Un lance-missile américain ATACMS en Corée du Sud. © AFP/South Korean Defence Ministry

Corée du Nord: des éléments sur le projet de tirs de missiles

Le Vif

La Corée du Nord a annoncé jeudi qu’elle peaufinait un plan pour tirer quatre missiles de portée intermédiaire vers Guam, territoire américain dans le Pacifique-ouest.

Cette annonce fait suite à une mise en garde spectaculaire de Donald Trump, qui a promis à Pyongyang le « feu et la colère » alors que la confrontation verbale entre les deux pays renforce les tensions sur la péninsule.

Le Nord est-il capable de mener une telle opération? Et les Etats-Unis sont-ils capables de l’en empêcher?

Missile entrant: le Hwasong 12

L’armée nord-coréenne a expliqué que son projet, auquel elle apportera les touches finales vers la mi-août, concernait quatre Hwasong-12 missiles qui s’abîmeront à 30 ou 40 kilomètres de Guam. Lors du dernier test en mai, ce missile de portée intermédiaire (IRBM) avait parcouru environ 787 kilomètres. Il avait été tiré à un angle élevé, et a selon les experts une portée maximale d’environ 5.000 kilomètres.

Ce qui met Guam, à quelque 3.300 kilomètres des bases de missiles nord-coréennes, largement à sa portée. Les spécialistes excluent qu’ils puissent manquer leur cible au point de s’abattre sur l’île elle-même.

Le Hwasong-12 n’est peut-être pas le plus précis des missiles avec sa technologie similaire à celle de l’URSS des années 1970, explique à l’AFP Yang Uk, chercheur au Forum coréen sur la défense et la sécurité KODEF. Mais ces « missiles peuvent rater leur cible de cinq kilomètres au plus ». A vu des distances de vol annoncées par Pyongyang, « les risques de frapper l’île par accident semblent plutôt faibles pour l’instant ».

Intercepteur numéro un: SM-3

En cas de tirs effectifs, les capacités balistiques américaines dans la région seront mises à l’épreuve.

Aucun missile nord-coréen n’a survolé le Japon depuis des années bien que récemment, plusieurs de ces engins se soient abattus dans la zone économique exclusive de Tokyo. Le Japon a prévenu par le passé qu’il abattrait tout missile nord-coréen qui menacerait son territoire. Tokyo comme Washington sont dotés du système de missiles intercepteurs Standard Missile-3 (SM-3). Ce système emploie la force brute — l’équivalent d’un camion de 10 tonnes lancé à environ 1.000 km/h — afin de détruire sa cible en entrant en collision avec elle. Il peut sortir de l’atmosphère terrestre et intercepter des missiles balistiques à haute altitude.

Son fabricant Raytheon assimile cette technique au fait « d’intercepter une balle avec une autre balle ». « Si les missiles visent Guam, les Etats-Unis vont agir, c’est naturel », juge Takashi Kawakami, spécialiste des questions de défense et professeur à l’Université Takushoku. « Le Japon et les Etats-Unis agissant ensemble, la probabilité d’une interception devrait s’accroître », dit-il à l’AFP. « Mais il est également possible qu’ils ratent certains missiles ». Le Japon dispose aussi de systèmes antimissiles Patriot, utilisables à plus faible altitude.

Intercepteur numéro 2 : THAAD

Washington a déjà déployé le puissant bouclier antimissile THAAD (Terminal High Altitude Area Defense) dans la région Asie-Pacifique, y compris en Corée du Sud, au Japon et sur Guam elle-même. Comme le SM-3, le système utilise l’énergie cinétique de l’intercepteur pour détruire la cible, par la force de l’impact, et a été testé avec succès contre un IRBM pour la première fois en Alaska le mois dernier.

Mais l’interception se produit dans la phase « terminale » du vol et il est peu vraisemblable que les batteries basées en Corée du Sud et au Japon soient efficaces. Et d’après les experts, le bouclier installé à Guam pourrait peiner face à quatre missiles simultanés. « Quatre cibles en même temps, ça promet d’être drôle », a écrit sur Twitter Jeffrey Lewis, de l’Institut Middlebury des études internationales de Californie. « J’y ajouterais un ou deux Aegis », a-t-il ajouté, en référence au système de défense qui équipe notamment les navires américains et japonais, et qui inclut des SM-3.

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