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« Cameron a l’avantage numérique et moral, mais… »

Les élections en Grande-Bretagne se sont soldées sur des scores très serrés. David Cameron sort vainqueur, mais sans majorité absolue. Gordon Brown et Nick Clegg ont perdu, mais pourraient former une coalition. Décodage avec un politologue de l’UCL.

Quelque 45 millions de Britanniques se sont rendu aux urnes, jeudi, afin d’élire un nouveau Parlement. Les sondages préélectoraux annonçaient des résultats très serrés, et c’est, semble-t-il, ce qui est advenu. Lieven De Winter, politologue à l’UCL, livre un premier commentaire sur ce scrutin.

Le Vif.be. En l’absence de majorité absolue des Tories, le jeu reste, semble-t-il, très ouvert pour la formation du gouvernement. Cependant, grâce à sa victoire, David Cameron, le dirigeant conservateur, n’a-t-il pas l’avantage?
Lieven De Winter. Il a un avantage numérique et moral. Il a obtenu le plus grand nombre de sièges. Le Labour est le deuxième parti et a clairement perdu les élections. Mais David Cameron ne dispose pas de la majorité absolue en sièges. Il n’est donc pas impossible que les travaillistes tentent une coalition avec les libéraux-démocrates, qui ont aussi perdu en termes de sièges. Encore faudrait-il que ces deux partis obtiennent la majorité, ce qui ne semble pas être le cas. Et puis, dans cette hypothèse, ils devraient encore composer avec une troisième petite formation. Comment vont réagir les médias si Gordon Brown persiste à vouloir gouverner sur la base d’une « coalition de perdants »? Cette réaction sera importante pour l’après-élection.

Rien, dans la Constitution ou la tradition, n’impose de confier au leader du parti vainqueur la primauté pour former un gouvernement?
La mission est confiée au leader du parti gagnant, mais quand il dispose d’une majorité absolue. Comme cela ne semble pas devoir être le cas, le jeu est ouvert et une alliance entre les deux partis défaits n’est pas exclue. Cependant, il est possible que David Cameron tente aussi de former une coalition soit avec les libéraux-démocrates (mais ce n’est pas le choix de prédilection de ce parti), soit avec le Parti unioniste d’Irlande du Nord. Une telle formule, si tant est qu’elle apporte une majorité, n’est cependant pas très viable. David Cameron peut aussi proposer de former un gouvernement minoritaire pour six mois avant un retour rapide devant les urnes.

Les libéraux-démocrates de Nick Clegg n’ont pas obtenu le résultat escompté. Est-ce dû à une chute de la popularité de M. Clegg en fin de campagne ou au système électoral, uninominal à un tour, qui favorise les deux grands partis?
En l’absence de résultats définitifs en voix, il est difficile de se prononcer sur la seconde hypothèse. Une certitude, en tout cas, est que la popularité de Nick Clegg, dopée après le premier débat télévisé, a chuté à la suite de sa prestation dans la deuxième partie du troisième et dernier débat. C’est à ce moment-là qu’il a avancé ses propositions, libérales, en matière d’immigration et de politique européenne.

De nombreux électeurs n’ont pas pu voter avant la fermeture des bureaux. Comment peut-on expliquer ce dysfonctionnement?
La raison en est une mauvaise préparation. L’enjeu s’est révélé plus sensible que lors des élections précédentes, quand il ne faisait pas de doute que le Labour et Blair l’emporteraient. La campagne 2010 a vu deux leaders charismatiques s’affronter, David Cameron et Nick Clegg, à côté d’un Premier ministre sortant, Gordon Brown. Les débats télévisés, une première, ont aussi attisé l’intérêt. Sans oublier, surtout, la possibilité de l’alternance après 13 ans de pouvoir travailliste…

G.P.

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