Joao Doria © AFP

Au Brésil, des « croquettes pour pauvres » font scandale

La « farinata », un complément alimentaire lancé par le maire de Sao Paulo pour combattre la faim, arrive dans les écoles de la plus grande métropole d’Amérique du sud malgré le scandale provoqué par ces granulés qui font irrésistiblement penser à des croquettes pour chiens.

Ce produit, confectionné à partir d’aliments proches de leur date limite de consommation, a provoqué une vive controverse lorsque le maire de Sao Paulo, Joao Doria, l’a présenté.

Le fabricant, Plataforma Sinergia, a présenté la « farinata » sous des formes moins choquantes — spaghetti, farine ou biscuits — et sans exposer les granulés moqués par les réseaux sociaux, lors d’une conférence de presse destinée mercredi à éteindre la polémique.

Joao Doria, probable candidat à la présidentielle de 2018, a déclaré que cet aliment commencerait à être distribué ce mois-ci dans les écoles de la métropole comme « supplément alimentaire ».

Et ceci alors même que la municipalité avait d’abord assuré que les granulés ne seraient pas distribués dans les écoles et bien que l’adjointe aux Droits de l’Homme, Eloisa Arruda, ait expliqué qu’aucune étude n’avait été menée sur les besoins nutritionnels des écoliers paulistes.

« L’adjoint à l’Education a donné son feu vert à la ‘farinata’ dans le milieu scolaire, sous forme de compléments », a assuré le maire.

‘Aliment du bonheur’

En présentant la semaine dernière « la farinata » dans le cadre d’une loi municipale sur l’éradication de la faim, Joao Doria avait qualifié les granulés d' »aliments du bonheur » et plaidé pour leur distribution immédiate auprès des plus démunis de la métropole.

Proche d’une céréale, l' »aliment du bonheur », avait-il dit, « est un aliment complet ». Le maire n’a pas indiqué le nombre d’écoles ni d’enfants concernés.

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Le manque d’information sur la composition du produit et sa distribution, sans parler de son aspect rappelant les croquettes pour animaux domestiques, ont créé la polémique sur cette nourriture qui pourrait aussi être distribuée aux bataillons de pauvres vivants dans les rues de Sao Paulo.

Environ 1,5 million de personnes de l’Etat de Sao Paulo sont dans une situation d’insécurité alimentaire, selon des statistiques datant de 2013, donc avant la récession historique de 2015-2016.

La distribution de ce type d’aliments « nécessite une discussion approfondie, y compris avec la société » civile, a déclaré à l’AFP la porte-parole du Conseil régional de la nutrition, Vivian Zollar.

« Et quand nous proposons des granulés à une personne aux faibles revenus nous creusons encore les inégalités sociales », a-t-elle déploré.

Lundi, le même Conseil avait estimé dans un communiqué que cet aliment représentait « un recul par rapport aux progrès obtenus ces dernières décennies dans le domaine de la sécurité alimentaire ».

Mme Zollar a également accusé la mairie de ne pas avoir fait d’étude préalable sur la sous-alimentation dans la ville pour rechercher des solutions alternatives.

« Quand la municipalité a présenté le granulé (..) il était clair que jamais nous n’avons pensé qu’il se substituerait aux aliments », a rétorqué Mme Arruda, l’adjointe aux Droits de l’Homme.

‘Technologie unique au monde’

« Je suis choqué quand j’entends dire que cet aliment est pour les chiens », s’est insurgé le cardinal de Sao Paulo, dom Odilo Scherer, qui soutient l’initiative du maire.

Pour le prouver, il a mangé avec Joao Doria, lors de la conférence de presse, du pain cuit avec la fameuse farine, tout en demandant que le débat soit « dépolitisé ».

Rosana Perrotti, représentante de Plataforma Sinergia, a assuré pour sa part à l’AFP que la « farinata » respectait les normes de la législation brésilienne sur l’alimentation et avait reçu une certification officielle.

Selon elle, « la farinata » est le produit d’une technologie unique au monde qui prolonge la durée de consommation des aliments, et permet de reculer d’au moins deux années la date limite de consommation de produits alimentaires proches de leur date de péremption.

La société a refusé à l’AFP l’autorisation de visiter son usine afin de protéger le secret de sa technologie.

Mme Perrotti a indiqué que la production de la « farinata » était financée par des donateurs, sans préciser aucun montant.

Plataforma Sinergia, une entreprise à but non lucratif, a déjà distribué le produit à trois organisations humanitaires et envisage de le proposer à des migrants à la frontière avec le Venezuela.

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