Lenin Moreno © Reuters

Equateur: une présidentielle déterminante pour la gauche… et Julian Assange

Le Vif

Avec l’élection présidentielle de dimanche en Equateur ne se joue pas seulement l’avenir de ce pays andin producteur de pétrole, mais aussi le sort de Julian Assange, fondateur de WikiLeaks, et la position d’une gauche affaiblie en Amérique latine.

Le second tour de scrutin oppose un socialiste, Lenin Moreno, dauphin du charismatique mais polémique président sortant Rafael Correa, à un ex-banquier conservateur, Guillermo Lasso.

Epreuve pour la gauche

Ce dernier round de la présidentielle se déroule sur fond de crise économique et d’accusations de corruption contre l’actuel gouvernement. Son issue pourrait faire pencher la balance à droite, comme en Argentine, au Brésil et au Pérou, et renforcer la « restauration conservatrice » dénoncée par les partisans de Rafael Correa.

Si Lenin Moreno « ne l’emporte pas, ce sera un signal clair qu’il y a un changement idéologique dans la région », estime Katalina Barreiro, de l’Institut des hautes études nationales (Iaen).

Selon cette analyste, une victoire du candidat de droite impliquerait la « mort » du processus de « Révolution citoyenne » impulsé par M. Correa, économiste de 53 ans qui, depuis son arrivée au pouvoir en 2007, a présidé la décennie la plus stable politiquement de l’histoire récente du pays.

« Quand les leaders de tels processus +meurent+, il y a une grande probabilité que ces processus soient interrompus. Et +mourir+ peut être ce changement à droite », ajoute-t-elle.

D’autres analystes estiment cependant qu’un triomphe de M. Lasso ne se traduirait pas pour autant par la fin de la vague progressiste en Amérique latine.

« Nous sommes dans une époque de virage, où il y a un affaiblissement de l’hégémonie des gouvernements progressistes. Cela ne veut pas dire qu’ils soient finis », juge Napoleon Saltos, politologue de l’Université Centrale.

Assange, invité encombrant

Le résultat de l’élection pourrait en revanche être décisif pour le fondateur du site internet WikiLeaks, réfugié à l’ambassade équatorienne de Londres depuis juin 2012 pour échapper à un mandat d’arrêt européen.

Le jugeant en danger pour avoir publié des documents américains confidentiels, M. Correa lui avait accordé l’asile afin d’éviter l’extradition de Julian Assange vers la Suède, où il est par ailleurs accusé d’un viol qu’il a toujours nié.

M. Correa a dénoncé la « capitulation » de la droite équatorienne face aux Etats-Unis, pays où l’Australien risque de lourdes peines pour la diffusion de documents confidentiels militaires et diplomatiques, notamment sur les guerres en Irak et en Afghanistan.

Si Lenin Moreno est partisan de maintenir la protection du fondateur de WikiLeaks, il n’en va pas de même de Guillermo Lasso.

« L’Equateur est un pays qui respecte les droits humains et la décision que nous avons prise est que M. Assange reste dans l’ambassade tant qu’un sauf-conduit ne lui aura pas été accordé pour gagner (…) le pays de son choix », a déclaré M. Moreno.

M. Lasso affirmait pour sa part en février que « dans le cadre des droits humains et du respect du droit international », il ferait en sorte « que M. Assange quitte l’ambassade (…) dans un délai de 30 jours après le début de (son) gouvernement ». « L’ambassade d’Equateur n’est pas un hôtel », avait-il argué.

Pour Mme Bareiro, « la présence d’Assange à l’ambassade est un symbole supplémentaire d’une position ferme du gouvernement (…) surtout de Correa ».

Son éviction traduirait un changement de stratégie diplomatique envers la Suède, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, qui a refusé d’accorder un sauf-conduit au fondateur de WikiLeaks.

En janvier, Julian Assange, 45 ans, s’est toutefois déclaré prêt à comparaître devant la justice américaine, si ses « droits sont garantis ».

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