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« Avec le temps, je pense que Kadhafi l’emportera »

Pour le renseignement américain, pas de doute : le régime du colonel Kadhafi a repris la main et n’a aucune intention de jeter l’éponge. Le dirigeant libyen s’installe dans la durée et pourrait bien l’emporter.

Les forces pro-Kadhafi, mieux équipées et disposant d’une défense anti-aérienne « assez importante », semblent avoir repris l’initiative face aux rebelles, ont jugé jeudi des responsables américains du renseignement, estimant qu’il y avait un risque de partition de la Libye.

« Au début, l’initiative était de l’autre côté, cela a commencé à bouger : nous avons atteint un point d’équilibre et l’initiative pourrait bien être du côté du régime », a déclaré le général Ronald Burgess, directeur du renseignement militaire (DIA), lors d’une audition devant la commission de la Défense du Sénat.

« Avec le temps, je pense que le régime l’emportera », a ajouté James Clapper, directeur national du renseignement (DNI), qui coordonne l’action des 16 agences américaines de renseignement et leurs 80 milliards de dollars de budget. Les rebelles doivent « s’attendrent à des moments difficiles », selon lui.

Kadhafi a fourni les meilleurs équipements à des unités désormais loyales

Les forces loyalistes ont repris jeudi Zawiyah, à l’ouest de Tripoli, et se trouvent désormais aux portes de Ras Lanouf (est), ville pétrolière stratégique tenue par les rebelles depuis le 4 mars.

Le colonel Mouammar Kadhafi, au pouvoir depuis 42 ans, a fait en sorte de bâtir son armée en fournissant les meilleurs équipements et le meilleur entraînement à des unités dont il s’est assuré la loyauté, a remarqué James Clapper. Kadhafi dispose notamment de deux brigades spéciales, la 32e et la 9e, qui sont « les plus lourdement équipées avec du matériel russe, dont des défenses anti-aériennes, de l’artillerie, des chars et de l’équipement mécanisé ».

Alors que la communauté internationale s’interroge sur l’opportunité de décréter une zone d’exclusion aérienne, le patron du renseignement a jugé les défenses anti-aériennes « assez importantes » : « La structure de la défense anti-aérienne libyenne au sol, avec leurs radars et leurs missiles anti-aériens, est assez importante. C’est la plus importante au Moyen-Orient après celle de l’Egypte. »

La Libye dispose de « nombreux équipements » d’origine russe « d’une certaine qualité », dont une partie est tombée dans les mains de l’opposition. Tripoli dispose également d’environ 31 sites anti-aériens et de radars dédiés à la surveillance et à la protection de la côte libyenne où se concentre 80 % à 85 % de la population du pays, a rappelé James Clapper.

Les forces libyennes ont surtout un « grand, grand nombre de lance-missiles portables », a-t-il ajouté, précisant que la possibilité que ces derniers « tombent entre de mauvaises mains » était une « grande source d’inquiétude ».

Seule une petite partie de l’aviation libyenne est en revanche opérationnelle. Au total, Mouammar Kadhafi ne peut compter que sur « 75 à 80 appareils », un tiers étant des avions de transport, un tiers des hélicoptères et le reste des chasseurs, selon James Clapper, soit une menace jugée « modeste » mardi par le commandant du corps des Marines, le général James Amos.

Une zone d’exclusion aérienne n’empêcherait pas les hélicoptères d’attaque libyens, plus difficiles à traquer, de s’en prendre aux populations, selon les analystes. Pour James Clapper, les raids aériens libyens n’ont à ce stade « pas provoqué de nombreuses victimes ».

Pour le renseignement américain, Kadhafi n’a aucune intention de quitter le pouvoir

Les agences américaines du renseignement estiment que le colonel Kadhafi n’a en tout cas aucune intention de quitter le pouvoir. « Il semble s’installer dans la durée », a-t-il jugé. Si aucun camp ne prenait le dessus, la situation pourrait conduire à une partition du pays, Kadhafi contrôlant la Tripolitaine et les rebelles la région de Benghazi, selon lui. Ou alors mener à un situation « à la somalienne », avec un pays sans Etat pour l’administrer.

LeVif.be, avec Belga

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