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Assad vainqueur attendu de la présidentielle dans une Syrie en guerre

Le Vif

Les Syriens votaient mardi, sous le bruit des bombes, pour une présidentielle controversée qui doit maintenir au pouvoir Bachar al-Assad en quête de légitimité dans son combat contre la rébellion dans un pays ravagé par trois ans de guerre.

Ce scrutin, dénoncé comme une « farce » par l’opposition et ses alliés occidentaux et arabes qui assistent impuissants à une réélection de M. Assad, est organisé dans les régions sous contrôle du régime alors que le pays est à feu et à sang.
L’ambiance est surréelle à Damas; files d’attente devant les bureaux de vote installés par le pouvoir, chants et danses dans la rue à la gloire de M. Assad, bruit des explosions et des tirs d’obus dont plusieurs sont tombés dans la capitale et intense survol de l’armée de l’air.

Imperturbable et décontracté, M. Assad, qui s’est dit maintes fois déterminé à en finir avec les rebelles assimilés à des « terroristes », a voté le matin avec son épouse Asma à Damas, selon des images diffusées par la télévision d’Etat.

Ont également voté dans la capitale, les deux autres candidats à la présidentielle, Hassan al-Nouri et Maher al-Hajjar, considérés comme des faire-valoir à M. Assad qui jouit toujours du soutien d’une partie de la population.

Depuis l’ouverture des bureaux de vote à 07H00 locales (04H00 GMT), les télévisions d’Etat, mobilisées, montrent des images d’une forte affluence de votants qui, dans leur majorité, ne prenaient pas la peine de se rendre dans l’isoloir et cochaient devant les caméras la case sous la photo de M. Assad avant de déposer leur bulletin dans l’urne.

Dans la ville de Homs (centre), prise par le régime début mai, les membres de la sécurité sont déployés en force, les voitures fouillées minutieusement et autobus ou camions bloquent les rues pour prévenir d’éventuels attentats.

Plus au nord, à Alep, il y avait aussi une grande affluence dans les secteurs pro-régime, selon la télévision.

Plus de 15 millions de Syriens sont appelés aux urnes et le vote supervisé par des observateurs iraniens, russes et même nord-coréens, devra s’achever à 16H00 GMT. Aucune indication n’a été donnée sur la date des résultats.

Le régime contrôle 40% du territoire, selon le géographe spécialiste de la Syrie Fabrice Balanche, alors que la guerre a fait depuis mars 2011 plus de 162.000 morts, déraciné quelque neuf millions de personnes et laissé le pays en ruines.

« La solution politique à la crise commence aujourd’hui », a déclaré le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Mouallem, après avoir voté à Damas, parlant de scrutin « démocratique ».

Dans le camp adverse et au moment où les combats et bombardements continuent de faire rage à travers le pays, les insurgés dénoncent une « élection de sang » et les Etats-Unis une « imposture », alors que l’Otan a assuré que les résultats ne seront « pas reconnus ».

« Parallèlement aux élections de sang, les forces d’Assad bombardent violemment Daraya avec des barils d’explosifs », a indiqué Mohannad, un militant de cette localité proche de Damas.

« Les dictateurs ne sont pas élus, ils gardent le pouvoir par la force et la peur, ce sont les deux raisons qui poussent les Syriens à participer à cette mascarade », a affirmé le chef de l’opposition en exil, Ahmad al-Jarba.

L’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) a rapporté que le régime « forçait » les citoyens à voter sous peine d’arrestation.

« Assad tente de se redonner une légitimité et d’atténuer son image de criminel de guerre. Les Syriens ne le haïront que davantage », ont affirmé les comités de coordination locales, réseau de militants.

Face à des rebelles en manque d’armes, M. Assad est à la tête d’une armée restée soudée autour du régime malgré les défections, et bénéficie des soutiens russe et iranien et de l’aide précieuse des combattants aguerris du Hezbollah libanais et de supplétifs syriens et étrangers.

En théorie, il s’agit de la première élection en Syrie depuis un demi-siècle, Bachar al-Assad et avant lui son père Hafez ayant été désignés par référendum, mais elle est organisée en vertu d’une loi excluant de facto toute candidature dissidente.

Pour Noah Bonsey, de l’International Crisis Group (ICG), la présidentielle « ne changera pas la donne » si ce n’est de faire perdurer le conflit. « Cette mise en scène n’influera guère sur les positions » des protagonistes.

Le conflit en Syrie a débuté par une contestation pacifique qui, après une brutale répression, s’est transformée en une révolte avant de devenir une guerre complexe avec aussi des combats entre rebelles et jihadistes.

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