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DSK peut-il éviter la condamnation ?

Libéré sous caution, Dominique Strauss-Kahn doit définir sa stratégie de défense. Pour le moment, il plaide non-coupable… Risqué.

Même s’il va sortir de la prison de Rikers Island ce vendredi, le cauchemar de Dominique Strauss-Kahn est loin d’être terminé. La prochaine étape, pour l’ancien directeur général du FMI, formellement inculpé de tentative de viol et de six autres chefs d’accusation, aura lieu le 6 juin. C’est à cette occasion qu’il devra plaider coupable, ou non coupable. Ses avocats américains, William Taylor et Benjamin Brafman, ont déjà annoncé qu’il allait plaider non coupable.

Plaider non coupable, ça veut dire quoi?

Cela signifie que DSK nie les faits qui lui sont reprochés. Et que, pour le moment, il est déterminé à aller au procès, inévitable dans ce cas. La date de ce procès ne sera sans doute pas annoncée à l’audience du 6 juin, mais il n’aura pas lieu avant plusieurs mois, voire l’année prochaine. Le temps pour l’accusation et pour la défense de préparer leurs arguments. A ce stade de la procédure, plaider coupable est relativement fréquent. Mais si DSK persistait dans cette stratégie, cela représenterait un risque important. D’abord parce que, d’ici au procès, DSK restera assigné à résidence à New York. Ensuite parce qu’il met son sort entre les mains d’un jury qui peut le condamner à une peine très lourde. Ce coup de poker peut fonctionner. Après quinze mois de procès, Michael Jackson, accusé d’abus sexuel sur mineur, avait ainsi été jugé innocent. Mais un procès pourrait aussi envoyer DSK finir sa vie derrière les barreaux, puisqu’il risque, théoriquement, jusqu’à 74 ans de prison.

Peut-il éviter une peine aussi lourde?

Oui… en évitant le procès, ce qui ouvrirait la voie à une négociation avec la justice américaine. C’est très fréquent, puisque seuls 10% des affaires criminelles aboutissent à un procès dans l’Etat de New York. Mais cela oblige DSK à plaider coupable sur une partie des chefs d’accusation, les moins graves, et à nier la « tentative de viol au premier degré » et « l’agression sexuelle au premier degré », punissables respectivement de 15 et 7 ans de prison.

Le procureur sera-t-il vraiment prêt à négocier?

Le procureur, ou « district attorney », est un homme qui instruit à charge, et c’est un homme qui est élu par le peuple. Il peut tirer de cette affaire DSK un « gain politique phénoménal », selon Arthur Dethomas, avocat aux barreaux de Paris et de New York, interrogé par Le Monde, pour qui « DSK aura face à lui quelqu’un de déterminé ». Une analyse corroborée par Bradley Simon, avocat et ancien procureur fédéral adjoint, qui nuance toutefois en rappelant que « les éléments nouveaux peuvent aussi lui faire craindre un échec au procès ». « Les cas d’agressions sexuelles sont très difficiles à prouver, selon Brenda Smith, professeur à la faculté de droit de l’Université américaine à Washington, citée par l’AFP. L’une des principales raisons est qu’il y a très rarement des témoins ». Certains experts du droit pénal estiment que, même si la fellation est prouvée, il est très difficile de démontrer que cet acte a été forcé. Cela peut inciter le procureur à accepter une négociation. Si c’est le cas, le procès est annulé. Et le juge décide de la peine infligée.

DSK peut-il négocier directement avec la victime pour éviter les incertitudes de la justice?

A priori, non. « Dans la procédure pénale américaine, la victime devient un témoin du procès, et c’est l’Etat qui poursuit en justice l’accusé, rappelle Slate.fr. Même si la victime ne veut pas/plus y participer, un juge peut lui ordonner de témoigner ». Si Nafissatou Diallo, alias « Ophélia », qui n’a d’ailleurs toujours pas porté plainte formellement, décidait de retirer sa plainte, elle pourrait même être accusée d’entrave à la justice, « surtout si le procureur soupçonne qu’elle a perçu de l’argent pour se rétracter », selon Bradley Simon. Si la négociation entre le procureur et les avocats de DSK aboutit, la victime peut aller au civil pour réclamer une réparation financière.

Par Thomas Bronnec, L’Express.fr

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