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Élections en Russe: 7 candidats face à Poutine et 5 choses à retenir

Le Vif

Les Russes votent le 18 mars pour la présidentielle à l’issue d’une campagne qui, faute de suspense, aura donné lieu à peu de moments marquants.

Trois minutes de campagne pour Poutine

Vladimir Poutine, au pouvoir depuis plus de 18 ans, a évité toute campagne directe, refusant de participer aux débats télévisés et se passant de meetings électoraux.

Une seule manifestation d’ampleur pour le candidat Poutine a été organisée par son équipe de campagne. Le 3 mars, dans le stade de Loujniki, des athlètes olympiques, des stars de la chanson et des cosmonautes se sont succédé sur scène pour exprimer leur soutien au président sortant devant environ 80.000 personnes.

M. Poutine, qui s’était enrhumé en février, est venu saluer ses partisans réunis par -15 degrés Celsius. Résultat: trois minutes d’intervention pendant lesquelles il promet des « victoires brillantes » pour la Russie et entonne l’hymne national avec la foule.

Il reste pourtant omniprésent à la télévision publique qui couvre ses déplacements de chef d’Etat donnant lieu à des discours devant des scientifiques, des policiers ou des ouvriers.

Poutine sort ses missiles

L’adresse annuelle de M. Poutine au Parlement, tenue d’habitude en décembre, a été cette fois reportée au 1er mars, se transformant de fait en discours préélectoral. La plus grande partie de son intervention a été consacrée aux nouvelles armes russes, notamment des missiles « invincibles » pour les boucliers antimissiles des Etats-Unis, et accompagnée de vidéos et images de synthèse diffusées sur écrans géants.

Présentant avec fierté un nouveau système de défense antimissiles, un drone sous-marin à propulsion nucléaire ou encore une arme laser « dont il est trop tôt pour évoquer les détails », M. Poutine a prévenu les Occidentaux: il faut désormais « écouter » la Russie, s’attirant une ovation des parlementaires.

Verre d’eau

En l’absence de Vladimir Poutine, les débats ont peu passionné les Russes, qui en ont retenu surtout un échange musclé.

Traitée de « connasse » par l’ultranationaliste Vladimir Jirinovski, 71 ans, la candidate proche de l’opposition libérale, Ksenia Sobtchak, 36 ans, lui a jeté un verre d’eau à la figure.

Furieux, ce candidat traditionnel du parti d’extrême droite LDPR a alors fait abattre une nouvelle pluie d’insultes sur l’ancienne vedette de téléréalité, la qualifiant de « prostituée ».

Quelques jours après, Mme Sobtchak a affirmé avoir été agressée à Moscou par un homme, qui l’a bousculée et aspergée d’eau, en criant « c’est pour Jirinovski ».

L’or du communiste

Le parti communiste a créé la surprise en désignant comme candidat un homme d’affaires, millionnaire, Pavel Groudinine, à la place de l’indéboulonnable Guennadi Ziouganov.

L’intérêt qu’il a suscité et sa progression dans les sondages lui ont valu de nombreux articles de presse hostiles dans la presse pro-Kremlin qui a multiplié les révélations sur les comptes bancaires à l’étranger du patron du « Sovkhoze Lénine » qui produit fruits et produits laitiers en banlieue de Moscou.

Début mars, la Commission électorale a annoncé avoir découvert que le 31 décembre 2017, M. Groudinine avait encore 13 comptes bancaires en Suisse comportant près d’un million d’euros ainsi que de l’or, soulignant ne pas avoir de preuves de leurs fermetures.

Le Parti communiste russe et son candidat ont dénoncé à plusieurs reprises une « campagne de dénigrement », menée par le Kremlin.

Selon certains analystes, cette campagne s’explique par des craintes des autorités que Pavel Groudinine, crédité d’environ 7% des intentions de vote, puisse réaliser un bon score à la présidentielle.

Boycott et perquisitions

L’opposant numéro un au Kremlin, Alexeï Navalny a été déclaré inéligible en raison d’une condamnation en justice et ne cesse depuis de dénoncer la « supercherie » des élections.

Il appelle au boycott du scrutin et veut envoyer des observateurs traquer d’éventuelles fraudes dans les bureaux de vote. Cette stratégie a rendu encore plus cruciale la préoccupation du Kremlin d’assurer une participation élevée à une élection sans suspense.

Les équipes de l’opposant, qui a fait descendre dans la rue l’an dernier des dizaines de milliers de jeunes, ont été visées par de multiples perquisitions et certains de ses proches ont passé une partie de la campagne derrière les barreaux.

Sept candidats se prêtent au jeu face à Poutine

Le président russe Vladimir Poutine sera opposé à sept candidats. Mais les concurrents du chef du Kremlin ont peu de chance d’évincer le leader russe de longue date qui reste populaire, avec un peu plus de 70% des intentions de vote à quelques jours de l’élection.

Ksenia Sobtchak, la benjamine « contre tous » (Grani)

