Pour le président turc, l'enjeu économique, et donc la relation avec l'Union européenne, sont essentiels. © reuters

Erdogan à l’Occident: « Mêlez-vous de vos affaires ! », 17 journalistes emprisonnés

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a appelé vendredi l’Union européenne et les Etats-Unis à « se mêler de leurs affaires », après les critiques des Occidentaux contre les vastes purges qui ont suivi le coup d’Etat raté du 15 juillet.

« Certains nous donnent des conseils. Ils se disent inquiets. Mêlez-vous de vos affaires!  » a déclaré M. Erdogan depuis le palais présidentiel à Ankara.

Le chef de l’Etat turc a regretté qu’aucun représentant occidental ne soit venu en Turquie après le coup d’Etat.

« Ces pays dont les leaders ne sont pas inquiets pour la démocratie turque, ni pour la vie de nos citoyens et leur avenir alors qu’ils sont tellement préoccupés par le sort des putschistes, ne peuvent pas être nos amis », a-t-il ajouté.

Il a précisé que dans un geste de bonne volonté il abandonnait des centaines de poursuites en justice lancées contre des personnes accusées de l’avoir insulté.

Un des leaders de l’opposition est notamment poursuivi pour insulte ainsi qu’environ 2.000 autres personnes, selon des chiffres officiels.

Dix-sept journalistes en détention préventive

Un tribunal turc a par ailleurs ordonné samedi le placement en détention préventive de 17 journalistes accusés de liens avec le prédicateur exilé aux Etats-Unis Fethullah Gülen, qu’Ankara désigne comme le commanditaire du putsch raté, a rapporté l’agence de presse Anadolu.

Les dix-sept journalistes sont poursuivis pour appartenance à « un groupe terroriste ». Vingt-et-un d’entre eux comparaissaient vendredi, dix-sept ont été écroués et quatre remis en liberté.

Parmi les reporters mis derrière les barreaux figure Nazli Ilicak, ancienne députée, licenciée du quotidien progouvernemental Sabah en 2013 après avoir critiqué des ministres empêtrés dans un scandale de corruption, orchestré, selon Ankara, par Gülen.

Bulent Mumay, ancien éditeur du quotidien Hurriyet et figure connue du monde des médias, a en revanche été remis en liberté.

Les médias sont en première ligne des vastes purges en cours en Turquie après le coup d’Etat avorté du 15 juillet qui avait fait vaciller le pouvoir islamo-conservateur du président Recep Tayyip Erdogan. Plus de 130 médias ont été fermés par le gouvernement cette semaine et près de 90 mandats d’arrêts émis contre des journalistes, des mesures très critiquées par les ONG de défense des droits de l’Homme.

A ce jour, plus de 18.000 personnes ont été mises en garde à vue à un moment donné à la suite du putsch. Près de 10.000 d’entre elles sont poursuivies et placées en détention préventive, a dit le ministre de l’Intérieur turc vendredi, et 3.500 ont été libérées.

L’Union européenne a mis en garde implicitement la Turquie contre un gel des négociations d’adhésion du pays à l’UE si les poursuites contre les putschistes ne se font pas dans le respect de l’Etat de droit.

Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a été un pas plus loin, estimant que l’accord entre l’UE et la Turquie pour freiner l’afflux de réfugiés en Europe de l’Ouest risquait de capoter, dans un entretien à paraître samedi dans le quotidien autrichien Kurier.

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