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Coopération militaire « historique » entre Londres et Paris

La France et le Royaume-Uni ont signé des traités de coopération en matière de défense d’une ampleur sans précédent, prévoyant notamment la création d’une force militaire commune ainsi que la mutualisation de porte-avions et de laboratoires nucléaires.

« Aujourd’hui, nous ouvrons un nouveau chapitre » dans nos relations, a déclaré M. Cameron lors d’une conférence de presse conjointe peu après avoir paraphé avec M. Sarkozy deux traités lors d’un bref sommet bilatéral à Londres.

Les accords, d’une ampleur inédite, sont un « fait historique qui va nous permettre de réaliser un certain nombre d’économies », a souligné M. Sarkozy. M. Cameron a de son côté évoqué des « centaines de millions de livres d’économies », sans plus de précisions.

Soulignant la volonté des deux pays de travailler « main dans la main », le président français a estimé que « toutes les conditions sont réunies pour une relation absolument exceptionnelle entre la Grande-Bretagne et la France », jugeant qu’il existait dorénavant entre les deux pays « un niveau de confiance jamais égalé dans l’Histoire ».

Les deux pays pourront ainsi rester des acteurs militaires de dimension internationale, malgré l’actuelle austérité budgétaire, mais sans cependant abandonner leur souveraineté. Paris tout comme Londres « conservera son droit de déployer ses forces armées de manière indépendante », a précisé le responsable.

Création d’une force commune Un premier traité portera sur la création d’une « force expéditionnaire conjointe », forte de 3.500 à 5.000 soldats et qui devra commencer l’entraînement dès l’an prochain. Cette nouvelle force ne sera pas permanente, mais sera déployée pour des opérations spécifiques sous un commandement unique.

Ce traité prévoit également le partage des porte-avions français et britannique à partir de 2020 afin de permettre à l’un des pays d’utiliser le navire de son voisin si son bâtiment est en maintenance ou en réparation. L’entretien du nouvel avion de transport A400m, ainsi que l’entraînement à son bord, seront également mutualisés.

En matière de sous-marins, Paris et Londres veulent développer ensemble, à partir de 2011, « des équipements et des technologies pour les sous-marins nucléaires des deux pays », a indiqué l’Elysée. « Cette coopération ne concerne pas la propulsion nucléaire, ni les armes nucléaires, mais tout le reste », a précisé la même source.

Les deux pays vont également travailler dès l’an prochain à la conception de la future génération de drones de surveillance « moyenne altitude, longue endurance » (Male), qui doivent être conçus entre 2015 et 2020, et lancer en 2012 un « programme commun de démonstrateur » destiné à préparer les futurs « drones de combat » susceptibles d’entrer en service en 2030.

Sur le plan des missiles, la France et la Grande-Bretagne doivent dévoiler mardi un « plan stratégique décennal » destiné, selon l’Elysée, à faire éclore un « maître d’oeuvre industriel européen unique ». Dès 2011, les deux pays vont ainsi travailler à un nouveau missile anti-navire, au successeur du missile de croisière baptisé Scalp en France et Storm Shadow au Royaume-Uni et à un projet de missile aérien de courte portée, a ajouté Paris.

Hormis ces coopérations industrielles, Paris et Londres vont également renforcer leur coopération opérationnelle.

En matière de porte-avions, la décision de Londres de se doter en 2016 d’un futur porte-avions doté de catapulte, comme le Charles-de-Gaulle français, va permettre à partir de 2020 de déployer une force aéronavale franco-britannique susceptible d’opérer à partir des deux bâtiments.

Les deux pays signeront par ailleurs en 2011 un contrat unique d’entretien et de maintenance pour leur flotte d’avions de transport militaire A400M et veulent former leurs pilotes ensemble. Ils partageront enfin leurs flottes de ravitailleurs en vol.

Mise en commun des technologies nucléaires Un deuxième traité stipulera que les deux pays mettront en commun leur technologie en matière d’essais nucléaires en laboratoire. Des Britanniques travailleront dans des instituts français et vice versa à partir de 2015. Cela permettra aux deux pays de simuler à partir de 2014 le fonctionnement de leur arsenal nucléaire dans une installation commune en Bourgogne.

Ce nouveau centre de simulation sera construit sur un site existant du Commissariat à l’énergie atomique (CEA) situé à Valduc (Côte-d’Or), à 45 km au nord-ouest de Dijon, et commencera à fonctionner dès 2014 et sera totalement achevé en 2022, a précisé la présidence française.

Il permettra aux scientifiques français et britanniques de « modéliser les performances des ogives et des matières nucléaires » mis en oeuvre par les deux armées afin d’assurer « la viabilité, la sûreté et la sécurité à long terme de nos arsenaux nucléaires », a-t-on souligné.

Le nouveau laboratoire de Valduc sera complété par un centre de recherche franco-britannique commun qui sera, lui, implanté à Aldermaston au Royaume-Uni, selon la même source.

Cette « coopération sans précédent », a indiqué l’Elysée, se fera « dans le respect total de l’indépendance des forces de dissuasion des deux pays ».

« Nous maintiendrons l’indépendance de notre dissuasion », a tenu à insister de son côté un responsable gouvernemental britannique. « Il n’y aura pas de +double clé+ sur nos armes nucléaires (…) il n’y aura pas de partage de nos secrets nucléaires », a-t-il ajouté.

La France et la Grande-Bretagne ont toutes les deux ratifié le traité d’interdiction complète des essais nucléaires et ne peuvent donc plus que simuler en laboratoire le fonctionnement de leurs ogives.

Le Vif.be, avec Belga

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