Face au risque de faillite du pays, il s’est résolu à participer, à l’automne dernier, au gouvernement provisoire dirigé par Lucas Papadémos et a voté le second plan de rigueur en février. Il avait d’ailleurs exclu du parti tous les membres qui osaient s’y opposer.
Antonis Samaras avait exigé la tenue d’élections anticipées en échange de sa participation au gouvernement de Lucas Papadémos. Durant toute la campagne, il a réussi à transformer le scrutin en référendum sur l’Euro. Tactique payante. Désormais considéré par les dirigeants européens comme un éventuel « sauveur de l’euro », il se présente comme l’homme providentiel…

Dimanche dernier, dès la publication des résultats, la chancelière allemande, Angela Merkel, l’a appelé pour le féliciter. Berlin a même déclaré être prêt à discuter des délais nécessaires à la mise en oeuvre des réformes. Cela tombe bien: l’étalement du remboursement de la dette était l’une des promesses électorales d’Antonis Samaras. Depuis le Mexique, où se tient la réunion du G20, les présidents de l’Union européenne Herman Van Rompuy et de la Commission européenne José Manuel Barroso ont également salué l’issue du scrutin. Mais le plus dur reste à faire. Après la formation d’un gouvernement de coalition, Samaras devra reprendre les négociations avec les créanciers internationaux et tenter d’obtenir un assouplissement du plan de rigueur. L’abaissement de la tranche d’impôts sur le revenu la plus haute et la création d’emplois font également partie de ses priorités.

Par Marina Rafenberg, L’Express

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