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Ce qu’il faut savoir sur Cristina Kirchner

L’Argentine a réélu sa présidente sortante, ce dimanche. Qui est Cristina Kirchner? A quoi doit-elle ce triomphe et quels sont les défis qui l’attendent pour son second mandat?

Une concentration du pouvoir sans équivalent depuis le retour de la démocratie

Ce n’est pas une simple victoire, c’est un triomphe pour Cristina Kirchner. Ce dimanche, elle a été réélue à la présidence argentine, dès le premier tour et avec un score historique. Avec 53,96% des voix, elle a écrasé son principal rival, le socialiste Hermes Binner, qui n’a obtenu que 16,87% des suffrages. Pour trouver un écart comparable, il faut remonter à septembre 1973, à la victoire de Juan Domingo Perón avec 37 points d’avance. Même son défunt époux, Nestor Kirchner, n’avait pas atteint ces sommets électoraux à son arrivée au pouvoir en 2003.

Sur les 24 provinces du pays, seule celle de San Luis dans le centre du pays échappe au Cristinazo (« le coup de Cristina », littéralement), tandis qu’elle dépasse les 65% des voix dans une dizaine de ces régions. Outre ce triomphe personnel, les kirchnéristes et leurs alliés obtiennent la majorité absolue à la Chambre des députés et au Sénat, en partie renouvelés ce dimanche, après des élections dont ils étaient sortis affaiblis en 2009.

Cristina Fernandez de Kirchner, de son nom complet devenu le sigle CFK, concentre désormais entre ses mains « un pouvoir qu’aucun président argentin n’a connu depuis la restauration démocratique », commente le quotidien Clarin qui rappelle combien, en huit ans d’exercice du pouvoir, « le kirchnérisme a développé des ramifications dans la politique mais aussi les tribunaux, les syndicats et le milieu des entreprises ».

Un deuil qui s’est transformé en arme politique

Mais sa victoire est solitaire. Celle qui fut la Première dame du président Nestor Kirchner avant qu’il ne lui laisse la place en 2007, dans un pas de deux remarquable, a perdu son alter ego, emporté par une crise cardiaque en octobre 2010. Depuis les années 1970, engagés dans le courant péroniste, ils s’entraidaient au sein de leur association « politico-amoureuse » pour gagner des élections locales, sénatoriales et présidentielle en 2003.

Même du vivant de son mari, c’était déjà elle, la moitié charismatique et autoritaire du duo, l’oratrice, le caractère fort, les commentateurs le sentaient déjà. Désormais, dans la presse, le « système K » ou le « kirchnérisme » côtoient d’ailleurs ses initiales, CFK, ainsi que le « cristinisme ».

Mais l’image de son défunt époux apparaît toujours en filigrane. Mieux: la « veuve en noir » en joue. Depuis un an, Cristina Kirchner s’habille toujours de cette couleur, pour marquer un deuil qui s’est transformé en formidable arme politique. Elle qui avait la réputation d’être « rentre-dedans », notamment lors de la grande crise avec les agriculteurs en 2008 pendant laquelle elle refuse toute négociation, cultive une image plus sensible.

Elle érige même « Nestor » en quasi-icône. « Les références à Nestor Kirchner sont omniprésentes », note La Nacion. Ce dimanche soir, quand elle en appelle à l’unité nationale, elle invite les Argentins à avoir « la même force que lui ». Et elle « remercie quelqu’un qui ne peut plus l’appeler mais qui est le vrai fondateur de la victoire de cette nuit ». L’émotion au fond de la gorge. C’était même lui qui devait briguer la présidence ce dimanche, dans leur plan initial. En réponse, les militants ont chanté ce dimanche soir: « Je suis ar-gen-tin, je suis sol-dat, sol-dat du pingouin! », en référence à l’ancien président.

Une croissance économique qui lui a servi de tremplin

Si elle devait expliquer sa victoire, Cristina Kirchner pourrait dire: « C’est l’économie, idiot! », reprenant un propos de Bill Clinton de 1992. En effet, ce plébiscite est lié à son profil de « veuve en noir », « à la faiblesse de l’opposition, mais surtout à la forte croissance du pays: plus de 9% cette année », note L’Expansion.com. « Son triomphe couronne une réussite économique inespérée, dix ans après la grande crise de 2001. Mais gare à la surchauffe… »

Les défis auxquels elle devra répondre dans les années à venir

Les premiers défis du second mandat de Cristina Kirchner, pour les quatre années à venir, sont bien sûr économiques. Ce n’est pas par hasard qu’elle a choisi son ministre de l’Economie Amado Boudou pour colistier. La Nacion et Clarin résument ces priorités: anticiper une baisse des ressources en raison de la récession mondiale, freiner la fuite des capitaux, dynamiser le secteur du logement de la construction… Reste à savoir si elle saura écouter l’opposition, ce qu’elle a très peu fait pendant son premier mandat, note le quotidien espagnol ABC.

Hauts talons et manucure, l’obsession de l’apparence

A 58 ans, Cristina Kirchner a beau vouloir minimiser sa réputation de coquette frivole et amatrice de luxe, elle reste obsédée par l’apparence, perchée sur ses talons hauts, la manucure toujours impeccable. Une obsession typique, en Argentine, de la classe moyenne à laquelle elle appartient. Et le pays garde les yeux rivés sur elle. Le site de La Nacion s’est même prêté aujeu de la machine à remonter dans le temps, de 1989 à nos jours. Rendez-vous en 2015, fin du second et dernier mandat « cristiniste », pour mettre à jour cette vidéo.

Levif.be, avec Lexpress

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