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Elections : une Italie potentiellement ingouvernable

Ils ont changé les règles, probablement pas l’issue du scrutin. Malgré la modification de la loi électorale, l’Italie se dirige vers le même scénario qu’en 2013 au lendemain des élections législatives: trois blocs qui revendiquent la légitimité de composer un gouvernement, mais sans la majorité nécessaire pour gouverner. Une recomposition politique sera sans doute nécessaire, sous peine de retour aux urnes.

C’est l’étrange particularité de la nouvelle loi électorale, le « Rosatellum », un complexe mélange de scrutin majoritaire et de système proportionnel. Théoriquement, les trois principales listes électorales pourraient revendiquer la victoire: le centre droit allié à l’extrême droite en tête des résultats grâce à une coalition tripartite (Forza Italia de Silvio Berlusconi, la Ligue du Nord de Matteo Salvini et Fratelli d’Italia de Giorgia Meloni), le Mouvement 5 Etoiles comme premier parti et le Parti démocrate avec le plus grand nombre de parlementaires.

Tous vainqueurs donc, et tous incapables de se parer d’une majorité parlementaire sans s’allier avec un adversaire. « C’est vrai qu’il faudrait plus de 40% des voix pour avoir une majorité au Sénat et à la Chambre », calcule Marc Lazar, professeur à Sciences Po à Paris et à la LUISS (Libera Università Internazionale degli Studi Sociali) de Rome. « Le centre droit semble porté par une dynamique, on ne peut pas exclure sa victoire. Mais s’il n’y a pas de majorité claire, il faudra trouver une solution. »

Selon le politologue, trois scénarios se dégagent actuellement pour l’après-scrutin si les sondages se confirment. Un gouvernement technique temporaire, comme avec Mario Monti en 2011, pour modifier la loi électorale ou préparer un nouveau scrutin, un « gouvernement du président de la République » avec une large coalition mandatée pour un nombre limité de réformes – mais l’actuel président Sergio Mattarella l’exclut pour le moment -, ou une recomposition de l’échiquier politique avec une union nationale entre le Parti démocrate et Forza Italia.

De nombreux observateurs considèrent cette dernière solution comme la plus plausible. Elle s’était d’ailleurs déjà produite lors des élections législatives en 2013, après deux mois d’impasse, lorsque Silvio Berlusconi avait accepté d’intégrer le gouvernement d’Enrico Letta (PD). Plongés dans la campagne électorale, Matteo Renzi et l’ex-Cavaliere rejettent catégoriquement une éventuelle union mais ce dernier a cependant refusé de signer le pacte anti-alliances que lui proposaient ses partenaires de coalition. Un signe?

« Une union avec Renzi pourrait lui faire gagner du temps en espérant que la Cour européenne des droits de l’homme annule son inéligibilité (Silvio Berlusconi a déposé un recours après sa condamnation pour fraude fiscale, ndlr) et lui permettre de se présenter plus tard », ajoute Marc Lazar. « Mais comme partout en Europe, l’issue de l’élection reste imprévisible. En 2013, une proportion très importante s’est décidée au cours de la campagne, 13% le jour du vote. »

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