Le Premier Ministre Charles Michel au 15ème sommet de la francophonie à Dakar. © BELGA

Francophonie : « Une fête des élites »

Dépenses de prestige, opacité des marchés, communication déficiente : les voix discordantes s’accumulent à la veille du 15e sommet de la Francophonie, à laquelle participera le Premier ministre Charles Michel.

« Ce sommet est une kermesse, une fête des élites qui vont venir ratifier des colloques qui sont en train d’être faits et qui sont suffisamment relayés dans la presse », dénonce dans le quotidien dakarois L’Observateur Malick Noël Seck, un dissident du Parti socialiste sénégalais. Ce franc-tireur de la politique locale est le coordonnateur d’un « contre-sommet de la francophonie » que les autorités tentent d’empêcher en démarchant les artistes qui devaient s’y produire.

D’autres s’insurgent contre les dépenses de prestige en vue du sommet, à commencer par la construction (financée par la Turquie) d’un nouveau centre de conférence surgi de nulle part à Diamniadio, à 30 kilomètres de la capitale. « Ce qui est inadmissible, c’est qu’au moment où l’Etat dépense des centaines de milliards en construisant le centre de conférence, on note une absence de politique véritable pour l’emploi des jeunes », dénonce Ousmane Mbaye, président de l’association des diplômés sans emplois.

Egalement épinglée, la mainmise de la France, premier contributeur, sur l’Organisation internationale de la Francophonie. « Cette francophonie n’est rien d’autre qu’une forme de colonisation », pétrole l’écrivain Ahmed Khalifa Niasse. Deux exemples sont montrés du doigt dans la presse sénégalaise. « La francophonie roule Peugeot », titrait Le Témoin, qui dévoilait l’achat, pour le sommet, de 50 voitures de luxe au concessionnaire local et sans appel d’offres. L’autre dossier qui fâche concerne le « nébuleux marché » octroyé au Français Richard Attias, patron de Publicis, société spécialisée dans la communication événementielle de haut niveau.

La frustration est d’autant plus grande que la communication connaît quelques sérieux couacs. A l’issue d’une réunion du conseil permanent de la Francophonie en prélude au sommet, les journalistes ont attendu en vain un communiqué, après avoir fait le pied de grue de 10h à 18h. Pour ne pas parler d’informations de base comme le programme et la localisation des diverses activités. Quant à « la francophonie à l’ère du numérique », elle semble encore dans les limbes : les connexions étaient quasi impossibles au « village de la francophonie » érigé aux abords du Théâtre national de Dakar.

Enfin se pose la question fondamentale de la place du français. « Le Sénégal est un pays de plus en plus wolophone. Et de moins en moins francophone », écrit Issa Sall dans Le Témoin. Au parlement national commencera le 2 décembre la traduction simultanée dans les six langues nationales des débats politiques, avec des cabines financées par l’Union européenne. « Le français semble se réduire de plus en plus à langue officielle écrite », conclut l’éditorialiste.

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