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Des Saoudiennes « fières » d’être élues pour la première fois

Le Vif

Au moins 14 Saoudiennes ont été élues aux premières élections ouvertes aux femmes dans ce royaume ultra-conservateur où elles restent soumises à de nombreuses restrictions, selon des résultats communiqués dimanche.

« Même s’il n’y en avait eu qu’une, nous aurions été fières. Franchement, nous n’attendions aucune victoire », s’est félicité Sahar Hassan Nassif, militante féministe de la région de Jeddah (ouest).

Ces candidates ont été élues samedi lors de municipales considérées comme historiques car l’Arabie saoudite était le dernier pays au monde à dénier à ses citoyennes le droit de voter ou de se porter candidate à un scrutin.

Mais avec 2.106 sièges à pourvoir dans les 284 conseils municipaux, des assemblées aux pouvoirs limités qui sont les seules dans le royaume à inclure des représentants élus, ces 13 femmes représentent moins de 1% des élus.

« Nous avons besoin de plus » de femmes, a déclaré Aljazi al-Hossaini, qui a été vaincue à Diriyah, une localité à la périphérie de Ryad, selon la chaîne Al-Ekhbaria. Elle a souhaité que des femmes soient choisies parmi les personnes que doit désigner le ministère des Affaires municipales pour pourvoir un tiers des sièges.

La première femme dont la victoire a été annoncée a été élue au Conseil municipal de la petite localité bédouine de Madrakah, dans la région de La Mecque. Salma bent Hizab al-Oteibi a triomphé face à sept hommes et deux femmes.

« Toute ma vie a été une lutte », a déclaré à l’AFP cette institutrice.

Une autre candidate, Hanouf bent Moufreh ben Ayed al-Hazmi, a été élue dans la région de Jawf (nord-ouest) et Sanna Abdellatif Hamam et Maasouma Abdelmohsen al-Rida l’ont été dans la région d’Ihsaa (sud-est), tandis que la capitale Ryad a vu l’élection de trois femmes, selon l’agence officielle SPA. Par ailleurs, deux candidates ont remporté des sièges dans la province de Tabbouk (nord-ouest).

« Porter la voix des femmes »

Khadra al-Moubarak, de la ville côtière de Qatif, a confirmé à l’AFP qu’elle figurait parmi les femmes élues.

« Je serai en contact avec la société, les femmes en particulier, pour porter leurs voix et transmettre leurs demandes au Conseil. Je promets de les représenter par tous les moyens », a dit Mme Moubarak, l’une des deux candidates élues dans la région Orientale du royaume.

Trois femmes ont été élues dans le sud du pays également, une dans la région de Jazane et deux autres dont Lama al-Souleimane à Jeddah, deuxième ville d’Arabie saoudite, selon SPA.

L’Arabie saoudite, monarchie absolue régie par une version rigoriste de l’islam, est l’un des pays les plus restrictifs au monde pour les femmes: elles n’ont pas le droit de conduire et doivent obtenir l’accord d’un homme – un tuteur – pour travailler ou voyager.

Pour aller voter samedi, de nombreuses femmes n’ont eu d’autre choix que d’être emmenées en voiture par un chauffeur ou un membre masculin de leur famille. La ségrégation des sexes était aussi de mise dans les bureaux de vote.

Parmi les 6.440 candidats figuraient plus de 900 femmes qui ont dû surmonter de nombreux obstacles pour participer à ces élections. Par exemple, elles n’ont jamais pu rencontrer les électeurs de sexe masculin face-à-face.

Une bonne partie de la campagne s’est déroulée sur les réseaux sociaux, l’Arabie saoudite étant l’un des pays au monde où l’on compte le plus grand nombre d’utilisateurs par rapport à la population.

Le jour du scrutin, certaines femmes ont posté leur photo le visage découvert, alors que, dans les rues, elles étaient, en très grande majorité, voilées et vêtues de la traditionnelle abaya noire couvrant leur corps de la tête aux pieds.

Elles « vont vous surprendre »

Selon des chiffres officiels, près de 1,5 million de personnes âgées de 18 ans et plus étaient inscrites pour voter, dont environ 119.000 femmes.

La participation des femmes a atteint 80% dans certaines parties du pays, bien au-delà du taux parmi les hommes, selon des conclusions basées sur des chiffres officiels.

Des électrices, émues et parfois en larmes, ont souligné qu’elles étaient heureuses d’avoir enfin pu faire une chose qu’elles voyaient seulement jusqu’ici à la télévision.

Nassima al-Sadah, féministe de la ville de Qatif (est), a salué dans un tweet « une victoire pour tout le monde ». « Je vous l’avais dit depuis des mois: les femmes vont vous surprendre! ».

Le roi Abdallah, prédécesseur de l’actuel souverain Salmane, avait initié une ouverture en accordant en 2011 aux Saoudiennes le droit de vote et d’éligibilité.

Avant les élections de samedi, Human Rights Watch avait salué le scrutin, tout en soulignant que « l’Arabie saoudite continue de discriminer les femmes à travers une myriade de lois, de politiques et de pratiques ».

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