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Attentat suicide d’Istanbul : arrestation d’un suspect

Le Vif

La police turque poursuivait mercredi son enquête au lendemain de l’attentat suicide attribué au groupe Etat islamique (EI) qui a, pour la première fois en Turquie, visé des étrangers et le secteur-clé du tourisme en tuant à Istanbul 10 personnes.

La police turque a arrêté un suspect en lien avec l’attentat suicide qui a tué mardi 10 personnes, dont au moins huit touristes allemands, dans le coeur historique d’Istanbul, a annoncé mercredi le ministre turc de l’Intérieur Efkan Ala. « Une personne a été placée en détention mardi soir après cette attaque. L’enquête se poursuit méticuleusement », a ajouté M. Ala devant la presse, à l’issue d’un entretien avec son homologue allemand Thomas de Maizière.

Trois mois après celle qui a fait 103 morts à la gare d’Ankara, cette nouvelle attaque a été perpétrée, selon les autorités, par un Syrien âgé de 28 ans, entré sur le sol turc il y a quelques jours depuis la Syrie et présenté comme un membre de l’EI. Dans la foulée de l’attentat, la police turque a poursuivi ses descentes dans les milieux jihadistes, apparemment sans lien immédiat avec les événements d’Istanbul, en arrêtant mercredi 9 personnes, dont 3 ressortissants russes, à Antalya (sud) et Mersin (sud), selon l’agence de presse Dogan.

Dans la seule journée de mardi, 65 partisans présumés de l’EI avaient été arrêtés à Ankara, Izmir (ouest), Kilis, Adana et Mersin (sud), ainsi qu’à Sanliurfa (sud-est).

Longtemps soupçonné de complaisance envers les rebelles radicaux syriens, le régime islamo-conservateur turc a rejoint l’été dernier la coalition internationale antijihadiste, pilonnant l’EI en Syrie. Depuis l’automne, il a multiplié les arrestations de membres présumés de l’EI, affirmant avoir déjoué plusieurs projets d’attentats.

Selon les médias turcs, l’auteur de l’attaque d’Istanbul s’appelait Nabil Faldi, né en Arabie saoudite, et était entré en Turquie le 5 janvier en tant que réfugié. C’est grâce à ses empreintes digitales enregistrées par les services d’immigration qu’il a pu être rapidement identifié, a précisé la presse turque. Ce « kamikaze » a actionné sa ceinture d’explosif mardi matin dans le coeur historique d’Istanbul, sur l’ancien hippodrome bordant la basilique Sainte-Sophie et la Mosquée bleue, visités chaque année par des millions de touristes étrangers.

Dix personnes, dont au moins 8 Allemands et un Péruvien, ont été tuées et 15 autres blessées, dont deux se trouvaient toujours dans un état grave mercredi, a indiqué à l’AFP un responsable sanitaire de la ville.

Des roses en hommage

Le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu devait rendre visite mercredi aux blessés dans trois hôpitaux stambouliotes, ont annoncé ses services. Mercredi matin, la police avait levé ses cordons de sécurité et rendu la place aux touristes, ont constaté des journalistes de l’AFP.

Devant une nuée de médias, quelques personnes ont rendu hommage aux victimes en déposant des roses rouges au pied de l’obélisque où l’explosion s’est produite. L’attentat, qui a notamment visé un groupe de 33 touristes allemands, a provoqué une vive émotion à Berlin.

La Turquie est en alerte maximale depuis l’attentat qui a visé le 10 octobre une manifestation prokurde devant la gare d’Ankara, faisant 103 morts. Cette attaque, la plus meurtrière jamais perpétrée sur le sol turc, a été attribuée à l’EI.

Le pays est également secoué depuis l’été dernier par la reprise de combats meurtriers entre ses forces de sécurité et les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), après une accalmie de deux ans. La presse indépendante turque a largement attribué mercredi l’attentat de mardi aux ambiguïtés de la politique du président Recep Tayyip Erdogan vis-à-vis des jihadistes.

« Nous sommes comme assis sur une bombe à retardement et la seule raison de cette situation est cette tolérance obsédée accordée aux groupes jihadistes », a commenté dans le journal à gros tirage Hürriyet l’éditorialiste Mehmet Yilmaz.

De nombreux analystes ont également souligné la volonté de l’EI de muscler ses attaques contre la Turquie, soulignant que le groupe n’y avait jusque-là uniquement visé que des cibles kurdes, dont les combattants sont ses principaux adversaires en Syrie.

« L’EI s’en prend à la très lucrative industrie du tourisme qui rapporte au pays plus de 30 milliards de dollars chaque année », a noté Soner Cagaptay, du Washington Institute. Cet attentat vise aussi à « attaquer la Turquie pour qu’elle abandonne ou au moins ralentisse ses opérations contre le groupe », a-t-il ajouté.

Une partie des Allemands tués devait visiter trois villes

Une partie des victimes allemandes de l’attentat suicide perpétré mardi matin à Istanbul devait visiter trois villes dans le cadre d’un voyage organisé par l’agence berlinoise Lebenslust Touristik, a indiqué mercredi la société à l’AFP. « En contact étroit avec le ministère des Affaires étrangères », Lebenslust ne sait pas encore combien de ses clients figuraient parmi les dix morts et les quinze blessés de l’attaque, a précisé Ingo Lessmann, porte-parole de Lebenslust.

Le groupe de touristes, arrivé lundi soir à Istanbul, comptait 33 personnes venues de toute l’Allemagne et devait s’envoler mercredi pour Dubai, avant de poursuivre ses vacances à Abu Dhabi, a ajouté M. Lessmann, promettant plus de précisions dans la matinée. « Au moins huit » des tués sont Allemands, de même que neuf des blessés, avait indiqué mardi soir la chancelière allemande Angela Merkel, tandis qu’un responsable turc annonçait sous couvert d’anonymat neuf morts allemands.

Selon les autorités régionales allemandes, figurent parmi les morts un homme de 67 ans venu de Hesse (ouest), deux hommes et une femme originaires de Rhénanie-Palatinat (ouest), une habitante de Leipzig (est) de 70 ans et deux habitants de Dresde (est) de 51 et 75 ans.

La presse allemande évoque également, sur la foi de sources locales, un couple de retraités du Brandebourg (est) ainsi qu’une victime berlinoise, ce qui porterait à dix le nombre de morts allemands, soit la totalité des tués. Les blessés viennent pour deux d’entre eux de Berlin, deux autres de Basse-Saxe (nord-ouest), deux de Bavière (sud), une femme de 50 ans de Hesse et une femme du Rhénanie-Palatinat, recensent les médias. Les drapeaux des bâtiments officiels de Berlin ont été mis en berne, a annoncé le gouvernement régional à l’agence allemande DPA.

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