Cristina de Bourbon ici en 2005 © Reuters

Cristina de Bourbon, la princesse chassée du paradis

Le Vif

Cristina d’Espagne, princesse moderne, drôle, sportive et diplômée est depuis quatre ans la paria de la famille royale, interdite de cérémonies officielles, mais elle refuse résolument de lâcher son mari, accusé de malversations.

A 50 ans, Cristina Federica Victoria Antonia de la très Sainte Trinité de Bourbon et de Grèce, grande blonde à l’élégance sobre, a franchi lundi les portes du tribunal de Palma de Majorque, vêtue d’un strict costume noir, pour s’installer pour la première fois sur le banc des accusés.

Elle est jugée pour fraude fiscale. Au côté, toujours, de son époux depuis 18 ans, Iñaki Urdangarin, accusé de malversations, trafic d’influences, escroquerie et blanchiment, dans une affaire de détournement de 6 millions d’euros de fonds publics. Un drame personnel qui tranche avec une première partie de vie plutôt joyeuse.

Née le 13 juin 1965 à Madrid, Cristina était réputée la plus vive et la plus indépendante des trois enfants des souverains Juan Carlos et Sofia. Une de ses biographes, Consuelo Leon, l’a cependant décrite comme « timide et introvertie », après une enfance « très protégée dans une école conçue pour l’aristocratie madrilène ».

Intellectuelle et sportive, passionnée de voile, elle fait sensation à 19 ans en choisissant d’étudier les sciences politiques à l’université Complutense de Madrid, faculté des plus contestataires, où elle suit les cours avec sa discrète garde du corps.

Après un master en relations internationales à New York, la voici qui s’installe à Barcelone, s’éloignant à 27 ans du couple parental déchiré par les infidélités du roi. En 1997, ses noces avec un roturier – le handballeur vedette du FC Barcelone Iñaki Urdangarin – marquent l’apogée de la popularité de la famille royale.

Radieuse sous un diadème serti de diamants, « l’infante catalane » offre au pays un rare moment de communion nationale en épousant à Barcelone un natif du Pays basque. « C’est elle qui était tombée éperdument amoureuse d’Inaki », assure Jaime Peñafiel, chroniqueur controversé des grandeurs et décadences de la royauté. Et, « en dépit de tous les présumés délits et infidélités de son mari, elle reste amoureuse, prête à l’accompagner jusqu’en prison », assure-t-il, notant qu’elle est restée sourde aux injonctions de son père et de son frère qui souhaitent le divorce.

‘Les méchants du film’

En 2004 le couple acquiert à Barcelone un hôtel particulier à 6 millions d’euros. « D’où vient l’argent? », s’interroge le quotidien El Mundo, qui évoque déjà les suspicions sur la façon dont Urdangarin, à la tête d’une fondation, l’institut Noos, jongle avec fonds publics et privés. Quand le scandale éclate, fin 2011, en pleine crise économique, le couple incarne soudain « pour les Espagnols +les méchants du film+ », assure la spécialiste de la famille royale Ana Romero: « égoïstes et hédonistes » soupçonnés d’avoir payé, avec de l’argent détourné des dépenses personnelles: travaux de décoration ou cours de salsa…

Exilée à Washington, puis à Genève depuis 2013, Cristina reste salariée de la fondation de la banque La Caixa et de l’Aga Khan, un ami de son père, qui reste son principal employeur, dans sa fondation en Suisse.

Sourire forcé ou larmes aux yeux, elle a enduré les moqueries de la presse satirique et les huées aux abords du tribunal lors de sa première audition, filmée à son insu.

« Cristina n’accepte pas ce qui s’est passé: c’est énorme, depuis 2011, elle et son mari ont été exclus des activités de la Maison royale et leur expulsion du paradis a été d’autant plus douloureuse qu’elle s’est faite progressivement », assure Ana Romero, auteure d’un livre sur la fin du règne de Juan Carlos Ier, contraint d’abdiquer en 2014, ébranlé par divers scandales dont l’affaire Noos.

Le petit frère dont elle était si proche, Felipe, ne l’a pas invitée à partager le jour le plus important de sa vie: sa proclamation en tant que roi, le 24 juin 2014. Puis, deux jours avant le 50e anniversaire de Cristina, le 11 juin 2015, Felipe VI lui a retiré le titre de duchesse de Palma, reçu en cadeau de mariage.

Mais envers et contre tous, Cristina reste unie au père de ses quatre enfants, âgés de 10 à 16 ans. Et résiste, têtue, aux pressions visant à la faire renoncer à sa sixième place dans l’ordre de succession au trône.

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