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Des prêtres réformistes font trembler l’église catholique

L’appel à la désobéissance d’un groupe de prêtres autrichiens rencontre un large écho dans l’opinion. Parmi leurs revendications, l’ordination des femmes et des personnes mariées. Ils demandent aussi de permettre aux pratiquants non ordonnés de prononcer des sermons et de diriger des paroisses, pour pallier la crise des vocations.

Un appel à la désobéissance d’un groupe de prêtres autrichiens avides de réformes rencontre un large soutien dans l’opinion et met en émoi une église catholique déjà fragilisée par le départ en masse de ses fidèles après les scandales d’abus sexuels.

Selon un récent sondage, près des trois quarts des Autrichiens estiment « justes » les revendications de ces prêtres qui bravent la loi de Rome et l’autorité du Pape. « A chaque messe, nous intercéderons désormais en faveur d’une réforme de l’église », déclarent-ils dans leur appel lancé en juin.

L’ordination des femmes et des personnes mariées

Parmi leurs autres revendications, l’ordination des femmes et des personnes mariées, deux grands tabous de l’église. Ils préconisent aussi la communion aux personnes divorcées et demandent de permettre aux pratiquants non ordonnés, hommes comme femmes, de prononcer des sermons et de diriger des paroisses, pour pallier la crise des vocations.

Environ 330 prêtres soutiennent activement le manifeste, selon le site internet de « l’Initiative des prêtres », créée en 2006. La petite république alpine, où le catholicisme est la religion dominante, compte près de 4.000 ecclésiastiques. Selon le « meneur » des rebelles, Helmut Schüller, plus de la moitié des ecclésiastiques sympathiseraient déjà avec leurs revendications.

Dans le très traditionnel Tyrol, le moine supérieur d’une importante abbaye bénédictine, Anselm Zeller, leur a affiché un soutien inattendu: « Quand des prêtres appellent à la désobéissance, c’est un évènement inquiétant », a-t-il déclaré au quotidien Tiroler Tageszeitung.

Mise en cause du célibat des prêtres

Il a même été jusqu’à mettre en question le célibat, jugeant plus important d’encourager les vocations de prêtres dont l’Autriche et l’Europe manquent cruellement: « Le célibat n’est pas le plus important », a-t-il ajouté. Dans le sondage de l’institut Oekonsult, plus de 86% des personnes interrogées jugeaient que le célibat avait fait plus de mal que de bien à l’église.

Après les scandales d’abus sexuels commis sur des enfants dans les institutions religieuses, l’église catholique autrichienne traverse une crise sans précédent. L’an passé, le nombre de fidèles ayant quitté l’Eglise a augmenté de 64% comparé à 2009, du jamais vu depuis 1945, selon les dernières statistiques compilées par les diocèses.

Mais « il y a aussi des critiques très dures », reconnaît Helmut Schüller, qui a été vicaire général de Vienne et bras droit du cardinal-archevêque Christoph Schönborn à la fin des années 90, puis a dirigé l’organisation Caritas en Autriche. « Beaucoup veulent nous éjecter de l’église catholique, beaucoup nous maudissent », a-t-il affirmé dans un entretien au magazine News. Face à la rébellion, le cardinal Schönborn exprime à la fois émoi et fermeté: « Un appel public à l’insubordination me bouleverse », avait-il répondu aux frondeurs en juillet, tout en n’excluant pas de prendre des sanctions. « Celui qui abandonne le principe d’obéissance détruit l’unité », avait-il fait valoir.

Des théologiens autrichiens ne ménagent pas non plus leurs critiques, moins sur le fond que sur la forme: les prêtres doivent se distancer « d’actes de désobéissance religieuse » pour pouvoir renouer le dialogue avec la hiérarchie, souligne le professeur viennois de théologie des dogmes Jan-Heiner Tück. L’appel est pain béni pour la presse, qui en a fait un « évènement » et la logique médiatique pousse à « l’escalade », avance de son côté le doyen de la Faculté de théologie catholique d’Innsbruck, Jozef Niewiadomski.

Le ministre des Affaires étrangères, Michael Spindelegger, doit se rendre le 7 septembre en visite au Vatican pour y rencontrer le Pape Benoît XVI. Il s’agit d’entretenir les contacts diplomatiques, indique-t-on au ministère, sans vouloir préciser si la fronde des prêtres sera abordée.

Levif.be avec L’Express.fr

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