Le président du Burundi Pierre Nkurunziza. © REUTERS

Burundi: Nkurunziza reste le président « légitime » pour les Etats-Unis

Le chef de l’Etat du Burundi, Pierre Nkurunziza, demeure le président « légitime » de ce pays d’Afrique des Grands Lacs en dépit de la confusion sur l’issue d’une tentative de coup d’Etat, ont affirmé jeudi les Etats-Unis.

« Nous le reconnaissons comme le président légitime », a répondu le porte-parole du département d’Etat Jeffrey Rathke, interrogé sur le sort du président burundais toujours bloqué en Tanzanie à la suite d’une tentative de putsch à l’issue toujours incertaine. Le diplomate américain a reconnu qu’il y avait « compétition pour exercer l’autorité » à la tête du Burundi, mais que M. Nkurunziza restait le président « élu ».

Le département d’Etat a toutefois admis que la situation politique était « très changeante » à Bujumbura, la capitale secouée par de « multiples affrontements armés ». Washington a renouvelé son appel au calme lancé la veille par la Maison Blanche à toutes les parties prenantes au conflit, exprimant aussi sa « profonde inquiétude » face à « l’implication de l’armée » dans la crise burundaise.

Les Etats-Unis, alliés du Burundi, sont en pointe depuis des semaines sur cette crise, le secrétaire d’Etat John Kerry ayant exprimé lui-même la semaine dernière son opposition à un éventuel troisième mandat du président Nkurunziza qu’il a jugé anticonstitutionnel.

Le Conseil de sécurité de l’ONU a condamné jeudi la tentative de coup d’Etat au Burundi et a appelé au calme et à des « élections crédibles ». Les 15 membres du Conseil « condamnent (..) ceux qui cherchent à s’emparer du pouvoir par des moyens illégaux », a déclaré la présidente du Conseil dans une allusion implicite à la tentative de coup.

De plus, la présidence burundaise a affirmé jeudi soir que le chef de l’Etat Pierre Nkurunziza, qui était en Tanzanie depuis le lancement mercredi d’une tentative de coup d’Etat dans son pays, était de retour au Burundi. « Le président Pierre Nkurunziza est maintenant au Burundi », a affirmé le principal conseiller en communication du président, Willy Nyamitwe, à l’AFP. « C’est tout ce qu’on peut dire pour le moment pour des raisons de sécurité », a-t-il ajouté.

Les putschistes disent contrôler la « majorité » de Bujumbura

Il semble qu’il ait une accalmie à Bujumbura, la capitale du Burundi où un coup d’Etat a été tenté mercredi, les putschistes disent contrôler la « majorité » de la ville.

Des radios privées burundaises, dont la très populaire RPA, et la principale télévision indépendante du pays ont, par ailleurs, été attaquées dans la nuit de mercredi à jeudi par des partisans du président Pierre Nkurunziza visé par une tentative de coup d’Etat, ont affirmé à l’AFP les patrons de ces médias. « Cette nuit, une camionnette remplie de policiers a attaqué la RPA. Ils ont affronté pendant longtemps des soldats qui protégeaient cette station. Finalement ils ont tiré à la roquette sur la RPA, qui a été incendiée », a affirmé Innocent Muhozi, président de l’Observatoire de la presse au Burundi et patron de Télé Renaissance, elle aussi attaquée selon lui.

Selon un journaliste de l’AFP, les locaux de la RPA étaient toujours en feu jeudi matin, et les murs criblés d’impact de balles.

M. Muhozi a affirmé que sa télévision avait également été attaquée par des policiers loyaux à Pierre Nkurunziza, accompagnés de jeunes du parti au pouvoir, le Cndd-FDD. « Ils ont aussi attaqué Télé Renaissance. Il y a eu des affrontements et une de nos techniciennes est grièvement blessée au ventre », a-t-il dit à l’AFP.

Le patron d’un troisième média, Radio Bonesha, a lui aussi affirmé que sa station avait été visée, également selon lui par des policiers accompagnés d’Imbonerakure. Les Imbonerakure sont qualifiés de « milice » au service du pouvoir par l’ONU et accusés de campagnes d’intimidation contre les opposants au président Nkurunziza. « Notre station a été attaquée. Il y a eu des affrontements avec des soldats de faction » qui la protégeaient, a déclaré à l’AFP le directeur, Patrick Nduwimana, ajoutant qu’une grenade avait explosé.

Le général Godefroid Niyombare, ex-chef des services de renseignements burundais et ex-compagnon d’armes de Pierre Nkurunziza au temps de la guerre civile (1993-2006), a annoncé mercredi la destitution du chef de l’Etat alors que ce dernier se trouvait en déplacement officiel en Tanzanie. La présidence burundaise et le chef d’état-major de l’armée ont affirmé que le coup d’Etat avait échoué, ce qu’a démenti le camp putschiste. Il était encore impossible de dire jeudi matin qui détenait le pouvoir à Bujumbura. Selon des sources concordantes, Pierre Nkurunziza serait lui toujours en Tanzanie jeudi matin.

Violents combats entre militaires loyalistes et putschistes

De violents combats ont éclaté jeudi matin autour du siège de la télévision nationale à Bujumbura entre militaires loyalistes et putschistes au lendemain d’une tentative de coup d’Etat contre le président burundais Pierre Nkurunziza, en déplacement à l’étranger, ont indiqué des témoins et des sources militaires.

Selon les témoins, les combats à la mitrailleuse lourde et au lance-roquettes ont éclaté autour des locaux de la télévision et de la radio nationales, toujours sous le contrôle des partisans du président Nkurunziza. Selon une source au sein des militaires putschistes, le bâtiment de la RTNB a été attaqué à l’aube après que le chef d’état-major des forces armées burundaises, Prime Niyongabo, resté loyal au président, eut annoncé l’échec du coup d’Etat sur les ondes de la radio nationale.

Un journaliste qui se trouve à l’intérieur du complexe a confirmé des violents combats à l’arme lourde, y compris des canons et des lance-roquettes.

Après des semaines de contestation populaire, l’ancien chef des renseignements burundais, le général Godefroid Niyombare a annoncé mercredi la destitution du président Nkurunziza, en déplacement à l’étranger. La présidence burundaise a aussitôt affirmé que le coup d’Etat, mené par un groupe de militaires « mutins », avait été « déjoué ». Mais le général putschiste a assuré avoir le soutien de « beaucoup » d’officiers supérieurs de l’armée et de la police.

Dans la nuit, les deux camps ont chacun réaffirmé leurs positions, Prime Niyongabo revendiquant le contrôle de la « présidence » et le porte-parole des putschistes, le commissaire de police Vénon Ndabaneze, celui de l’aéroport.

Le président burundais, qui se trouvait mercredi à Dar es Salaam pour un sommet extraordinaire des chefs d’Etat de la Communauté est-africaine (Burundi, Kenya, Ouganda, Rwanda, Tanzanie), n’a pu regagner son pays en raison de la prise de l’aéroport par les putschistes.

Jeudi matin, il était toujours impossible de savoir qui contrôlait le pays, secoué depuis le 26 avril par un mouvement de contestation de la candidature de M. Nkurunziza à l’élection présidentielle du 26 juin. Les manifestations contre l’éventualité d’un troisième mandat du chef de l’Etat, au pouvoir depuis 10 ans, ont été marquées par de nombreuses violences qui ont fait une vingtaine de morts.

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