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Breivik n’est pas traité de manière « inhumaine »

Le Vif

La justice norvégienne a jugé mercredi que le tueur néo-nazi Anders Behring Breivik n’était pas traité de manière « inhumaine » en prison, infirmant un jugement prononcé à la surprise générale contre l’État norvégien l’an dernier.

« Breivik n’est pas et n’a pas été victime de torture ou de traitement inhumain ou dégradant », a indiqué la Cour d’appel d’Oslo dans un communiqué. Dans un jugement de 55 pages, les trois magistrats ont estimé que le régime carcéral très strict auquel Breivik est soumis était justifié par sa dangerosité.

L’extrémiste de 38 ans, qui en 2011 avait tué 77 personnes, à qui il reprochait de faire le lit du multiculturalisme, va interjeter appel devant la Cour suprême, la plus haute instance judiciaire du pays, a immédiatement annoncé son avocat, Øystein Storrvik .

Dans une décision qui avait stupéfié survivants et proches des victimes, un tribunal de première instance avait conclu en avril 2016 que la Norvège violait l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme bannissant tout traitement « inhumain » ou « dégradant ».

La juge avait en particulier pointé l’isolement prolongé de Breivik, maintenu à l’écart des autres détenus depuis cinq ans et demi, ce qui nuit à sa santé mentale selon son avocat.

L’État avait fait appel, jugeant que les conditions de détention étaient à la fois indispensables et conformes au droit. En janvier, lors d’un nouveau procès délocalisé dans la prison de Skien (sud) où Breivik est incarcéré, ses représentants avaient fait valoir les mesures adoptées pour compenser son isolement, notamment ses conditions de détention « douillettes » et ses multiples interactions avec entre autres les surveillants et un visiteur de prison.

Mercredi, les trois magistrats ont donné raison à l’État sur toute la ligne en rejetant aussi un appel interjeté par Breivik. Celui-ci estimait que la Norvège violait également l’article 8 de la Convention garantissant le droit à la vie privée, en exerçant un contrôle étroit de sa correspondance.

Le 22 juillet 2011, déguisé en policier, Breivik avait traqué pendant plus d’une heure les participants à un camp d’été de la Jeunesse travailliste, piégés sur l’île d’Utøya, et abattu 69 d’entre eux, pour la plupart des adolescents. Un peu plus tôt, il avait tué huit personnes en faisant exploser une bombe près du siège du gouvernement à Oslo.

L’auteur des crimes les plus sanglants de l’histoire norvégienne d’après-guerre a été condamné en août 2012 à une peine de 21 ans susceptible d’être prolongée indéfiniment.

Soulagement

« Aujourd’hui, je pense à toutes les véritables victimes des crimes du coupable », a réagi mercredi l’ancien chef de la Jeunesse travailliste, Eskil Pedersen, qui avait lui-même échappé de peu au massacre. « C’est une bonne décision pour l’État de faire appel. Satisfait du résultat », a-t-il dit sur Twitter.

Breivik n’a jamais exprimé aucun remords. En janvier, il avait ouvert le procès en appel sur ses conditions de détention avec un provocateur salut hitlérien.

Mais ses gestes et déclarations ne recueillent désormais qu’un écho limité en Norvège, nation paisible et prospère qui cherche à refermer ce chapitre douloureux de son histoire.

Pendant l’examen de l’appel, le Procureur général chargé de représenter l’État, Fredrik Sejersted, avait décrit un « prisonnier VIP », en bonne santé physique et psychologique, supportant très bien son régime carcéral.

En prison, celui-ci dispose de trois cellules de plus de 10 m2 chacune, certaines avec vue et toutes richement équipées avec entre autres téléviseurs, jeux vidéo et appareils de musculation.

« Ses conditions de détention sont meilleures que celles d’autres prisonniers », avait affirmé M. Sejersted. « Il n’existe aucun autre prisonnier qui puisse discuter et jouer à des jeux avec le personnel pénitentiaire deux heures par jour », avait-il souligné, rejetant la notion même d’isolement.

Breivik avait au contraire affirmé que son isolement contribuait à le radicaliser encore davantage. Ce régime carcéral pèse aussi sur son état psychologique, avait aussi souligné son avocat, Øystein Storrvik.

Sa « santé mentale ne semble pas bonne à mes yeux », avait dit M Storrvik dans une plaidoirie peu flatteuse pour l’ego de son client. Prenant pour preuve le contenu inapproprié de ses lettres et son insensibilité persistante face à ses crimes, il exigeait que Breivik puisse avoir des contacts avec d’autres détenus.

Si la Cour suprême accepte l’appel de Breivik, la procédure ne sera pas publique et aura lieu sans la participation de Breivik. L’avocat de celui-ci s’est dit prêt à aller jusqu’à la Cour européenne des droits de l’Homme à Strasbourg.

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