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Défaite majeure pour Donald Trump et exploit des démocrates dans l’Alabama

Le Vif

Le candidat démocrate au Sénat dans l’Etat de l’Alabama a réussi l’exploit de se faire élire mardi dans ce bastion conservateur, battant un républicain controversé accusé d’attouchements sur mineures et qui était soutenu par Donald Trump.

Le démocrate Doug Jones a battu l’ancien magistrat ultra-conservateur Roy Moore à l’issue d’une campagne virulente qui a captivé l’Amérique et va priver le parti au pouvoir d’un précieux siège à la chambre haute du Congrès.

Selon des résultats quasi-complets, Doug Jones a obtenu 49,5% des voix, contre 48,8% pour Roy Moore.

« Le coeur de cette élection s’est jouée sur la dignité et le respect », a déclaré le vainqueur, un ancien procureur fédéral de 63 ans qui s’était fait connaître en faisant condamner des membres du Ku Klux Klan qui avait incendié une église noire dans les années 1960, tuant quatre fillettes.

« L’Alabama était à la croisée des chemins (…) Ce soir, vous avez emprunté le bon chemin », a-t-il lancé devant ses supporteurs à Birmingham, la plus grande ville de l’Etat.

Le revers est très personnel pour le président des Etats-Unis, qui avait appelé ses partisans à la loyauté au nom de la poursuite de son programme de réformes.

Mais c’est d’un tweet magnanime qu’il a salué la victoire du démocrate.

« Félicitations à Doug Jones pour cette victoire âprement disputée mais une victoire est une victoire », a écrit M. Trump dans un tweet. « Les habitants de l’Alabama sont formidables, et les républicains auront une nouvelle chance de gagner ce siège très bientôt », a-t-il ajouté, le mandat de l’élu devant se terminer en 2020.

Le président n’a toutefois pas eu un mot pour son candidat, Roy Moore.

Euphorie démocrate

Jamais depuis 1992 un démocrate n’avait été élu sénateur dans cet Etat du Sud.

Immédiatement, la victoire a été accueillie par une avalanche de félicitations démocrates. « Le pays n’oubliera pas que l’Alabama a voté pour l’espoir, et que Trump s’est rangé du côté d’un agresseur sexuel présumé d’enfants qui voulait ramener l’Amérique en arrière », a écrit le sénateur Chris Van Hollen.

« Vous ne pouvez prétendre être le parti des valeurs familiales tant que vous accepterez des hommes ignobles comme Roy Moore », a déclaré le président du parti démocrate, Tom Perez.

L’exploit de Doug Jones donne des ailes au parti d’opposition, qui a déjà obtenu un carton plein le mois dernier lors d’une série d’élections dans le pays. « Si les démocrates peuvent gagner dans l’Alabama, nous pouvons, et nous devons, concourir partout », s’est réjouie Hillary Clinton.

Bannon cible des critiques

M. Trump avait fait fi des allégations contre Roy Moore dans le but de conserver ce siège, afin d’améliorer les chances d’adoption, à court terme, de la grande baisse d’impôts en train d’être examinée au Congrès.

C’est la seconde soirée électorale perdante pour le président en un mois: en novembre, les démocrates ont remporté plusieurs scrutins pour des postes de gouverneurs ou d’autres sièges locaux.

Roy Moore.
Roy Moore.© REUTERS

Au quartier général de Roy Moore, à Montgomery, l’équipe de campagne n’avait pas concédé la défaite, mais le candidat devait s’exprimer.

Désormais, la majorité républicaine au Sénat sera de 51 sièges sur 100, réduisant sa marge de manoeuvre au quasi-minimum.

Pour le parti républicain, la défaite de leur candidat est aussi, paradoxalement, un soulagement, car elle lui évite d’avoir à gérer le cas Moore.

Le chef du Sénat, Mitch McConnell, avait prévenu que Roy Moore, en cas d’élection, ferait immédiatement l’objet d’une enquête de la commission éthique de la chambre haute du Congrès – une enquête qui aurait risqué de diviser le parti, a fortiori si la commission recommandait l’exclusion.

A l’exception notable de Donald Trump, la plupart des élus républicains avaient coupé les ponts avec Roy Moore après la publication de témoignages de femmes, afin d’éviter d’être sali par association. S’attirant les foudres des forces anti-establishment emmenées par Stephen Bannon, l’ex-conseiller de la Maison Blanche qui est en guerre ouverte contre les leaders du parti républicain.

Avant même la proclamation des résultats, les couteaux étaient déjà sortis à droite, en premier lieu contre Stephen Bannon, qui a fait émerger Roy Moore au moment de la primaire. « Je voudrais simplement remercier Steve Bannon pour nous démontrer comment on peut perdre l’Etat le plus rouge (républicain) de l’union », a tweeté, sarcastique, Josh Holmes, l’ancien bras droit de Mitch McConnell.

Et le seul sénateur républicain à avoir appelé à voter pour Doug Jones, Jeff Flake de l’Arizona, a tweeté une courte phrase: « la morale l’emporte ».

ico/mf

© Agence France-Presse

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