La journaliste star d’une chaîne de télévision indépendante et ancienne vedette de la téléréalité, Ksenia Sobtchak, âgée de 36 ans, se présente comme une opposante au président Vladimir Poutine et aux candidats ‘du passé’, sous le slogan « contre tous ». Elle souhaite insuffler un nouvel élan libéral à la Russie. Soutien de l’opposant du Kremlin Alexey Navalny déclaré inéligible jusqu’en 2028 par la commission électorale, elle avait affirmé qu’elle retirerait sa candidature s’il était à nouveau apte à concourir. Ksenia Sobtchak est l’unique candidate à avoir tenu des propos durs à l’encontre du chef du Kremlin, qualifiant notamment l’annexion de la Crimée de « violation du droit international » et dénonçant les 18 années de M. Poutine au pouvoir. Enfin, elle représente une génération plus jeune de Russes qui ont grandi après la chute de l’URSS, malgré qu’elle soit perçue par certains comme une ‘Paris Hilton russe’, issue de la jeunesse dorée. Son omniprésence sur les réseaux sociaux lui apporte également le soutien d’une population plus jeune et plus critique envers le régime. En tant que fille de l’ancien maire de Saint-Pétersbourg, Anatoli Sotchak, mentor en politique de Vladimir Poutine, sa candidature a également suscité la polémique sur un autre plan: certains experts et personnalités politiques, dont M. Navalny, estiment, en effet, que son implication dans la course à la présidentielle contribuera à augmenter le taux de participation et rendra la victoire de Vladimir Poutine plus impressionnante. D’autres pensent que cette candidature pourrait entraver les appels d’Alexey Navalny à boycotter le scrutin présidentiel et diviser les rangs de l’opposition. Elle a toutefois rejeté fermement toute collusion avec le Kremlin.

Ksenia Sobtchak est créditée de 1,1% des intentions de vote, selon les derniers chiffres présentés en début mars par l’institut de sondage VTsIOM.

Vladimir Jirinovski, l’ultranationaliste (LDPR)

Le président du parti libéral-démocrate de Russie (LDPR), âgé de 71 ans, est connu pour ses positions ultranationalistes et xénophobes, mais aussi ses propos virulents, voire déplacés. Il a ainsi copieusement insulté la candidate Ksenia Sobtchak lors d’un débat préélectoral à la mi-février, ou encore proposé de contrôler la natalité dans la région du Caucase russe dans le cadre de la lutte antiterroriste. Il concourt pour la sixième fois à l’élection présidentielle russe. Même s’il s’adresse à une frange d’électeurs nationalistes avec ses idées populistes, il a toujours soutenu Poutine et son parti au parlement. M. Jirinovski a invariablement voté en accord avec les souhaits du Kremlin. Il a remporté un peu plus de 6% du vote présidentiel en 2012.

Il est crédité de 5,6% d’intentions de vote dans cette nouvelle course à la présidence.

Grigory Iavlinski, le libéral critique du Kremlin (Iabloko)

L’expert économique libéral de 65 ans s’est présenté à deux reprises à l’élection présidentielle russe en 1996 et en 2000. Il s’est à nouveau porté candidat contre Vladimir Poutine en 2012, mais la commission électorale centrale avait refusé de l’enregistrer comme candidat au motif d’irrégularités dans la collecte de ses deux millions de signatures de soutien. M. Iavlinsky dénonce les politiques du Kremlin et critique fréquemment le président Poutine, appelant à davantage de libertés politiques et à une évolution économique plus libérale. Sa base de soutien compte un nombre relativement faible d’électeurs d’âge mûr et libéraux issus des grandes villes russes. Le candidat libéral est également le co-fondateur du parti Iabloko, créé en 1993. Il en a ensuite abandonné la présidence en 2008, tout en restant membre du parti.

Il est crédité de 1% d’intentions de votes.

Pavel Groudinine, pour un renouveau du Parti Communiste (Parti Communiste de la Fédération de Russie)

Le candidat du Parti Communiste, âgé de 57 ans, est le directeur du Sovkhoze Lénine, une ancienne ferme d’Etat privatisée, située en périphérie de Moscou. Le millionnaire également surnommé ‘le roi de la fraise’ est l’un des concurrents les plus populaires de Vladimir Poutine, avec 7,1% d’intentions de vote. Mais il reste largement derrière le président russe qui est crédité de près de 69,7% des intentions de vote. Il prône lors de sa campagne électorale le succès de son entreprise agroaliemntaire florissante et assure travailler au bien-être de ses employés. Jusqu’en 2010, Pavel Grudinine était membre du principal parti du Kremlin, Russie Unie. Il a d’ailleurs participé à la campagne de Vladimir Poutine en 2000. Il a ouvertement critiqué le système politique et économique actuel de la Russie, mais a évité de critiquer M. Poutine. Sa nomination a été considérée comme une tentative par les communistes d’élargir l’attrait du parti au-delà des électeurs âgés et nostalgiques de l’Union soviétique.

Boris Titov, le candidat pro-business (Parti de la croissance)

Homme d’affaires et ombudsman des entrepreneurs auprès du Kremlin, Boris Titov, âgé de 57 ans, est candidat à la présidence pour la première fois. Il est le fondateur du libéral et conservateur Parti de la croissance. Il souhaite travailler au développement des PME, ainsi qu’au renouveau du modèle de la croissance dans le pays.

Il est crédité de 0,3% d’intentions de vote.

Sergueï Babourine, le conservateur (Union nationale russe)

Sergueï Babourine, âgé de 59 ans, préside l’Union nationale russe, parti politique nationaliste et conservateur, dont il est le candidat. Cet avocat a joué un rôle important dans la politique russe dans les années 1990, s’opposant à la dissolution de l’Union soviétique en 1991 et devenant l’un des leaders de la rébellion du parlement contre le président Boris Eltsine en 1993. Il a également été vice-président de la Douma en 2004.

Il est crédité de 0,2% d’intentions de vote.

Maxime Souraïkine, le candidat d’un communisme conservateur (Communistes de Russie)

L’homme politique de 39 ans a été présenté par le parti ‘Communistes de Russie’, un groupe marginal qui se présente comme une alternative au principal parti communiste. Il a été formé en tant qu’ingénieur informatique et est aujourd’hui le président de son parti. Il a également été membre du Parti communiste de la Fédération de Russie, dont il s’est retiré en 2004. M. Souraïne a été à l’origine, en 1998, de la relance du Komsomol, l’organisation des jeunesses communistes.

Il est crédité de 0,3% d’intentions de vote.

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