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Etats-Unis: ce que l’on sait sur l’attentat déjoué et l’agent double d’al-Qaïda

Les États-Unis ont annoncé avoir déjoué un attentat suicide pour marquer le premier anniversaire de la mort d’Oussama Ben Laden. Que sait-on de l’auteur de l’attentat, de l’artificier, du rôle d’Al-Qaïda au Yémen? Tentatives d’explications. Que s’est-il passé ?

Lundi, les États-Unis ont annoncé avoir déjoué un nouveau projet d’attentat-suicide à la bombe contre un avion de ligne à destination du territoire américain. Celui-ci aurait dû se produire à l’occasion du premier anniversaire de la mort du chef d’Al-Qaïda Oussama ben Laden le 2 mai 2011. L’attentat aurait été préparé par la branche yéménite de l’organisation terroriste, Aqpa.

Les enquêteurs sont en train d’examiner, au laboratoire du FBI à Quantico en Virginie, un engin explosif qui « devait être utilisé par un kamikaze à bord d’un avion de ligne », a expliqué un responsable antiterroriste américain, qui s’exprimait sous couvert de l’anonymat. L’engin disposait d’un nouveau type de détonateur, selon le New York Times.

Mais voilà, le kamikaze qui devait faire exploser la bombe à bord de cet avion à destination des États-Unis était en fait un agent infiltré au sein d’Aqpa par les services secrets saoudiens, qui collaborent avec les services américains dans la lutte contre Al Qaïda, selon la presse américaine. Ces révélations soulèvent de nombreuses questions.

L’infiltration d’Aqpa par les services secrets

Selon les médias américains, les services secrets saoudiens avaient donc infiltré Aqpa. Et l’homme qui s’était porté volontaire pour la mission-suicide était un agent double saoudien explique le New York Times. L’homme s’est enfui avec la bombe qu’il a par la suite remise à ses officiers traitants en Arabie Saoudite. La CIA était au courant de cette affaire, mais ne l’a pas dirigée, selon le quotidien américain. Reste à savoir juqu’à quel point l’opération a été engagée par le vrai-faux terroriste.
Ces dernières semaines, dans le cadre de procès de présumés terroristes sur le territoire américain, les méthodes d’infiltration des services secrets américains ont suscité un malaise certain. En cause, la « tactique de l’aiguillon » (sting), décrite par le Washington Post: Le FBI infiltre des réseaux de terroristes présumés et les aide à monter des opérations, avant d’arrêter leurs auteurs, comme ce suspect d’origine marocaine arrêté par le FBI à deux pas du Capitole, la veste pleine d’explosifs. Selon leurs avocats, ce type d’individus ne seraient peut-être pas passés à l’acte sans le soutien actif apporté par les services secrets.

Ibrahim al-Asiri, l’artificier ingénieux d’Aqpa

Derrière l’attentat déjoué ces derniers jours se profile la figure d’Ibrahim Hassan al-Asiri. Ce saoudien de 31 ans, figure sur la liste des hommes les plus recherchés par l’Arabie saoudite et désormais par les Américains. C’est al-Asiri qui aurait préparé les explosifs utilisés lors de l’attentat déjoué en 2009 sur le vol Amsterdam-Detroit, et dans les colis piégés interceptés dans les aéroports de Dubaï et de Nottingham. Le Saoudien est également soupçonné d’être le responsable de l’attentat perpétré en août 2009 contre le prince Mohamed ben Nayef ben Abdelaziz, vice-ministre de l’Intérieur saoudien chargé de la lutte contre le terrorisme. Al-Asiri avait alors chargé son propre frère de perpétrer l’attentat, en se faisant passer pour un jihadiste repenti pour pouvoir approcher le ministre. Abdullah Asiri est mort dans l’explosion, mais le ministre a survécu.

L’artificier, ancien étudiant en chimie, se cache dans le territoire d’implantation d’Aqpa qui s’étend d’Abyane à la province de Chabwa. Il aurait survécu à l’attaque de drone américaine qui a tué le chef d’Aqpa Anwar Al-Aulaqi en septembre, selon l’agence AP.

Pourquoi AQPA?

Al-Qaïda dans la péninsule arabique (Aqpa) est implanté dans la région d’Aden, l’ancienne capitale du la République du Yémen du Sud. À 30 minutes à peine d’Aden, Zinjibar, la capitale de la province d’Abyane, est carrément aux mains de combattants d’Aqpa depuis près d’un an. La situation dans le Sud du Yémen est particulièrement instable depuis le début de la contestation du régime d’Ali Abdallah Saleh, il y a un an, mais la présence d’Aqpa dans le pays est antérieure au mouvement de révolte contre l’ancien président. Celui-ci utilisait d’ailleurs, vis-à-vis de l’Occident, la carte de la lutte contre le terrorisme pour justifier son maintien au pouvoir.

Les Américains ont mené à de nombreuses reprises des opérations militaires contre Aqpa, notamment l’attaque de drone qui a tué son chef, le yéméno-américain Anwar al-Aulaqi en septembre 2011, et dimanche, le raid contre Fahd al-Quso, recherché pour l’attentat contre l’USS Cole en 2000. Fahd al-Quso était membre de la tribu des Al-Awalaq, celle de l’imam Anwar al-Aulaqi.

Les précédentes tentatives d’Aqpa, en 2009 et 2010

L’attentat déjoué ces derniers jours ressemble dans ces modalités à celui de Noël 2009 contre la ligne Détroit-Amsterdam. Le Nigerian Umar Farouk Abdulmutallab était parvenu à embarquer avec 80 grammes de penthrite au départ d’Amsterdam à bord d’un Airbus américain. Les explosifs dissimulés dans ses sous-vêtements avaient pris feu, et il avait été maîtrisé par des passagers. La tentative d’attentat avait été revendiquée par Aqpa.
En 2010, deux colis piégés, partis du Yémen dans des colis FedEx et UPS, à destination des États-Unis, étaient interceptés en octobre 2010, l’un à l’aéroport de Dubaï, l’autre à l’aéroport anglais d’East Midlands, près de Nottingham. Les deux engins auraient pu exploser en plein vol s’ils n’avaient pas été interceptés à temps. Cette fois, le mélange de penthrite et de plomb était dissimulé dans une imprimante d’ordinateur. Ils étaient « doté d’un circuit électrique relié à une carte de téléphone portable cachée dans l’imprimante », selon la police.

LeVif.be avec L’Express

La penthrite

Dans le cas de la tentative d’attentat de 2009, la technique consistait à mélanger la poudre explosive avec un liquide à l’aide d’une seringue. Les 80 g de PETN (tétranitrate de pentaérythritol, ou « penthrite ») avaient été cousus dans les sous-vêtements d’Abdulmutallab. Indétectable aux rayons X, la pentrite est et inodore, et ne peut donc pas être repérée par des chiens de la repérer, mais quelques dizaines de grammes suffisent à faire exploser un avion. Toutefois, des machines plus perfectionnées -mais plus onéreuses et absentes de nombreux aéroports- peuvent la détecter.

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