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Elections au Rwanda : score stalinien pour Kagamé

Le président rwandais Paul Kagamé, au pouvoir depuis le génocide de 1994, a triomphalement remporté l’élection présidentielle avec 93% des voix. Il est donc reconduit à la tête de son pays pour sept ans. Vu par ses admirateurs comme un visionnaire et par ses détracteurs comme un despote, Kagamé suscite toujours la polémique.

Le chef de l’Etat sortant à la tête du Front Patriotique Rwandais (FPR) « a rassemblé 4.638.560 votes en sa faveur, soit 93,08% des bulletins exprimés », a annoncé mercredi la Commission électorale nationale (NEC). Le taux de participation a atteint 97,51%, selon les « résultats complets » de la NEC portant sur les trente districts du pays.

« Prédateur de la liberté »

Pour cette seconde élection présidentielle depuis les massacres, M. Kagamé était opposé à trois candidats qui l’avaient soutenu en 2003. Trois partis récemment apparus dont deux non reconnus par les autorités étaient de facto exclus du vote et ont dénoncé une « farce électorale ».

Ses opposants, pour la plupart en exil, et les organisations de défense des droits de l’homme dénoncent régulièrement le caractère répressif et autoritaire du régime du FPR. Human Rights Watch (HRW) déplore ainsi « la répression persistante des droits civils et politiques » et les « restrictions de la liberté d’expression, susceptible d’affecter la stabilité du pays à long terme ». Cette réélection triomphale alimentera sans doute encore un peu plus les critiques contre le président Kagamé. Certains de ses anciens collaborateurs le dénoncent aujourd’hui comme un « dictateur » et appellent à le renverser.

« L’homme qui construit »

Mais Kagamé rejette toujours avec mépris les critiques qui l’accusent du manque de liberté d’expression et d’opinion au Rwanda. « C’est un autoritaire qui s’assume », selon Philip Gourevitch, auteur d’un livre de référence sur le Rwanda. Tous ceux qui ont fréquenté l’homme fort du « nouveau Rwanda » le décrivent comme une personnalité hors du commun. L’universitaire français Gérard Prunier souligne son « intelligence et son impitoyable détermination ». La deuxième guerre congolaise de 1998-2003 a été un tournant, explique-t-il: « avant 1998, Kagamé pouvait compter sur la sympathie illimitée de la communauté internationale, qui se sentait coupable de son inaction pendant le génocide. Mais son crédit moral a été sérieusement entamé par les horreurs commises en République démocratique du Congo. »

Kagamé a compris que la pauvreté est due à l’exclusion des réseaux internationaux. Selon lui, la pauvreté détruit la confiance, la tolérance et l’espoir d’une vie meilleure. Durant sa campagne, Kagamé a mobilisé des centaines de milliers de Rwandais et mis en avant les progrès socio-économiques du Rwanda depuis seize ans, promettant de « poursuivre la bataille pour le développement, la paix et l’unité du paix ».

Difficile donc de percer ce personnage austère qui se soucie peu d’être considéré comme un criminel par certains et préfère se concentrer sur son second et, a priori dernier mandat, d’après la constitution rwandaise.


Le Vif.be, avec Belga

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