© Belga

Bataille inédite pour le perchoir du Parlement européen

Le Vif

Deux Italiens et le Belge Guy Verhofstadt sont engagés mardi dans une lutte inédite pour la présidence du Parlement européen, poste clé de l’UE que se partageaient jusqu’ici les grands partis pro-européens, unis contre les europhobes.

Réunis à Strasbourg, les 751 eurodéputés choisiront à bulletins secrets le successeur du social-démocrate allemand Martin Schulz, qui a renoncé à se représenter après cinq ans à la tête de l’institution, pour se consacrer à la politique de son pays.

Depuis 1979 – date de la première élection au suffrage universel du Parlement européen, alors présidé par la Française Simone Veil -, le parti de droite et centre-droit PPE et les sociaux-démocrates étaient toujours parvenus à un accord pour se partager le pouvoir, sauf lors de la législature de 1999-2004, quand le PPE s’était entendu avec les Libéraux.

Mais cette fois-ci, la belle entente a volé en éclats, rendant impossible toute prédiction sur l’issue du scrutin, où les votes des europhobes et de l’extrême droite pourraient faire la différence.

Elu pour deux ans et demi (un terme renouvelable), soit la moitié de la législature de cinq ans, le président du Parlement dirige le seul organe de l’UE directement élu par les citoyens, qui se partage le pouvoir législatif avec le Conseil, représentant lui les Etats.

Le PPE, le groupe politique comptant le plus d’eurodéputés, a désigné comme candidat l’Italien Antonio Tajani, un ancien commissaire européen, membre fondateur de Forza Italia et ancien porte-parole de Silvio Berlusconi.

Initialement, le PPE comptait sur les sociaux-démocrates et les libéraux pour soutenir son champion.

Ce groupe de droite, vainqueur des élections européennes en 2014, avait en effet soutenu la reconduction du social-démocrate Schulz pour un deuxième mandat, mais en échange de son appui en faveur du candidat PPE début 2017.

Coup de théâtre: les sociaux-démocrates ont finalement décidé de se lancer dans la course, avec Gianni Pittella, un autre Italien, tout comme les libéraux, en la personne de l’ex-Premier ministre belge, Guy Verhofstadt.

Révolté par cette « trahison », le président du groupe PPE, l’Allemand Manfred Weber, a fustigé ses « partenaires » d’hier.

« Tous ceux qui ne s’en tiennent plus à cet accord sont responsables de l’influence croissante des populistes dans cette maison », a-t-il dénoncé.

‘Temps troublés’

Des accusations que réfutent ses nouveaux adversaires: M. Pittella justifie notamment sa candidature par le fait que l’Europe a besoin de la gauche « pour mettre fin à l’austérité aveugle ».

Quant à M. Verhofstadt, chantre du fédéralisme européen et actuel référent au Parlement européen pour les négociations sur le Brexit, il estime pouvoir être « l’un des visionnaires, médiateurs », dont l’Europe, « menacée par des nationalistes et des populistes, a besoin en ces temps troublés ».

Des élections cruciales ont lieu cette année aux Pays-Bas, en France, et en Allemagne et une consultation anticipée pourrait aussi être organisée en Italie, tandis que l’extrême droite a le vent en poupe dans de nombreux pays européens.

Par ailleurs, M. Pittella, comme M. Verhofstadt, s’inquiètent du règne sans partage du PPE sur les trois institutions européennes s’il obtenait la présidence du Parlement.

Car la droite tient déjà les rênes de la Commission européenne, avec le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, et ceux du Conseil avec le Polonais Donald Tusk.

Selon des sources parlementaires, la course à la présidence du Parlement européen pourrait justement servir aux sociaux-démocrates à poser des jalons pour revendiquer, en cas d’échec, le poste occupé par M. Tusk, nommé en décembre 2014 pour deux ans et demi à la tête du Conseil, donc jusqu’à la mi-2017.

Seront également présents au premier tour du scrutin mardi: la Belge Helga Stevens, du groupe des Conservateurs et Réformistes européens (où siègent notamment les Tories pro-Brexit); l’Italienne Eleonora Forenza de la gauche radicale; la Verte britannique Jean Lambert et enfin le Roumain Laurentiu Rebega, soutenu par les europhobes du groupe Europe des Nations et des Libertés, que co-préside Marine Le Pen.

Quatre tours de scrutin sont théoriquement possibles.

Pour passer les trois premiers rounds, la majorité absolue est nécessaire.

Si celle-ci n’est pas atteinte, un quatrième tour est organisé pour départager les deux candidats ayant obtenu le plus grand nombre de voix.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire